Synthèse
Référence neutre : [1975] 1 R.C.S. 693
Date de la décision :
01/04/1974Sens de l'arrêt :
Le pourvoi doit être accueilli
Analyses
Droits civils - Loi fédérale permettant d’imposer des peines de durée déterminée et indéterminée - Loi s’ap-pliquant seulement aux contrevenants d’un groupe d’âge particulier et d’une région particulière - Le total des peines dépassant la peine maximum prévue par le Code criminel - Le droit de l’accusé à l’égalité devant la loi a-t-il été enfreint? - Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1970, c. P-21, art. 150 - Déclaration canadienne des droits, S.R.C. 1970, App.III, art. 1(b), 2.
Le ministère public a interjeté appel à cette Cour, sur autorisation, à l’encontre d’une partie d’un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, qui, par une majorité, a statué que l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1970, c. P‑21, est inopérant parce qu’il supprime, restreint ou enfreint le droit de l’intimé à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi ou autorise la suppression, la diminution ou la transgression de ce droit énoncé à l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration canadienne des droits, S.R.C. 1970, Appendice III.
L’intimé avait été trouvé coupable, en vertu de l’art. 171 du Code criminel, d’une infraction pour laquelle il était passible d’une amende d’au plus $500 ou d’un emprisonnement de six mois, ou des deux peines à la fois. A la suite d’un rapport pré‑sentence, l’intimé fut condamné à une peine déterminée de trois mois et une peine indéterminée de deux ans moins un jour. Cette sentence fut prononcée conformément à l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, qui, entre autres, prévoit que les tribunaux de la Colombie-Britannique peuvent condamner toute personne âgée, en apparence, de moins de 22 ans, déclarée coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable d’une période d’emprisonnement de trois mois ou plus, à une période d’emprisonnement de trois mois au moins et à une période subséquente indéterminée d’au plus deux années moins un jour.
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Arrêt (les Juges Spence, Laskin et Dickson étant dissidents): Le pourvoi doit être accueilli.
Le Juge en chef Fauteux et les juges Abbot, Martland, Judson, Ritchie et Pigeon: La prétention de l’intimé que l’art. 2 de la Déclaration canadienne des droits (en vertu duquel certains droits et libertés, y compris le droit de l’individu devant la loi et à la protection de la loi, sont à l’abri de transgression par toute loi fédérale) devient opérant à l’égard d’une loi édictée par le Parlement du Canada qui est faite applicable à une zone donnée au Canada, par opposition à l’ensemble du pays, ou qui porte atteinte d’une façon particulière à un groupe défini de personnes au Canada, par opposition à toutes les autres personnes au pays, n’a pas été acceptée.
Il était clair que, en 1960, lors de l’adoption de la Déclaration des droits, le concept de «l’égalité devant la loi» ne comprenait pas et ne pouvait pas comprendre le droit pour tout individu de faire valoir qu’aucune loi qui ne s’appliquait pas à l’ensemble des citoyens et dans toutes les parties du Canada ne pouvait être adoptée. Un droit de cette nature aurait comporté une atteinte grave à la souveraineté du Parlement dans l’exercice de sa compétence législative sous le régime de l’art. 91 de l’Acte de l’amérique du Nord britannique et n’aurait pu être créé que par un amendement à la Constitution, ou par une loi. Le libellé de la Déclaration des droits n’a pas eu pour effet de créer un tel droit puisqu’elle portait déclaration et continuation de droits et libertés existants, de par ses termes exprès (art. 1). Ce sont ces droits et ces libertés qui existaient alors qui ne devaient être violés par aucune loi fédérale. L’art. 2 n’a pas créé de droits nouveaux. Son but a été d’empêcher la transgression de droits existants.
Le but du législateur en édictant l’art. 150 n’était pas d’imposer une peine plus sévère qu’à d’autres aux contrevenants qui se trouvaient en Colombie-Britannique et qui faisaient partie d’un groupe d’âge particulier. La peine indéterminée avait pour fin une tentative de redresser et d’avantager les personnes incluses dans ce groupe d’âge plus jeune. L’article a été fait applicable en Colombie-Britannique parce que cette province était pourvue des institutions et du personnel requis à cette fin. Il n’appartenait pas à cette Cour, sous le régime de la Déclaration des droits, d’empêcher l’application d’un texte législatif fédéral, conçu à cette fin, pour le motif qu’il ne s’appliquait qu’à une catégorie de personnes ou à une région particulière.
Pour qu’il ait gain de cause en la présente affaire, il serait nécessaire, au moins, que l’intimé établisse à la
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satisfaction de la Cour qu’en adoptant l’art. 150 le Parlement ne cherchait pas l’accomplissement d’un objectif fédéral régulier. Cela n’a pas été établi ou on n’a pas tenté de le faire.
Les Juges Spence, Laskin et Dickson dissidents: Une interprétation de l’art. 150 à la lumière de la Déclaration canadienne des droits qui permettrait à un tribunal de Colombie-Britannique d’imposer la peine maximum d’emprisonnement décrétée pour l’infraction sous l’empire du Code criminel et d’imposer en plus une peine indéterminée de jusqu’à deux ans moins un jour a paru manifestement étrangère au but même par lequel on l’a dit animée. Il est beaucoup plus conforme au but proposé, considéré à la lumière de la Déclaration canadienne des droits que l’union d’une peine déterminée et indéterminée soit limitée au total pour la période maximum d’emprisonnement qu’édicte le Code criminel ou une autre loi fédérale qui crée l’infraction et décrète la peine dont celle-ci est punissable. De cette façon, il y a une garantie d’égalité de durée permise de peine, et à l’intérieur de cette limite une marge permettant d’en amoindrir la rigueur pour servir une fin de réhabilitation et de redressement. Selon ce point de vue, le facteur âge sous le régime de l’art. 50 n’équivaut plus à un élément punitif dans cette disposition mais tourne plutôt à l’avantage de l’accusé qui était dans le groupe d’âge visé. Ce point de vue a aussi pour effet de laisser l’art. 150 subsister en tant que disposition opérante, compatible à la fois avec le Code criminel et la Déclaration canadienne des droits.
