AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que par acte sous seing privé du 17 juillet 1991, la Banque populaire du Centre (la banque) a consenti à Mlle Nathalie X... un prêt d'un montant de 150 000 francs ; que M. et Mme Y..., M. X... et la commune de Cahus, propriétaire des locaux commerciaux donnés à bail à Mlle X..., se sont portés cautions solidaires envers la banque du remboursement des sommes dues ; que Mlle X... ayant été placée en liquidation judiciaire le 22 novembre 1994, la banque a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal des époux Y... et de M. X... et le moyen unique du pourvoi provoqué de la commune de Cahus, chacun en leurs deux branches, qui sont identiques, tels qu'énoncés aux mémoires et reproduits en annexe au présent arrêt :
Attendu que sous couvert de griefs non fondés de violation de l'article 1134 du Code civil et d'inversion de la charge de la preuve, les moyens, en leurs deux branches, ne tendent qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui a considéré, d'une part, que les cautions avaient été informées, tant par les mentions de l'acte de prêt que par celles des actes de cautionnement, de la destination réelle du prêt, d'autre part, que la situation de Mlle X... n'était pas lourdement obérée au jour des engagements de caution ; que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que la cour d'appel ayant retenu que le retrait par la banque de ses concours n'était pas à l'origine de la défaillance de la débitrice principale qui avait été assignée en redressement judiciaire avant que la banque ne lui notifie sa décision de retrait, l'arrêt se trouve justifié par ce seul motif ; que le moyen, qui s'attaque à un motif surabondant, est inopérant ;
Sur le troisième moyen du pourvoi principal, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que M. X... n'ayant pas, comme l'exige l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, expressément formulé les prétentions sur lesquelles reposerait l'affirmation que son engagement de caution était manifestement disproportionné à ses ressources et à son patrimoine, la cour d'appel n'était pas tenue de s'expliquer sur un moyen qui ne comportait l'articulation d'aucun fait précis ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que pour rejeter la demande en garantie formée par les époux Y... et M. X... contre la commune de Cahus, la cour d'appel a retenu que le bail liant celle-ci à Mlle X... avait été résilié de plein droit le 24 février 1995 par le jeu des règles de la procédure collective, de sorte qu'en tout état de cause il ne pouvait être reproché à la commune d'avoir remis en location les locaux dont elle avait repris la libre jouissance ; que par ce seul motif l'arrêt est légalement justifié ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la banque, pris en ses deux premières branches, tel qu'énoncé au mémoire et reproduit en annexe :
Attendu que la cour d'appel a constaté que jusqu'en 1995 les informations ont été adressées tardivement aux cautions et qu'ensuite aucune information ne leur a été donnée; qu'ainsi elle a exactement considéré que la déchéance portait sur l'ensemble des intérêts contractuels dus à compter du 31 mars 1992 ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses deux premières branches ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa quatrième branche :
Vu les articles 1208 du Code civil ;
Attendu que pour déclarer la banque déchue de son droit aux intérêts à l'égard de l'ensemble des cautions, l'arrêt retient qu'il convenait de ne pas rompre l'égalité entre les cautions ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'exception tirée de l'inobservation par la banque de l'obligation d'information prescrite par l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier est personnelle à la caution qui l'invoque et ne profite pas aux autres cautions, fussent-elles solidaires, et que ce moyen n'avait été invoqué que par la commune de Cahus, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen unique du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré la banque déchue de son droit aux intérêts à l'égard de M. André Y..., de Mme Marie-Thérèse Y... et de M. Thierry X..., l'arrêt rendu le 16 janvier 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. et Mme Y... et M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la commune de Cahus et de la Banque populaire du Centre ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille quatre.