Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 mai et 2 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Anne-Marie A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 8 mars 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, ne faisant que partiellement droit à sa requête tendant à l'annulation du jugement du 14 décembre 1999 du tribunal administratif de Nice ayant rejeté ses demandes en annulation des états exécutoires en date du 7 septembre 1995 et du 18 juin 1996 émis à son encontre par la commune de Cuers ainsi que sa demande tendant à ce que la commune lui restitue les sommes en cause, a annulé lesdits états exécutoires tout en rejetant le surplus de ses conclusions ;
2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre à la commune de Cuers de lui restituer la somme de 14031,96 euros, augmentée des intérêts de droit ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Cuers la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Blanc, avocat de Mme Anne-Marie A,
les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que par l'arrêt attaqué la cour administrative d'appel de Marseille a annulé pour des motifs tenant à leur régularité en la forme, deux titres exécutoires émis par la commune de Cuers à l'encontre de la requérante, agent de la commune, pour un montant total de 92043,62 F et rejeté les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de lui restituer la somme de 92043,62 F ; que Mme A se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
Considérant, en premier lieu, que si, dans le recours en cassation qu'elle forme contre cet arrêt, Mme A demande au Conseil d'Etat de dire que ces états exécutoires sont illégaux du fait également qu'ils ont été pris pour l'exécution de décisions contraires aux règles de retrait des décisions individuelles créatrices de droits, ces conclusions, qui ne sont pas dirigées contre le dispositif du jugement mais contre ses motifs, ne sont pas recevables ;
Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;
Considérant que l'annulation par une décision juridictionnelle d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation éventuelle par l'administration, que les sommes perçues par l'administration sur le fondement du titre ainsi dépourvu de base légale soient immédiatement restituées à l'intéressé ; que lorsqu'une juridiction est saisie de conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de restituer des sommes perçues sur le fondement d'un titre de perception ainsi annulé, il lui appartient de prescrire la mesure demandée en fixant le délai au terme duquel l'administration devra restituer ces sommes, si elle n'a pas émis, avant l'expiration de ce délai, un nouveau titre de perception dans des conditions régulières ; qu'ainsi, en rejetant purement et simplement la demande d'injonction de Mme A, la cour administrative d'appel de Marseille a entaché sa décision d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est seulement fondée à demander la cassation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce que soit prescrite une mesure d'exécution ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler dans cette mesure l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'il y a seulement lieu d'enjoindre à la commune de Cuers de restituer à Mme A les sommes perçues sur le fondement des titres de perception annulés, augmentés des intérêts à compter de la date d'encaissement de ces sommes par le Trésor public, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, si la commune n'a pas émis avant l'expiration de ce délai de nouveaux titres dans des conditions régulières ;
Sur les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Cuers la somme de 2 500 euros que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'injonction de Mme A.
Article 2 : Il est enjoint à la commune de Cuers de restituer à Mme A les sommes perçues sur le fondement des titres exécutoires annulés par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille, augmentées des intérêts à compter de la date d'encaissement des sommes par le Trésor public, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, si la commune n'a pas émis avant l'expiration de ce délai de nouveaux titres dans des conditions régulières.
Article 3 : La commune de Cuers versera 2500 euros à Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4: Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Anne-Marie A, à la commune de Cuers et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.