Par conséquent, le pourvoi devrait être rejeté mais l’arrêt de la Cour d’appel modifié en retranchant le dernier alinéa qui déclare l’art. 150 inopérant et en lui substituant une disposition déclarant que l’art. 150, interprété et appliqué sous le régime de l’art. 1, al. b), et de l’art. 2 de la Déclaration canadienne des droits, n’autorise pas l’imposition d’une peine déterminée et une peine indéterminée qui excèdent au total celle fixée dans le cas présent par le Code criminel.
[Arrêts mentionnés: Turcotte c. La Reine; Anderson c. La Reine, [1970] R.C.S. 843; R. c. Drybones, [1970] R.C.S. 282; Curr c. La Reine, [1972] R.C.S. 889; Re Prata et le Ministre de la Main d’œuvre et de l’immigration (1972), 31 D.L.R. (3d) 465; Reference re Alberta Statutes, [1938] R.C.S. 100; Reference re Exemption of Military Forces, [1943] R.C.S. 483; Procureur général du Canada C. Lavell; Isaac c. Bédard [1974] R.C.S. 1349.]
POURVOI à l’encontre d’une partie d’un arrêt
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de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique,[1] statuant de l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1970, c. P-21 est inopérant. Pourvoi accueilli, les Juges Spence, Laskin et Dickson dissidents.
G.L. Murray, c.r., et W.G. Burke-Robertson, c.r., pour l’appelante.
Donald J. Sorochan, pour l’intimé.
F.W. Callaghan, c.r., et R.M. McLeod, pour l’intervenant, le procureur général de l’Ontario.
Le jugement du Juge en chef Fauteux et des Juges Abbott, Martland et Judson a été rendu par
LE JUGE MARTLAND — Il s’agit d’un appel, interjeté sur autorisation, à l’encontre d’une partie d’un arrêt de la Cour d’appel de Colombie-Britannique, qui, par une majorité de deux contre un, a statué que l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1970, c. P-21, ci-après appelée «la Loi», est inopérant parce qu’il supprime, restreint ou enfreint le droit de l’intimé à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi ou autorise la suppression, la diminution ou la transgression de ce droit énoncé à l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration canadienne des droits, S.R.C. 1970, App. III, ci-après appelée «la Déclaration des droits».
L’intimé avait été trouvé coupable, en vertu de l’art. 171 du Code criminel, S.R.C. 1970, c. C‑34, d’une infraction pour laquelle il était passible d’une amende d’au plus cinq cents dollars ou d’un emprisonnement de six mois, ou des deux peines à la fois. A la suite d’un rapport pré-sentence, l’intimé fut condamné à une peine déterminée de trois mois et à une peine indéterminée de deux ans moins un jour. Cette sentence fut prononcée conformément à l’art. 150 de la Loi. Cet article et l’article suivant se lisent comme suit:
150. Tout tribunal de la province de la Colombie-Britannique devant lequel une personne âgée, en apparence, de moins de vingt-deux ans, est déclarée
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coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable d’une période d’emprisonnement de trois mois ou plus dans la prison commune, peut condamner cette personne à une période d’emprisonnement de trois mois et à une période subséquente indéterminée d’au plus deux années moins un jour
a) dans le cas d’une personne du sexe masculin, en apparence âgée de moins de dix-huit ans, dans la Haney Correctional Institution,
b) dans le cas de toute autre personne du sexe masculin à laquelle s’applique le présent article, dans l’Oakalla Prison Farm ou à New Haven, ou
c) dans le cas d’une personne du sexe féminin à laquelle s’applique le présent article, à un endroit désigné par le lieutenant-gouverneur pour ces personnes du sexe féminin
plutôt que la prison commune du comté ou district judiciaire où l’infraction a été commise ou jugée. Cette personne doit être alors incarcérée en conséquence jusqu’à ce qu’elle soit légalement élargie ou mise en liberté conditionnelle conformément à l’article 151 ou transférée selon la loi, et elle est assujettie aux règlements et règles de l’institution que le lieutenant-gouverneur peut de temps à autre approuver à cet égard.
151. Le lieutenant-gouverneur peut nommer, pour la province de Colombie-Britannique, un bureau de libération conditionnelle ayant pour devoir de s’enquérir, à l’occasion, du cas des prisonniers condamnés à l’incarcération pour des périodes indéterminées. Lorsque le bureau le juge utile, il peut permettre que des prisonniers purgeant de telles sentences soient mis en liberté conditionnelle à des conditions approuvées par le solliciteur général du Canada; et, lorsque les conditions de la liberté conditionnelle ont été respectées par ces prisonniers, le bureau peut recommander à la considération du solliciteur général du Canada l’élargissement définitif de ces prisonniers.
