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27/04/2015 | FRANCE | N°370619

France | France, Conseil d'État, 1ère ssjs, 27 avril 2015, 370619


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", M. D...C...et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 24 mai 2011 et 4 mai 2012 par lesquels le maire de Tignes a accordé un permis de construire et un permis de construire modificatif à la société Club Méditerranée en vue d'étendre son établissement hôtelier situé au Val Claret. Par un jugement n°s 1103877, 1106450, 1203333 du 16 octobre 2012, le tribunal administratif d

e Grenoble a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 12LY03004 du 28 mai 2013, l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", M. D...C...et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 24 mai 2011 et 4 mai 2012 par lesquels le maire de Tignes a accordé un permis de construire et un permis de construire modificatif à la société Club Méditerranée en vue d'étendre son établissement hôtelier situé au Val Claret. Par un jugement n°s 1103877, 1106450, 1203333 du 16 octobre 2012, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 12LY03004 du 28 mai 2013, la cour administrative d'appel de Lyon, à la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", de M. C... et de MmeA..., a partiellement annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble et annulé les arrêtés des 24 mai 2011 et 4 mai 2012 en tant qu'ils autorisent l'édification d'un nouveau bâtiment.

Procédure devant le Conseil d'Etat

1° Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés sous le n° 370619 les 29 juillet et 30 octobre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Tignes demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 28 mai 2013 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", de M. C...et de MmeA... ;

3°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", de M. C...et de Mme A...la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés sous le n° 370640 les 29 juillet 2013, 25 octobre 2013 et 6 juin 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Club Méditerranée demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 28 mai 2013 en ce qu'il a partiellement annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble et les arrêtés du maire de Tignes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter dans cette mesure l'appel du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", de M. C...et de MmeA... ;

3°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", de M. C...et de Mme A...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laurence Helmlinger, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la commune de Tignes, à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. C... et de MmeA..., et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Club Méditerranée.

Vu les notes en délibéré, enregistrées les 26 et 27 mars 2015, présentées pour la commune de Tignes et pour la société Club Méditerranée.

Considérant ce qui suit :

1. Les pourvois de la commune de Tignes et de la société Club Méditerranée doivent être regardés comme tendant à l'annulation du même arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en tant qu'il a partiellement annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 octobre 2012 et les arrêtés des 24 mai 2011 et 4 mai 2012 du maire de Tignes, en ce qu'ils autorisent l'édification d'un nouveau bâtiment. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Le règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Tignes, approuvé par arrêté du préfet de la Savoie du 6 février 2006, indique, dans sa partie 3.1 " Introduction ", qu'il comprend, en partie 3.3, un lexique de certains termes qu'il emploie couramment, en partie 3.4, une liste des prescriptions, recommandations et remarques s'appliquant à l'ensemble des zones du périmètre réglementé et, en partie 3.5, une collection de fiches contenant les prescriptions et les recommandations spécifiques à chacune des zones géographiques délimitées. La fiche 1.05 de la partie 3.5, applicable au secteur dans lequel la construction litigieuse est située, comporte diverses recommandations pour les mesures de renforcement des façades, tout en indiquant que les prescriptions et recommandations qu'elle contient " s'ajoutent à celles définies au § 3.4 " et en précisant que, pour la " détermination des classes de redans ", il convient de se référer au " cercle R en annexe 1 ".

