La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2015 | FRANCE | N°13BX03161

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 01 décembre 2015, 13BX03161


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de Mayotte a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la délibération du conseil général de Mayotte n° 1193 du 8 juillet 2013 " relative aux transformations de postes concernant le corps transitoire ".

Par un jugement n° 1300318 du 5 septembre 2013, le tribunal administratif de Mayotte a annulé la délibération du 8 juillet 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 novembre 2013, le département de Mayotte représenté par MeA..., d

emande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Mayotte du 3 septembre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de Mayotte a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la délibération du conseil général de Mayotte n° 1193 du 8 juillet 2013 " relative aux transformations de postes concernant le corps transitoire ".

Par un jugement n° 1300318 du 5 septembre 2013, le tribunal administratif de Mayotte a annulé la délibération du 8 juillet 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 novembre 2013, le département de Mayotte représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Mayotte du 3 septembre 2013 ;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de Mayotte devant le tribunal administratif de Mayotte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2004-1526 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte ;

- le décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégorie C;

- le décret n° 87-1108 du 30 décembre 1987 fixant les différentes échelles de rémunération pour la catégorie C des fonctionnaires territoriaux ;

- le décret n° 2004-1526 du 30 décembre 2004 fixant les conditions d'intégration et de titularisation dans des cadres d'emplois de la fonction publique territoriale de certains agents publics de la collectivité départementale, des communes et des établissements publics administratifs de Mayotte ;

- le décret n° 2004-1527 du 30 décembre 2004 portant statut particulier du cadre d'emplois des agents territoriaux de Mayotte ;

- le décret n° 2004-1529 du 30 décembre 2004 portant statut particulier du cadre d'emplois des ouvriers territoriaux de Mayotte ;

- le décret n° 2009-1164 du 30 septembre 2009 modifiant les dispositions relatives aux statuts particuliers des cadres d'emploi des agents territoriaux de Mayotte et des ouvriers territoriaux de Mayotte et celles relatives à l'intégration dans les cadres d'emplois de la fonction publique de certains agents publics de la collectivité départementale, des communes et des établissements publics de Mayotte ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Valeins,

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 8 juillet 2013 le conseil général de Mayotte a décidé de supprimer 490 postes budgétaires correspondant aux grades d'agent ou d'ouvrier territorial de Mayotte (IB 184 à 204), de créer 490 postes budgétaires correspondant aux grades d'adjoint administratif deuxième classe, d'adjoint technique deuxième classe, d'agent social deuxième classe et d'adjoint du patrimoine deuxième classe (IB 297 à 388) et enfin d'autoriser son président à réviser la carrière de 533 agents dont 490 concernés par ces transformations de poste entraînant une incidence budgétaire de 1 267 445 euros. Cette délibération a été déférée par le préfet de Mayotte au tribunal administratif de Mayotte. Le département de Mayotte relève appel du jugement du 5 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a annulé la délibération du 8 juillet 2013.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le département de Mayotte soutient que le jugement est entaché d'irrégularités dès lors qu'il n'a pas pris en compte son mémoire en défense dont les moyens et les fins de non recevoir n'ont pas été visés, qu'il n'a pas statué sur ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et que l'instruction n'a pas été rouverte.

3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'instruction est normalement close, à défaut d'ordonnance de clôture, trois jours francs avant la date de l'audience. Toutefois, lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d'un mémoire émanant d'une partie, il lui appartient de faire application dans ce cas particulier des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction. A ce titre, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi, au demeurant, que de le viser sans l'analyser. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte -après l'avoir visé, et, cette fois, analysé- il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office au vu du dossier tel qu'il existait à la date de clôture de l'instruction. Dans tous les cas où il est amené à tenir compte de ce mémoire, il doit - à l'exception de l'hypothèse particulière dans laquelle il se fonde sur un moyen qu'il devait relever d'office - le soumettre au débat contradictoire, soit en suspendant l'audience pour permettre à l'autre partie d'en prendre connaissance et de préparer ses observations, soit en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure.