Le pouvoir du tribunal, en vertu de ce qui était alors l’art. 151 de la Loi, d’imposer des peines dont l’ensemble de la période déterminée et de la période indéterminée va au-delà de la période maximum prévue par la loi créant l’infraction, a été confirmé par cette Cour dans Turcotte c La Reine[2]. L’article 151 était substantiellement le même que le présent art. 150. La différence était que l’art. 151 s’appliquait seulement aux personnes de sexe masculin
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«âgées, en apparence, de plus de seize ans et de moins de vingt-trois ans».
La même décision a été rendue à l’égard de l’art. 46 de la Loi dans l’affaire Anderson c. La Reine[3], qui fut entendue et décidée en même temps que l’affaire Turcotte. L’article 46 a été remplacé par le présent art. 44, qui se lit comme suit:
44. Tout tribunal de la province d’Ontario, devant lequel une personne du sexe masculin est déclarée coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable d’une période d’emprisonnement de trois mois, ou plus, dans la prison commune, peut condamner cette personne à une période d’emprisonnement de trois mois au moins et à une période subséquente indéterminée d’au plus deux années moins un jour, à la maison de correction de l’Ontario au lieu de la prison commune du comté ou du district judiciaire où cette infraction a été commise ou jugée.
La seule différence entre les deux articles réside dans ce que l’art. 44 s’applique à «une personne du sexe masculin» tandis que l’art. 46 s’appliquait à l’égard de «une personne».
Le but du texte prévoyant une période indéterminée a été mentionné par le Juge Judson lorsqu’il a exposé les motifs de la majorité dans l’affaire Turcotte à la p. 848:
La sentence indéterminée a été introduite dans l’Ontario en 1916 par l’art. 46 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction. Le Juge d’appel Middleton retrace le but et l’historique de cette disposition dans Rex v. Bond [1937] O.R. 535, 68 C.C.C. 1, [1937] 3 D.L.R. 479. Le but en est de réhabiliter et de former les jeunes adultes délinquants.
L’affaire Turcotte fut entendue par cette Cour siégeant au complet quelque deux mois après qu’elle eut rendu son jugement dans l’affaire La Reine c. Drybones[4]. Il est quelque peu significatif que, même si elle ne fut pas débattue par les avocats, aucun membre de la Cour n’exprima dans les jugements de l’affaire Turcotte l’avis que la Déclaration des droits s’appliquait de quelque façon à l’art. 151 (maintenant l’art.
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150).
Dans le présent appel, l’application de la Déclaration des droits a été soulevée et est la question en litige car on prétend que l’art. 150 enfreint le droit de l’intimé à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi.
Les parties pertinentes de la Déclaration des droits sont les suivantes:
1. Il est par les présentes reconnu et déclaré que les droits de l’homme et les libertés fondamentales ci-après énoncés ont existé et continueront à exister pour tout individu au Canada quels que soient sa race, son origine nationale, sa couleur, sa religion ou son sexe:
a) le droit de l’individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu’à la jouissance de ses biens, et le droit de ne s’en voir privé que par l’application régulière de la loi;
b) le droit de l’individu à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi;
c) la liberté de religion;
d) la liberté de parole;
e) la liberté de réunion et d’association, et
f) la liberté de la presse.
2. Toute loi du Canada, à moins qu’une loi du Parlement du Canada ne déclare expressément qu’elle s’appliquera nonobstant la Déclaration canadienne des droits, doit s’interpréter et s’appliquer de manière à ne pas supprimer, restreindre ou enfreindre l’un quelconque des droits ou des libertés reconnus et déclarés aux présentes, ni à en autoriser la suppression, la diminution ou la transgression, et en particulier, nulle loi du Canada ne doit s’interpréter ni s’appliquer comme
a) autorisant ou prononçant la détention, l’emprisonnement ou l’exil arbitraires de qui que ce soit;
b) infligeant des peines ou traitements cruels et inusités, ou comme en autorisant l’imposition;
c) privant une personne arrêtée ou détenue
(i) du droit d’être promptement informée des motifs de son arrestation ou de sa détention,
(ii) du droit de retenir et constituer un Avocat sans délai, ou
(iii) du recours par voie d’habeas corpus pour qu’il soit jugé de la validité de sa détention et que sa libération soit ordonnée si la détention n’est pas légale;
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d) autorisant une cour, un tribunal, une commission, un office, un conseil ou une autre autorité à contraindre une personne à témoigner si on lui refuse le secours d’un avocat, la protection contre son propre témoignage ou l’exercice de toute garantie d’ordre constitutionnel;
e) privant une personne du droit à une audition impartiale de sa cause, selon les principes de justice fondamentale, pour la définition de ses droits et obligations;
f) privant une personne accusée d’un acte criminel du droit à la présomption d’innoncence jusqu’à ce que la preuve de sa culpabilité ait été établie en conformité de la loi, après une audition impartiale et publique de sa cause par un tribunal indépendant et non préjugé, ou la privant sans juste cause du droit à un cautionnement raisonnable; ou
g) privant une personne du droit à l’assistance d’un interprète dans des procédures où elle est mise en cause ou est partie ou témoin, devant une cour, une commission, un office, un conseil ou autre tribunal, si elle ne comprend pas ou ne parle pas la langue dans laquelle se déroulent ces procédures.
Il faut d’abord remarquer qu’on ne peut prétendre que l’art. 150 de la Loi implique une discrimination suivant la race, l’origine nationale, la couleur, la religion ou le sexe. Ce fait n’a pas, cependant, en lui-même, pour effet de trancher la question en litige, car comme l’a dit le Juge Laskin (alors juge puîné) dans l’arrêt Curr c. La Reine[5] à la p. 896, l’existence d’une des formes de discrimination interdite n’est pas une condition sine qua non de l’application de l’art. 1 de la Déclaration des droits. La question à décider est de savoir si les dispositions de l’art. 150 enfreignent le droit déclaré de l’intimé à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi.