3. Le paragraphe 3.4.2.3 du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Tignes, intitulé " Façades : mise en oeuvre des prescriptions ", précise que " les prescriptions énoncées portent sur la totalité des façades exposées. Toute façade située à cheval sur plusieurs zones devra prendre en compte les prescriptions propres à la zone la plus contraignante, sur la totalité de sa longueur. (...) La détermination des classes de façades, de la possibilité ou non d'implanter des redans et de l'existence possible de zones abritées, se fera selon les méthodes décrites au 3.3.3 ". Le paragraphe 3.3.3.2 du plan dispose que " l'existence de redans peut permettre de s'affranchir des contraintes imposées aux façades qui les portent. Il importe cependant de ne pas provoquer de surpressions par la constitution de redans en façades directement exposées ". Cet article propose en outre une méthodologie de détermination du " secteur " dans lequel chaque façade se situe, en fonction de son orientation par rapport au sens d'écoulement du phénomène naturel, tel une avalanche. Enfin, cet article fixe la réglementation applicable selon les secteurs ainsi définis : pour les façades situées en secteur RA, les redans ne sont pas autorisés ; pour celles situées en secteur RB, les redans sont autorisés mais seulement s'ils sont orientés à l'inverse du sens d'écoulement du phénomène naturel ; pour celles situées en secteur RC, les redans sont autorisés. En outre, dans les secteurs RB et RC, doivent être appliquées à chaque facette des redans les règles prévues pour le renforcement des façades de même orientation.

4. En premier lieu, il résulte de la combinaison de ces différents éléments du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Tignes, telle qu'elle résulte des prescriptions de la partie 3.1 évoquée ci-dessus, que si la fiche 1.05 ne comporte, par elle-même, que des recommandations sur les mesures de renforcement des façades situées dans la zone à laquelle elle s'applique, tant pour les constructions neuves que pour les bâtiments existants, ces recommandations ne sont pas exclusives des prescriptions générales contenues aux parties 3.3 et 3.4 du même plan, comme la fiche le rappelle d'ailleurs. Ainsi, les constructions de bâtiments neufs demeurent.soumises, dans cette zone, aux prescriptions définies en partie 34 du règlement, et notamment au paragraphe 3.4.2.3 du règlement, qui mentionne la possibilité d'implanter des redans en fonction du secteur auquel appartient la façade, en application de la méthodologie exposée au paragraphe 3.3.3.2. Par suite, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'interdiction des redans sur les constructions neuves en secteur RA présentait le caractère d'une prescription impérative applicable dans la zone relevant de la fiche 1.05, alors même que cette fiche ne fixe, au titre des mesures spécifiques à la zone en matière de renforcement de façades, que des recommandations.

5. En deuxième lieu, en déduisant des caractéristiques et de l'importance du projet de construction litigieux que celui-ci ne pouvait être regardé comme un accroissement du volume du bâtiment existant et donc comme une simple extension au sens du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Tignes mais bien comme une construction nouvelle, la cour n'a ni entaché son arrêt d'erreur de droit, ni dénaturé les pièces du dossier.

6. En dernier lieu, en relevant que la façade sud du bâtiment projeté était quasiment perpendiculaire au sens d'écoulement du phénomène avalancheux auquel le terrain d'assiette était exposé, la cour a bien, alors même que ce point n'était pas en débat devant elle, recherché dans quel secteur cette façade, qui présentait une succession de redans, se situait, en application de la méthodologie exposée au paragraphe 3.3.3.2 du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Tignes, pour en déduire qu'elle se situait en secteur RA où les redans étaient prohibés. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en s'abstenant de procéder à une telle vérification ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Tignes et la société Club Méditerranée ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Tignes et de la société Club Méditerranée une somme de 800 euros à verser, chacune, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", une même somme à verser, chacune, à M. D...C...et une même somme à verser, chacune, à Mme B... A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", de M. D...C...et de Mme B...A..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les pourvois de la commune de Tignes et de la société Club Méditerranée sont rejetés.

Article 2 : La commune de Tignes et la société Club Méditerranée verseront chacune une somme de 800 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", une même somme à M. C...et une même somme à Mme A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Tignes, à la société anonyme Club Méditerranée, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Bollin ", à M. D...C...et à Mme B...A.soumises, dans cette zone, aux prescriptions définies en partie 3

Copie en sera adressée pour information à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.


Synthèse
Formation : 1ère ssjs
Numéro d'arrêt : 370619
Date de la décision : 27/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 2015, n° 370619
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laurence Helmlinger
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:370619.20150427
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