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11/12/2020 | FRANCE | N°438833

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 11 décembre 2020, 438833


Vu la procédure suivante :

Mme C... B... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet de l'Ain du 23 novembre 2018 portant renouvellement de leur assignation à résidence.

Par un jugement n° 1809014, 1809015 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions.

Par un arrêt n° 19LY00152, 19LY00173 du 19 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par le préfet de l'Ain contre ce jugement.

Par un pourvoi, enregistré le 1

9 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieu...

Vu la procédure suivante :

Mme C... B... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet de l'Ain du 23 novembre 2018 portant renouvellement de leur assignation à résidence.

Par un jugement n° 1809014, 1809015 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions.

Par un arrêt n° 19LY00152, 19LY00173 du 19 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par le préfet de l'Ain contre ce jugement.

Par un pourvoi, enregistré le 19 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à l'appel du préfet de l'Ain.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative, l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Mathieu, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Zribi, Texier, avocat de M. et Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme B..., ressortissants albanais, entrés en France en 2012 avec leurs trois enfants, ont fait l'objet de refus de séjour assortis d'obligations de quitter le territoire français par arrêtés, respectivement, des 29 mars et 21 septembre 2018. En vue d'assurer l'exécution de leur éloignement, le préfet de l'Ain, qui les avait assignés à résidence dans ce département pendant quarante-cinq jours par décisions du 28 septembre 2018, a renouvelé les assignations pour la même durée par décisions du 23 novembre 2018. Par un jugement du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a, sur la demande des intéressés, annulé ces décisions de renouvellement. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 décembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel que le préfet de l'Ain avait formé contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) / Les sept derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des (...) 2° à 7° du présent I (...) ". Aux termes de l'article L. 561-1 du même code : " (...) L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie (...) ". Aux termes de l'article R. 561-2 de ce code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application (...) de l'article L. 5612 (...) est autorisé à circuler (...) et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés (...) ".

3. Pour annuler les arrêtés renouvelant les assignations à résidence prises à l'encontre de M. et Mme B..., la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que l'augmentation par les arrêtés de la fréquence de leurs obligations de présentation au commissariat de police d'Oyonnax, portée à cinq par semaine au lieu des trois présentations prévues antérieurement, imposait aux intéressés des restrictions excédant les nécessités liées à la préparation de leur éloignement du territoire et que ce motif relatif aux seules modalités de contrôle de l'assignation entachait d'illégalité les arrêtés dans leur totalité, y compris en ce qu'ils prononçaient l'assignation à résidence. Toutefois, si une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit comporter les modalités de contrôle permettant de s'assurer du respect de cette obligation et notamment préciser le service auquel l'étranger doit se présenter et la fréquence de ces présentations, ces modalités de contrôle sont divisibles de la mesure d'assignation elle-même. La cour a, dès lors, entaché son arrêt d'une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 19 décembre 2019 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur, à Mme C... B... et à M. A... B....


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 438833
Date de la décision : 11/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-04-01 ÉTRANGERS. SÉJOUR DES ÉTRANGERS. RESTRICTIONS APPORTÉES AU SÉJOUR. ASSIGNATION À RÉSIDENCE. - DIVISIBILITÉ DE L'OBLIGATION ET DE SES MODALITÉS DE CONTRÔLE - EXISTENCE.

335-01-04-01 Si une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) doit comporter les modalités de contrôle permettant de s'assurer du respect de cette obligation et notamment préciser le service auquel l'étranger doit se présenter et la fréquence de ces présentations, ces modalités de contrôle sont divisibles de la mesure d'assignation elle-même.,,,Par suite, une illégalité entachant les seules modalités de contrôle n'est pas de nature à justifier l'annulation de la décision d'assignation à résidence dans sa totalité.


Publications
Proposition de citation : CE, 11 déc. 2020, n° 438833
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bertrand Mathieu
Rapporteur public ?: Mme Sophie Roussel
Avocat(s) : SCP ZRIBI, TEXIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:438833.20201211
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