L’intimé prétend qu’à son égard il y a eu violation de ce droit puisque l’art. 150 permet au tribunal de Colombie-Britannique de le condamner à une peine plus sévère que celle qui aurait pu être imposée:
(a) par un tribunal dans les autres provinces du Canada, sauf l’Ontario;
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(b) à une personne non incluse dans la catégorie d’âge définie à l’art. 150, dans toutes les provinces du Canada sauf l’Ontario, y inclus la Colombie-Britannique.
Cette prétention, en substance, est que l’art. 2 de la Déclaration des droits devient opérant à l’égard d’une loi édictée par le Parlement du Canada qui est faite applicable à une zone donnée au Canada, par opposition à l’ensemble du pays, ou qui porte atteinte de façon particulière à un groupe défini de personnes au Canada, par opposition à toutes les autres personnes au pays.
Le Juge Branca, en Cour d’appel, a été d’avis que cet article était discriminatoire envers l’intimé en raison de l’incidence de l’âge et du lieu. Le Juge d’appel Nemetz, se référant à l’affaire Drybones (précitée), a adopté le point de vue selon lequel le résulta de cet article était qu’un groupe d’individus se trouvait à être traité plus durement qu’un autre par la loi.
Le Juge d’appel Maclean, dissident, fit sien le raisonnement adopté par le Juge en chef Jackett dans l’arrêt Re Prata et Le ministre de la Maind’œuvre et de l’Immigration,[6] à la p. 473:
«Il ne m’est jamais venu à l’esprit que le principe de l’égalité devant la loi interdise au Parlement d’adopter, pour des raisons dictées par une saine politique législative, des lois qui s’appliquent à une catégorie de personnes à l’exclusion d’une autre. Il me semble qu’il est de la nature même de la fonction législative de viser à créer des dispositions applicables à des catégories de personnes et dans des circonstances définies de façon à favoriser la réalisation des objectifs nationaux, d’ordre économique, social ou autre, fixés par le Parlement.»
De plus, il déclara:
[TRADUCTION] Il est bien connu que la Colombie-Britannique et l’Ontario ont été les pionniers du système de redressement des jeunes contrevenants qui préconise l’emploi de la peine indéterminée. Le but du système qui comporte l’imposition de peines indéterminées a été mentionné dans l’arrêt La Reine c. Turcotte, [1970] R.C.S. 843, à la p. 845, où on s’est référé à l’arrêt ontarien Rex v. Bond, (1937) 68
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C.C.C. 1. Le Juge d’appel Middleton y avait dit, p. 5 en abordant la question des peines indéterminées:
«Le système des peines indéterminées et de la libération conditionnelle est destiné avant tout aux contrevenants qui en sont à un premier délit, mais il peut y avoir, et il y a probablement, de nombreux cas où le tribunal est convaincu qu’un individu comparaissant pour une deuxième ou troisième infraction peut ne pas être vraiment incorrigible, et il peut dans sa sagesse imposer une peine indéterminée afin de favoriser le redressement si celui-ci est possible.»
Il faut aussi noter que l’imposition d’une peine d’emprisonnement indéterminée n’est pas obligatoire et qu’elle est laissée à la discrétion du juge de première instance.
Il faut noter par surcroît que la Colombie-Britannique et l’Ontario sont pourvus d’institutions et de personnels qualifiés pour le redressement de jeunes contrevenants selon le système des peines d’emprisonnement indéterminées. Il est probable que toutes les provinces du Canada ne sont pas si bien pourvues. De nombreuses autorités pénitentiaires croient que dans le redressement des jeunes contrevenants, on peut souvent obtenir les meilleurs résultats en ajoutant une peine indéterminée à la peine déterminée habituelle prévue par la loi particulière. A mon avis le système dans son ensemble doit être considéré comme visant le redressement des jeunes contrevenants et comme institué à leur avantage, et on ne peut affirmer que, du seul fait qu’une peine indéterminée a été ajoutée à une peine déterminée, le contrevenant en cause a été victime d’une discrimination quelconque.
Je ne suis pas prêt à accepter la prétention de l’intimé quant à la signification de la phrase «égalité devant la loi» dans l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration des droits. L’art. 1 de la Déclaration déclare que des droits de l’homme et des libertés fondamentales, au nombre de six, «ont existé» et qu’ils devraient «continuer à exister». Tous ces droits et libertés existaient et étaient protégés sous le régime de la common law. Le but de la Déclaration n’est pas de définir de nouveaux droits ou de nouvelles libertés. Ce qu’elle fait est de proclamer leur existence dans une loi, et, de plus, par l’art. 2, de les protéger contre la transgression par une loi fédérale, quelle qu’elle soit.
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Deux de ces droits et libertés, soit la «liberté de parole» et la «liberté de la presse» ont déjà été étudiés par le Juge en chef Duff dans l’arrêt Reference re Alberta Statutes (renvoi concernant certaines lois de l’Alberta).[7] Il fut d’avis que le préambule de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, qui énonce que les provinces du Canada, de la Nouvelle‑Écosse et du Nouveau-Brunswick ont exprimé le désir de contracter une union fédérale «avec une constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume‑Uni», envisage un Parlement dont les débats sont assujettis à l’influence de l’opinion et de la discussion publique, et que le Parlement du Canada possède l’autorité de légiférer en vue de la protection de ce droit (p. 133).