5. Il ressort des pièces du dossier qu'un mémoire en défense du département de Mayotte a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Mayotte, le mercredi 28 août 2013 alors que l'audience était prévue pour le vendredi 30 août. En l'absence de clôture de l'instruction, celle-ci était close, en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, trois jours francs avant l'audience, soit le 26 août à minuit. Le mémoire en défense produit le mercredi 28 août était, par suite, postérieur à la clôture de l'instruction. Toutefois, ce mémoire contenait l'énoncé d'une fin de non recevoir tirée de ce que le préfet de Mayotte demandait l'annulation de la délibération contestée en se fondant sur les dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative. Contrairement à ce qui est allégué par le département de Mayotte, il ressort des termes mêmes du déféré que si le préfet, par une erreur de plume se référait à l'article L. 554-1 du code de justice administrative, il ne demandait pas la suspension de la délibération mais son annulation. Par suite, le tribunal administratif de Mayotte doit être regardé comme ayant examiné ce moyen susceptible d'être relevé d'office et l'avoir écarté comme non fondé, sans que l'absence de réponse motivée à cette fin de non-recevoir puisse lui être reprochée. Par ailleurs, le mémoire du département ayant été produit après la clôture de l'instruction, le tribunal administratif n'était tenu ni de le communiquer et de rouvrir l'instruction au seul motif qu'il s'agissait du premier mémoire en défense, ni de statuer sur ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans ces conditions, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité.

Sur la légalité de la délibération du conseil général de Mayotte du 8 juillet 2013 :

6. Par la délibération attaquée le conseil général de Mayotte a transformé 490 postes budgétaires correspondant à des emplois de fonctionnaires détenteurs des grades d'agent ou d'ouvrier territorial de Mayotte et relevant des dispositions des décrets n°s 2004-1527 et 2004-1529 du 30 décembre 2004 portant statuts particuliers des cadres d'emplois des agents territoriaux et des ouvriers territoriaux de Mayotte modifiés par décret du 30 septembre 2009. Cette transformation a consisté à supprimer ces postes pour les remplacer par des postes correspondant à des emplois de fonctionnaires ayant les grades d'adjoint administratif deuxième classe, d'adjoint technique deuxième classe, d'adjoint social deuxième classe et d'adjoint du patrimoine deuxième classe, relevant des dispositions du décret du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégorie C. La transformation a pour conséquence, notamment, de faire passer ces fonctionnaires de la fourchette d'IB 184 à 250 à celle d'IB 297 à 388 correspondant aux indices de l'échelle 3 des fonctionnaires territoriaux de catégorie C relevant du régime de droit commun, indices prévus par le décret du 30 décembre 1987 fixant les différentes échelles de rémunération pour la catégorie C des fonctionnaires territoriaux.

7. Toutefois, ni les décrets cités ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'autorisait le conseil général à procéder à une telle transformation alors qu'il n'est ni établi ni même soutenu que les fonctionnaires ainsi globalement promus, régis par un statut particulier, auraient rempli les conditions pour bénéficier des dispositions du décret du 30 décembre 1987. Il n'est également ni établi ni même soutenu par le département que les créations de postes en cause auraient été justifiées par les besoins du service.

8. Si le département de Mayotte fait valoir que les dispositions des décrets du 30 décembre 2004 modifiés par le décret du 30 septembre 2009, portant statuts particuliers, dès lors qu'elles sont moins favorables aux fonctionnaires que celles du décret du 30 décembre 1987, auraient été prises en méconnaissance du principe d'égalité de traitement des fonctionnaires, ce moyen est inopérant puisque cette inégalité de traitement des agents titulaires de Mayotte était prévue par les dispositions des II et IV de l'article 64-1de la loi du 11 juillet 2001 selon lesquelles ces agents pouvaient être intégrés soit dans le cadre général des emplois de la fonction publique territoriale, soit dans des cadres d'emplois spécifiques à Mayotte, des décrets devant déterminer les corps ou cadres d'emplois auxquels les agents concernés pouvaient accéder, compte tenu, notamment, des fonctions réellement exercées, du niveau et de la nature des emplois qu'ils occupent, des qualifications qu'ils possèdent au regard des qualifications exigées pour l'accès aux corps et cadres d'emplois concernés.

9. Il résulte de ce qui précède que le département de Mayotte n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a annulé la délibération du 8 juillet 2013.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par le département de Mayotte et non compris dans les dépens

DECIDE

Article 1er : La requête du département de Mayotte est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au département de Mayotte et au préfet de Mayotte.

''

''

''

''

2

N° 13BX03161


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX03161
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-02-02 Fonctionnaires et agents publics. Cadres et emplois. Création, transformation ou suppression de corps, de cadres d'emplois, grades et emplois.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SELAS LLC ET ASSOCIES LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-12-01;13bx03161 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award