Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin 1993 et 20 octobre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Damien F... demeurant ... ; M. Gérard X... demeurant ... ; M. Francis Y... demeurant ... ; M. François Z... demeurant ... aux Ulis (91940) ; M. Jean-Pierre A... demeurant ... ; M. Bernard B... demeurant ... ; M. Yves C... demeurant ... ; M. Alain D... demeurant ... ; M. Michel E... demeurant ... ; M. Maurice G... demeurant ... ; M. Claude H... demeurant ... ; M. Henri I... demeurant ... ; M. Joël J... demeurant ... ; M. Michel K... demeurant ... ; M. JeanMarc L... demeurant ... 13, à Egly (91520) ; ils demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 janvier 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite du président du Sénat rejetant leur recours dirigé contre la décision du 18 octobre 1988 du directeur des services du personnel du Sénat leur refusant la prise en compte du temps passé sous les drapeaux en qualité d'engagés volontaires pour la détermination de leur ancienneté au moment de leur titularisation dans l'emploi de surveillant du jardin du Luxembourg ;
2°) de condamner le Sénat à verser à chacun d'eux la somme de 1 000 F au titredes dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 modifiée notamment par la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le règlement intérieur sur l'organisation des services portant statut du personnel du Sénat ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Balmary, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. F... et autres, et de Me Hennuyer, avocat du président du Sénat,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dans sa rédaction issue de la loi du 23 février 1963 : "Les agents titulaires des services des assemblées parlementaires sont des fonctionnaires de l'Etat dont le statut et le régime de retraite sont déterminés par le bureau de l'assemblée intéressée, après avis des organisations syndicales représentatives du personnel" ; que l'article 50 du règlement intérieur du Sénat portant statut du personnel dispose que : "Les dispositions législatives et réglementaires accordant certains avantages aux fonctionnaires de l'Etat à raison de leurs services militaires et assimilés sont applicables au personnel du Sénat" ;
Considérant qu'il résulte des articles 96 et 97 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires, que le temps passé sous les drapeaux par un engagé accédant à un emploi de fonctionnaire de l'Etat est pris en compte, dans certaines limites pour le calcul del'ancienneté dans cet emploi ; que, dès lors, et conformément à l'article 50 précité du règlement intérieur du Sénat auquel l'arrêté du 12 octobre 1988 du président de cette assemblée n'a pu légalement apporter des restrictions, les agents titulaires du Sénat peuvent prétendre à la prise en compte dans leur ancienneté des services qu'ils ont accomplis en qualité d'engagé dans les mêmes conditions que les autres fonctionnaires de l'Etat ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. F... et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions du 18 octobre 1988 du directeur des services du personnel du Sénat leur refusant la prise en compte dans leur ancienneté de services accomplis en qualité d'engagé et du rejet implicite par le président du Sénat de leur recours gracieux ;
Sur l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner le Sénat à payer aux requérants les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 11 janvier 1993 du tribunal administratif de Paris ainsi que les décisions du 18 octobre 1988 du directeur des services du personnel du Sénat et le rejet implicite par le président du Sénat des demandes tendant au retrait de ces décisions sont annulés.
Article 2 : Le Sénat est condamné à verser à chacun des requérants la somme de 1 000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à MM. Damien F..., Gérard X..., Francis Y..., François Z..., Jean-Pierre A..., Bernard B..., Yves C..., Alain D..., Michel E..., Maurice G..., Claude H..., Henri I..., Joël J..., Michel K..., Jean-Marc L..., au président du Sénat et au ministre de l'intérieur.