Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le numéro 13MA00061, présentée pour la commune de Puget-Théniers, représentée par son maire en exercice, par MeA... ;
La commune de Puget-Théniers demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800501 du 5 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande des consortsE..., de la SCI le Gralet et de l'association FARE Sud la délibération de son conseil municipal du 27 novembre 2007 approuvant le plan local d'urbanisme ;
2°) de rejeter les demandes présentées par les consortsE..., la SCI le Gralet et l'association Fare sud devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) de mettre à la charge des consortsE..., de la SCI le Gralet et de l'association FARE Sud une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.............................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le décret n° 2003-1169 du 2 décembre 2003 portant approbation de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2014 :
- le rapport de M. Salvage, premier-conseiller,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;
- et les observations de Me D...pour Mme E...et la SCI Le Granet et de Me B... pour l'association pour la défense de l'environnement FARE Sud ;
1. Considérant que par le jugement contesté du 5 novembre 2012 le tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande des consortsE..., de la SCI le Gralet et de l'association FARE sud, la délibération du conseil municipal de la commune de Puget-Théniers en date du 27 novembre 2007 approuvant le plan local d'urbanisme (PLU) au double motif d'une méconnaissance de l'article R. 123-16 du code de l'urbanisme et d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'institution de micro zones N correspondant à des secteurs NC dans la zone A ;
Sur la recevabilité de l'appel :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement du 5 novembre 2012 a été notifié à la commune de Puget Théniers le 7 novembre ; que, dès lors, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 janvier 2013, n'est pas tardive ; que la fin de non-recevoir opposée par M. et Mme E...et la SCI le Gralet ne peut donc être accueillie ;
Sur la régularité du jugement contesté :
3. Considérant, d'une part, que, nonobstant la circonstance que le premier juge n'a pas expliciter en quoi la circonstance que Mme E...ait reçu le projet de plan local d'urbanisme qu'elle avait demandé comme représentante de l'association " UFC que choisir " n'était pas de nature à faire regarder l'association " FARE sud ", qu'elle représente également, comme ayant été mise à même de présenter ses observations, le jugement, qui reprend l'ensemble des arguments et pièces produites par les parties et apprécie leur portée respective pour retenir le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article R. 123-16 du code de l'urbanisme, est suffisamment motivé en fait et en droit ;
4. Considérant, d'autre part, que la commune de Puget-Théniers soutient que le tribunal administratif aurait dû s'interroger sur les conséquences de l'annulation totale du PLU et sur les possibilités de modulation de son jugement ; que, toutefois, ni la commune ni aucune autre partie n'ayant formulé de demande en ce sens, il n'avait pas à se prononcer expressément sur ce point dans son jugement, et n'a donc ni entaché ce dernier d'omission à statuer, ni méconnu son office ;
Sur la recevabilité de la requête de première instance :
5. Considérant que la commune de Puget-Théniers soutient que, au regard de son objet social, l'association FARE sud n'a pas intérêt pour agir contre la délibération approuvant son PLU ; que, toutefois, cette association est agréée pour la protection de l'environnement au titre de l'article L. 160-1 du code de l'urbanisme et de l'article 40 de la loi du 10 juillet 1976, pour les départements des Alpes de Haute-Provence, des Hautes-Alpes, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône et du Var ; qu'elle justifie ainsi d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec son objet et ses activités statutaires sur tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément ; qu'il résulte des statuts de cette association qu'elle a pour objet d'agir notamment en faveur de la protection de l'environnement et de la nature et d'intervenir sur l'aménagement du territoire ; que, dès lors eu égard au contenu et à la portée de ce document d'urbanisme, elle est recevable à contester la légalité d'un plan local d'urbanisme d'une commune située dans l'un des départements précités ;
Sur le bien-fondé du jugement contesté :
6. Considérant, en premier lieu, que selon les dispositions de l'article L. 121-5 du code de l'urbanisme : " Les associations locales d'usagers agréées dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, ainsi que les associations agréées mentionnées à l'article L. 141-1 du code de l'environnement sont consultées, à leur demande, pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale, des schémas de secteur et des plans locaux d'urbanisme. Elles ont accès au projet de schéma ou de plan dans les conditions prévues à l'article 4 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal " ; qu'aux termes de l'article R. 123-16 du même code : " Les présidents des organes délibérants des collectivités publiques, des établissements publics, des organismes associés et des associations agréées ainsi que les maires mentionnés aux deux premiers alinéas de l'article L. 123-8, ou leurs représentants, sont consultés par le maire ou par le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent à chaque fois qu'ils le demandent pendant la durée de l'élaboration ou de la révision du plan " ;
7. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;
8. Considérant qu'en l'espèce le premier juge a retenu le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions de l'article R. 123-16 du code de l'urbanisme en estimant que l'association FARE sud, en tant que telle, n'avait pas été mise à même de présenter ses observations sur le projet de plan local d'urbanisme ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que MmeE..., qui représentait à la fois les associations FARE sud et " UFC que choisir " a présenté des observations sur ce projet ; que, dans ces circonstances, l'association FARE sud n'a pas été privée d'aucune garantie et le vice en cause n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ; que la commune de Puget-Théniers est dès lors fondée à soutenir que ce premier moyen ne pouvait être accueilli ;