Cette question de l’«égalité devant la loi» a été examinée dans l’arrêt Reference re Exemption of Military Forces (renvoi concernant l’exemption des corps militaires étrangers)[8]. Il y fut décidé par cette Cour que le «règne du droit» au Canada primait au point de faire en sorte que les militaires ne peuvent être à l’abri de la compétence des tribunaux ordinaires. Dans l’arrêt, le Juge en chef Duff cite le passage suivant d’un article écrit par M. Goodhart, docteur d’Université:
[TRADUCTION] L’important principe constitutionnel qui était en cause est l’un des principes essentiels à la base de la constitution anglaise. Il est décrit par Dicey comme étant «cette doctrine établie du droit anglais selon laquelle un soldat, bien que membre d’une armée permanente, est en Angleterre assujetti à tous les devoirs et à toutes les obligations du citoyen ordinaire». C’est là un des éléments, et peut-être le plus important, du «règne du droit» qui caractérise le système britannique. «Il devient, aussi, de plus en plus manifeste que si les tribunaux ont maintenu l’observance des règles du droit constitutionnel, c’est en insistant strictement sur deux principes, savoir, premièrement, celui de «l’égalité devant la loi», qui dénie l’exemption des responsabilités qui incombent aux citoyens ordinaires ou l’exclusion de la compétence des tribunaux ordinaires, et, deuxièmement, celui de la «responsabilité personnelle des auteurs de délits», qui exclut la notion selon laquelle une viola-
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tion de la loi par un subordonné peut être justifiée par l’obéissance aux ordres de supérieurs.
La signification de cette expression a été étudiée récemment dans les arrêts Le Procureur Général du Canada c. Lavell et Isaac c. Bédard[9]. Dans ces arrêts, le Juge Ritchie déclare, à la p. 1365:
Selon moi, le sens à donner au libellé de la Déclaration des droits est celui qu’il avait au Canada à l’époque de l’adoption de la Déclaration, et il s’ensuit que l’expression «égalité devant la loi» doit s’interpréter à la lumière de la loi en vigueur au Canada à ce moment-là.
Lorsqu’on considère le sens qu’il faut attacher aux mots «égalité devant la loi» figurant à l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration, je crois important de signaler qu’à mon sens ces termes ne sont pas efficaces pour invoquer le concept égalitaire illustré par le 14 ième Amendement de la constitution des États-Unis tel qu’interprété par les tribunaux de ce pays-là. (Voir Smythe c. La Reine, [1971] R.C.S. 680, Juge en chef Fauteux, pp. 683 et 686). Je crois plutôt que, compte tenu des termes employés dans le second alinéa du préambule de la Déclaration des droits, l’expression «égalité devant la loi» se trouvant à l’art. 1 doit se lire dans son contexte, comme une partie du «règne du droit» auquel les termes de cet alinéa accordent une autorité prépondérante.
A cet égard, je me réfère à Stephen’s Commentaries on the Laws of England, 21e éd. 1950, où il est dit dans le vol. III à la p. 337:
[TRADUCTION] Ainsi le grand spécialiste en droit constitutionnel, Dicey, qui écrivait en 1885, était si profondément impressionné par l’absence de gouvernements arbitraires, tant à l’époque que dans le passé, qu’il a créé l’expression «the rule of law» (le règne du droit) pour parler du régime sous lequel vivait l’Anglais; et il a tenté de la préciser dans les termes suivants, qui ont exercé une profonde influence sur toute la pensée et la conduite subséquente.
«Que le «règne du droit» qui constitue un principe fondamental de la constitution a trois sens, ou peut-être envisagé sous trois points de vue différents….»
Le second sens proposé par Dicey est celui qui nous occupe ici et il l’a couché dans les termes suivants:
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[TRADUCTION] Un autre sens est celui d’égalité devant la loi ou d’assujettissement égal de toutes les classes au droit commun du pays appliqué par les tribunaux ordinaires; le «règne du droit», dans ce sens, exclut l’idée d’une exemption de fonctionnaires ou d’autres personnes du devoir l’obéissance à la loi auquel sont assujettis les autres citoyens, ou de la compétence des tribunaux ordinaires.
«L’égalité devant la loi», dans ce sens, est souvent invoquée pour démontrer que la même loi s’applique aussi bien aux plus hauts fonctionnaires du gouvernement qu’à tout autre citoyen ordinaire, et à cet égard le Professeur F.R. Scott, dans les cours donnés dans le cadre des Plaunt Memorial Lectures sur les libertés civiles et le fédéralisme canadien, en 1959, eut l’occasion de dire en parlant de l’affaire Roncarelli c. Duplessis, [1959] R.C.S. 121:
[TRADUCTION] C’est toujours un triomphe pour la loi de montrer qu’elle est appliquée à tous également, sans crainte ni favoritisme. C’est ce que nous entendons quand nous disons que tous sont égaux devant la loi.
