Vu, enregistrée le 26 février 1997 au secrétariat de la section du Contentieux du Conseil d'Etat, la requête présentée pour M. X..., Mme Y..., M. Z..., M. A..., Mme B..., Mme C..., M. E..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., M. J... et M. K..., domiciliés au cabinet de Me Corinne D..., ... ; M. X... et autres demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes, en tant qu'il délimite, dans son annexe 14, la zone franche urbaine de Grigny-Viry-Châtillon (Essonne) ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les lois n° 95-115 du 4 février 1995 et n° 96-987 du 14 novembre 1996 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Collin, Auditeur,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, tel que modifié par l'article 2 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance de la ville : "Des zones franches urbaines sont créées dans des quartiers de plus de 10 000 habitants particulièrement défavorisés au regard des critères pris en compte pour la détermination des zones de redynamisation urbaine. La liste de ces zones est annexée à la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville. Leur délimitation est opérée par décret en Conseil d'Etat, en tenant compte des éléments de nature à faciliter l'implantation d'entreprises ou le développement d'activités économiques" ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par leurs travaux préparatoires, que lorsqu'il procède à la délimitation des zones franches urbaines, le pouvoir réglementaire peut ne pas faire coïncider exactement leurs limites avec celles des quartiers dont la liste est annexée à la loi, s'il apparaît que la fixation d'un périmètre s'écartant, à la marge, de ces limites est de nature à permettre la réalisation, dans de meilleures conditions, des objectifs énoncés par la loi ; qu'il peut, en particulier, inclure dans une zone franche urbaine des parcelles situées à proximité du quartier mentionné en annexe à la loi, lorsqu'une telle extension tend à faciliter l'implantation d'entreprises ou le développement d'activités économiques ;
Considérant que M. X..., Mme Y..., M. Z..., M. A..., Mme B..., Mme C..., M. E..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., M. J... et M. K... demandent l'annulation du décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 portant délimitation des zones franches urbaines dans certaines communes, en tant qu'il délimite, en son annexe 14, le périmètre de la zone franche urbaine de Grigny-Viry Châtillon (Essonne) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'ont été notamment inclus dans ce périmètre, en plus du quartier de "la Grande Borne" seul mentionné en annexe à la loi du 14 novembre 1996 comme ayant justifié la création d'une zone franche urbaine sur le territoire des communes de Grigny et de Viry-Châtillon, d'une part, des parcelles libres de toute occupation foncière situées, au-delà de l'autoroute A6, entre le quartier de "la Grande Borne" et le quartier dit du "Village", qui constitue le centre historique de la commune de Grigny, d'autre part, un ensemble de parcelles urbanisées de ce dernier quartier qui comprend, en particulier, le côté pair de l'une de ses rues commerçantes ;
Considérant que le décret du 26 décembre 1996 a pu légalement inclure dans le périmètre de la zone franche urbaine de Grigny-Viry-Châtillon des parcelles non urbanisées situées, à l'extérieur du quartier de "la Grande Borne", entre ce quartier et celui du "Village", dès lors que cette extension était de nature à faciliter l'implantation d'entreprises ou le développement d'activités économiques ; qu'il ressort, en revanche, des pièces du dossier, et, en particulier, des documents graphiques soumis au Conseil d'Etat statuant au contentieux, que l'inclusion dans le même périmètre des terrains d'assiette d'une partie seulement des commerces de proximité du quartier du "Village" a pour effet d'induire, au sein de ce quartier homogène, entre des entreprises qui exerçent des activités identiques à l'intérieur d'une même zone de chalandise, selon qu'ils sont situés ou non à l'intérieur de la zone franche urbaine, une discrimination sans rapport avec les objectifs de la loi du 14 novembre 1996, dont les dispositions visent, aux termes de son article premier, "à compenser les handicaps économiques ou sociaux" de certains quartiers ; que, parsuite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur requête, M. X... et autres sont fondés à demander l'annulation de l'annexe 14 au décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996, portant délimitation de la zone franche urbaine de Grigny-Viry-Châtillon ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. X..., Mme Y..., M. Z..., M. A..., Mme B..., Mme C..., M. E..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., M. J... et M. K..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, soient condamnés à payer à l'Etat la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'annexe 14 au décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 portant délimitation de la zone franche urbaine de Grigny-Viry Châtillon, est annulée.
Article 2 : Les conclusions présentées, au nom de l'Etat, par le ministre de l'emploi et de la solidarité, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à Mme Y..., à M. Z..., à M. A..., à Mme B..., à Mme C..., à M. E..., à Mme F..., à Mme G..., à M. H..., à M. I..., à M. J..., à M. K..., à la commune de Grigny, au Premier ministre, au ministre de l'emploi et de la solidarité, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.