9. Considérant en second lieu qu'aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / Les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont seules autorisées en zone A. Est également autorisé, en application du 2° de l'article R. 123-12, le changement de destination des bâtiments agricoles identifiés dans les documents graphiques du règlement " ; qu'aux termes de l'article R. 123-8 du même code dans sa rédaction applicable : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. (...) des constructions peuvent être autorisées dans des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées, à la condition qu'elles ne portent atteinte ni à la préservation des sols agricoles et forestiers ni à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages " ; qu'en outre, aux termes de l'article L. 123-3-1 du code de l'urbanisme : " Dans les zones agricoles, le règlement peut désigner les bâtiments agricoles qui, en raison de leur intérêt architectural ou patrimonial, peuvent faire l'objet d'un changement de destination, dès lors que ce changement de destination ne compromet pas l'exploitation agricole " ; qu'aux termes de l'article R. 123-12 du même code : " Les documents graphiques prévus à l'article R. 123-11 font également apparaître, s'il y a lieu (...) 2° Dans les zones A, les bâtiments agricoles qui, en raison de leur intérêt architectural ou patrimonial, peuvent faire l'objet d'un changement de destination, dès lors que ce changement de destination ne compromet pas l'exploitation agricole " ;
10. Considérant que, tout en admettant l'illégalité de l'institution de micro zones N correspondant à des secteurs Nc dans la zone A, retenue par le tribunal administratif au regard de la règlementation applicable en l'espèce, la commune de Puget-Théniers soutient que cette dernière était excessive et générale et donc contraire à l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'aux termes de ce dernier : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ; que si ces stipulations ne font pas obstacle à l'édiction, par l'autorité compétente, d'une réglementation de l'usage des biens, dans un but d'intérêt général, ayant pour effet d'affecter les conditions d'exercice du droit de propriété, il appartient au juge, pour apprécier la conformité aux dites stipulations d'une décision individuelle prise sur la base d'une telle réglementation, d'une part de tenir compte de l'ensemble de ses effets juridiques, d'autre part, et en fonction des circonstances concrètes de l'espèce, d'apprécier s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les limitations constatées à l'exercice du droit de propriété et les exigences d'intérêt général qui sont à l'origine de cette décision ; qu'en l'espèce la réglementation en cause n'interdit ni les constructions ni l'institution de micro zones N en zone A de manière générale et absolue mais les soumet à des conditions, qui ne sont pas respectées en l'espèce ; que ces conditions répondent en outre à une exigence d'intérêt général, au regard de la nature même des zones en cause, et les limitations ainsi apportées, le cas échéant, au droit de propriété ne sont pas disproportionnées par rapport à cette dernière ; que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait ainsi être accueilli ;
11. Considérant, toutefois, que la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'urbanisme n'est de nature à justifier l'annulation de la délibération qu'en tant qu'elle institue des micro zones N correspondant à des secteurs Nc dans la zone A du PLU et non pas en totalité ; que la commune de Puget Théniers est donc fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté le tribunal administratif de Nice l'a annulé totalement ;
12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier " ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, lorsque le tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, et d'apprécier si l'un au moins de ces motifs justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; que dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; qu'il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges ; qu'en l'espèce, le seul motif retenu par ces derniers susceptible de justifier l'annulation totale de la délibération en cause l'ayant été à tort, il revient à la cour, par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer d'une part sur les moyens soulevés par les demandeurs de première instance pouvant conduire à une annulation totale, d'autre part sur ceux qui sont susceptibles d'entraîner l'annulation de la délibération en tant qu'elle approuvait des dispositions du plan autres que celles dont l'annulation résultait du motif confirmé ;
Sur les autres moyens soulevés par l'association Fare Sud, M. et Mme E...et la SCI le Gralet :
13. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées (...) avant : / a) Toute élaboration ou révision (...) du plan local d'urbanisme (...) " ;
14. Considérant que l'association FARE sud soutient que les dispositions de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme ont été méconnues, les modalités de la concertation telles que fixées par la commune n'ayant pas été respectées ; que ce moyen, relevant de l'une des deux causes juridiques invoquées en première instance et en appel dans le délai de recours contentieux, est recevable ; que par délibération du 15 mai 2002 le conseil municipal de Puget-Théniers a prévu deux réunions et la mise à disposition du public d'un registre d'observations en mairie ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'un tel registre ait été effectivement mis à la disposition du public ; que les modalités de la concertation ont ainsi été méconnues ; que le public ayant, en conséquence, été privé d'une garantie, ce vice est de nature à entacher d'illégalité la décision contestée et à entrainer ainsi son annulation totale ;
15. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est, en l'état de l'instruction, fondé et de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté attaqué ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Puget-Théniers n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement contesté le tribunal administratif de Nice a annulé la délibération de son conseil municipal du 27 novembre 2007 approuvant le plan local d'urbanisme ;
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que les intimés, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, versent quelque somme que ce soit à la commune de Puget-Théniers au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a en outre pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune au titre de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par la commune de Puget-Théniers est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'association FARE sud, M. et Mme E...et la SCI le Gralet au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Puget-Théniers, à Mme F... E..., à M. C... E..., à la SCI le Gralet et à l'association FARE sud.
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N° 13MA00061