Il est très clair qu’en 1960, lors de l’adoption de la Déclaration des droits, le concept de «l’égalité devant la loi» ne comprenait pas et ne pouvait pas comprendre le droit pour tout individu de faire valoir qu’aucune loi qui ne s’appliquait pas à l’ensemble des citoyens et dans toutes les parties du Canada ne pouvait être adoptée. Un droit de cette nature aurait comporté une atteinte grave à la souveraineté du Parlement dans l’exercice de sa compétence législative sous le régime de l’art. 91 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique et n’aurait pu être créé que par un amendement à la constitution, ou par une loi. A mon avis le libellé de la Déclaration des droits n’a pas pour effet de créer un tel droit puisque, comme déjà mentionné, elle porte déclaration et continuation de droits et libertés existants, de par ses termes exprès. Ce sont ces droits et ces libertés qui existaient alors qui ne doivent être violés par aucune loi fédérale. L’article 2 ne crée pas de droits nouveaux. Sont but est d’empêcher la transgression de droits existants. Il précise effectivement, dans les alinéas a) à g), certains droits faisant partie de ceux qui sont déclarés dans l’art. 1, mais le droit invoqué par l’intimé n’est compris dans aucun de ces sept alinéas.
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Les jugements de la majorité de la Cour d’appel en l’espèce présente s’appuient en substance sur la décision de cette Cour dans l’affaire Drybones (précitée). Le Juge d’appel Branca s’est appuyé aussi sur le jugement de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Le Procureur Général du Canada c. Lavell et celui du Juge Osier dans l’affaire Isaac c. Bédard, deux jugements qui ont par la suite été infirmés par cette Cour.
L’affaire Drybones est la seule à ce jour dans laquelle cette Cour a déclaré un article d’une loi fédérale inopérant parce qu’il enfreignait la Déclaration des droits. Les circonstances de cette cause étaient particulières. L’intimé, Drybones, qui était un Indien, avait été déclaré coupable, dans les territoires du Nord-Ouest, d’avoir été ivre hors d’une réserve, en contravention de l’al. b) de l’art. 94 de la Loi sur les Indiens, S.R.C. 1952, c. 149. Il n’y avait pas de réserve dans les territoires du Nord-Ouest. L’alinéa b) de l’art. 94 s’appliquait seulement aux Indiens. L’article rendait l’intimé coupable d’une infraction en raison d’une façon d’agir qui n’aurait donné lieu à aucune sanction pour toute autre personne qu’un Indien.
L’opinion de la majorité dans cette affaire a été que cet article créait délibérément une infraction spécifique, punissable en justice, qui ne pouvait être commise que par des Indiens et que, par conséquent, une inégalité devant la loi, basée sur des motifs raciaux, avait été créée. La portée de ce jugement a été énoncée par le Juge Ritchie, exposant les motifs de la majorité, à la p. 298, de la façon suivante:
Je crois utile d’affirmer clairement que ces motifs s’appliquent seulement à un cas où, en vertu des lois du Canada, est réputé infraction punissable en droit, pour une personne, à cause de sa race, un acte que ses concitoyens canadiens qui ne sont pas de cette race peuvent poser sans encourir aucune sanction. A mon avis, cela est bien loin d’être applicable à toutes les dispositions de la Loi sur les Indiens.
Dans ses motifs dans l’affaire Lavell, le Juge Ritchie dit, à la p. 1372:
Cependant, la distinction fondamentale entre la présente affaire et l’affaire Drybones me paraît être que
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l’article incriminé dans cette dernière affaire ne pouvait recevoir d’application sans que soit déniée à un groupe racial l’égalité de traitement dans l’administration et l’application de la loi devant les tribunaux ordinaires du pays…
Le but du législateur en édictant l’art. 150 n’était pas d’imposer une peine plus sévère qu’à d’autres aux contrevenants qui se trouvaient en Colombie-Britannique et qui faisaient partie d’un groupe d’âge particulier. La peine indéterminée a pour fin une tentative de redresser et d’avantager les personnes incluses dans ce groupe d’âge plus jeune. L’article a été fait applicable en Colombie-Britannique parce que cette province était pourvue des institutions et du personnel requis à cette fin.
A mon avis, il n’appartient pas à cette Cour, sous le régime de la Déclaration des droits, d’empêcher l’application d’un texte législatif fédéral, conçu à cette fin, pour le motif qu’il ne s’applique qu’à une catégorie de personnes, ou à une région particulière.
Les termes employés par le Juge Laskin dans un contexte un peu différent, dans l’arrêt Curr c. La Reine (précité) à la p. 899, peuvent avoir application ici. Il examinait l’étendue du pouvoir que cette Cour pouvait avoir, sous le régime de l’al. a) de l’art. 1 de la Déclaration des droits, la disposition relative à «l’application régulière de la loi», de contrôler les dispositions de fond de la législation fédérale. Il a dit, en supposant que ce pouvoir pouvait exister,
…il faudrait avancer des raisons convaincantes pour que la Cour soit fondée à exercer en l’espèce une compétence conférée par la loi (par opposition à une compétence conférée par la constitution) pour enlever tout effet à une disposition de fond dûment adoptée par un Parlement compétent à cet égard en vertu de la constitution et exerçant ses pouvoirs conformément aux principes du gouvernement responsable, lequel constitue le fondement de l’exercice du pouvoir législatif en vertu de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique.
A mon avis, pour qu’il ait gain de cause en la présente affaire, il serait nécessaire, au moins, que l’intimé établisse à la satisfaction de la Cour qu’en adoptant l’art. 150 le Parlement ne cher-
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chait pas l’accomplissement d’un objectif fédéral régulier. Cela n’a pas été établi et on n’a pas tenté de le faire.
En conséquence, à mon avis, l’art. 150 de la Loi n’enfreint pas le droit de l’intimé à l’égalité devant la loi sous le régime de l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration des droits. J’accueillerais l’appel et j’infirmerais cette partie de l’arrêt de la Cour d’appel qui déclare l’art. 150 de la Loi inopérant.
LE JUGE RITCHIE — J’accueillerais ce pourvoi pour les motifs énoncés par mon collègue le Juge Martland.
Tel que mentionné dans les motifs qu’il a rédigés, et dans l’arrêt Turcotte c. La Reine[10] le but de l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1970, c. P-21, est de redresser et former les jeunes contrevenants et il m’apparaîtrait contraire à l’intention de la Déclaration des droits que les dispositions de l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration qui garantissent à toute personne le droit à l’égalité devant la loi, soient interprétées de façon à neutraliser le but même de la loi contestée pour le motif que celle-ci s’applique seulement aux contrevenants qui sont jeunes et qui sont condamnés dans un ressort où des institutions ont été établies en vue de la réalisation de son objet.
Contrairement au texte qui était en cause dans l’affaire, La Reine c. Drybones[11], l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction ne prévoit pas qu’un groupe d’individus doit être traité de façon plus sévère qu’un autre par la loi; il est, au contraire, à mon avis, conçu à l’avantage des individus auxquels il s’applique pour qu’ils aient la chance de jouer dans la société un rôle utile et profitable et d’éviter le risque de devenir des criminels endurcis.
LE JUGE PIGEON — Je suis d’accord avec M. Le Juge Martland sous réserve des vues que j’ai
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exprimées dans Procureur Général du Canada c. Lavell et Isaac c. Bédard[12], dans la mesure où elles diffèrent des siennes.
Le jugement des Juges Spence, Laskin et Dickson a été rendu par
LE JUGE LASKIN (dissident) — La question soulevée dans ce pourvoi de la Couronne, interjeté sur l’autorisation de cette Cour, est double. Elle est d’abord de savoir si l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1970 c. P-21, est inopérant à la lecture de l’alinéa b) du par. 1 de la Déclaration canadienne des droits, 1960 (Can.), c. 44; et, en deuxième lieu, de savoir si l’art. 150 peut être interprété d’une façon qui le rendrait compatible avec l’alinéa b) de l’art. 1 mentionné ci-dessus, et qui éliminerait ainsi la nécessité d’aborder la question du caractère inopérant. Ce pourvoi a ceci de particulier que, bien que les avocats de l’appelante et de l’intimé aient lié contestation sur le premier aspect de cette affaire, ils ne font qu’un, chacun à partir d’un argument subsidiaire qui lui est propre, lorsqu’il s’agit de soutenir une interprétation compatible. Un court exposé des faits et un renvoi au jugement de cette Cour dans Turcotte c. La Reine[13], illustreront sans difficulté comment il se fait qu’il en soit ainsi.
L’origine du pourquoi remonte à une plainte portée contre l’intimé, alors âgé de 17 ans, pour une infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité dont la peine maximum prévue par le Code criminel est de six mois d’emprisonnement. Bien qu’acquitté en première instance, l’accusé a été condamné à la suite d’un appel et d’un procès de novo devant un juge d’une cour de comté. A la suite d’un rapport «pré-sentence», l’accusé fut condamné, en vertu de l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, à une peine déterminée de trois mois d’emprisonnement et à une peine indéterminée de deux ans moins un jour. Cet article de la loi se lit comme suit:
Tout tribunal de la province de la Colombie-Britannique devant lequel une personne âgée, en apparence,
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de moins de vingt-deux ans, est déclarée coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable d’une période d’emprisonnement de trois mois ou plus dans la prison commune, peut condamner cette personne à une période, d’emprisonnement de trois mois au moins et à une période subséquente indéterminée d’au plus deux années moins un jour
a) dans le cas d’une personne du sexe masculin, en apparence âgée de moins de dix-huit ans, dans la Haney Correctional Institution,
b) dans le cas de toute autre personne du sexe masculin à laquelle s’applique le présent article dans l’Oakalla Prison Farm ou à New Haven, ou
c) dans le cas d’une personne du sexe féminin à laquelle s’applique le présent article, à un endroit désigné par le lieutenant-gouverneur pour ces personnes du sexe féminin
plutôt que la prison commune du comté ou district judidicaire ou l’infraction a été commise ou jugée. Cette personne doit être alors incarcérée en conséquence jusqu’à ce qu’elle soit légalement élargie ou mise en liberté conditionnelle conformément à l’article 151 ou transférée selon la loi, et elle est assujettie aux règlements et règles de l’institution que le lieutenant-gouverneur peut de temps à autre approuver à cet égard.
Sur appel interjeté par l’accusé devant la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, cette Cour-là, à la majorité (les Juges Branca et Nemetz), avec dissidence du Juge Maclean, décidé que l’art. 150 allait à l’encontre le l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration canadienne des droits («le droit de l’individu à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi») et était par conséquent inopérant. A la suite d’une audition subséquente devant la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, la peine imposée fut modifiée en retranchant la partie indéterminée. La Couronne n’a pas interjeté appel de cette modification, qui n’a par conséquent fait l’objet d’aucun débat devant cette Cour.
L’art. 150, partie d’une loi fédérale, est particulier à la Colombie-Britannique, mais une disposition semblable, s’appliquant seulement à l’Ontario, se trouve à l’art. 44 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction. Ce dernier article se lit comme suit:
Tout tribunal de la province d’Ontario, devant lequel une personne du sexe masculin est déclarée
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coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable d’une période d’emprisonnement de trois mois ou plus, dans la prison commune, peut condamner cette personne à une période d’emprisonnement de trois mois au moins et à une période subséquente indéterminée d’au plus deux années moins un jour, à la maison de correction de l’Ontario au lieu de la prison commune du comté ou du district judiciaire où cette infraction a été commise ou jugée.
Actuellement, la différence entre les deux articles, en plus de la limitation territoriale de chacun, est que la disposition relative à la Colombie-Britannique s’applique à «une personne âgée, en apparence, de moins de vingt-deux ans» (antérieurement elle s’appliquait à «une personne du sexe masculin âgée, en apparence, de plus de seize ans et de moins de vingt‑trois ans») et que celle relative à l’Ontario s’applique à «une personne du sexe masculin» (antérieurement elle s’appliquait à «une personne»). C’est parce que la Déclaration canadienne des droits pourrait avoir une incidence aussi grande, si tant est qu’elle en a, sur l’art. 44 que sur l’art. 150 que le procureur général de l’Ontario a demandé et obtenu la permission d’intervenir dans le pourvoi devant cette Cour. Je puis faire remarquer ici que, bien que le procureur général du Canada soit intervenu dans la cause devant la Cour d’appel de la Colombie-Britannique et ait soutenu la validité de l’art. 150, il ne s’est pas fait représenter devant cette Cour.
En statuant que l’art. 150 était inopérant à cause de l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration canadienne des droits, la majorité de la Cour d’appel de Colombie‑Britannique s’est principalement appuyée sur le jugement de cette Cour dans La Reine c. Drybones.[14] Le Juge d’appel Branca a considéré que l’art. 150 niait à un accusé, comme l’intimé en l’espèce, l’égalité devant la loi, [TRADUCTION] «suivant son âge et l’endroit au Canada où il commet l’infraction». L’incidence de l’âge et du lieu en vertu de l’art. 150 a pour effet, selon le Juge d’appel Branca, que des individus en apparence âgés de moins de vingt-deux ans sont traités beaucoup plus
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sévèrement en Colombie-Britannique que les autres personnes de sexe masculin ou féminin qui commettent la même infraction et subissent leur procès dans les autres parties du Canada, sauf l’Ontario. Le Juge d’appel Nemetz s’est limité à conclure que l’art. 150 allait à l’encontre de l’al. b) de l’art. 1 de la Déclaration canadienne des droits parce que la peine imposée en Colombie-Britannique, étant pour une période plus longue que celle prévue par le Code Criminel (s’appliquant uniformément dans tout le Canada), n’aurait pu être imposée dans aucune autre province, sauf l’Ontario.
L’opinion exprimée par le Juge d’appel Nemetz a trait à l’interprétation donnée à l’art. 150, tel qu’alors libellé, par une majorité de cette Cour dans l’affaire Turcotte; et la même majorité a donné la même interprétation à l’art. 44, tel qu’alors libellé, dans une affaire connexe, Anderson c. La Reine, entendue et rapportée conjointement avec l’affaire de Turcotte: voir [1970] R.C.S. 843, à la p. 849. La décision de la majorité dans ces deux affaires a été que les articles 150 et 44 (qui étaient alors numérotés, respectivement, 151 — tel que réadopté par l’art. 2 du c. 7 des S.C. 1952-53 — et 46, dans la Loi sur les prisons et les maisons de correction, S.R.C. 1952, c. 217) autorisaient l’imposition, aux personnes touchées par ces dispositions dans les deux provinces, d’une peine déterminée et d’une peine indéterminée la durée totale desquelles pouvait excéder la peine maximum prévue pour une infraction particulière par la loi qui créait l’infraction et prescrivait la peine. L’opinion des juges dissidents a été que la peine déterminée et la peine indéterminée ne devaient en aucun cas dépasser, au total, la peine maximum d’emprisonnement spécifiée dans la loi créant l’infraction particulière.
C’est un fait évident que les décisions rendues dans les affaires Turcotte et Anderson ont été rendues sans prendre en considération la portée de la Déclaration canadienne des droits, car celle-ci n’avait pas été soulevée ou débattue comme ayant une portée quelconque sur la juste interprétation et application des actuels articles 150 et 44 de la Loi sur les prisons et les maisons
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de correction. Lorsque l’affaire Turcotte fut jugée, l’art. 151 d’alors prévoyait, entre autres choses, que «tout tribunal de la province de la Colombie-Britannique devant lequel une personne du sexe masculin âgée, en apparence, de plus de seize ans et de moins de vingt-trois ans est déclarée coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable par incarcération dans la prison commune durant une période de trois mois, ou pour une plus longue période, peut condamner cette personne à l’emprisonnement durant une période d’au moins trois mois et ensuite durant une période indéterminée d’au plus deux ans moins un jour à New-Haven, plutôt qu’à la prison commune…». Lorsque l’affaire Anderson fut jugée l’art. 46 d’alors prévoyait que «tout tribunal de la province d’Ontario, devant lequel une personne est déclarée coupable d’une infraction aux lois du Canada, punissable d’une période d’emprisonnement de trois mois, ou plus, dans la prison commune, peut condamner cette personne à une période d’emprisonnement de trois mois au moins et à une période subséquente indéterminée d’au plus deux années moins un jour, à la maison de correction de l’Ontario…». Il s’avère donc que les dispositions pertinentes de la Loi sur les prisons et les maisons de correction qui étaient en vigueur à l’époque de l’instruction des inculpations portées dans les affaires Turcotte et Anderson ont été modifiées à la fois pour la Colombie-Britannique et pour l’Ontario; dans le cas de la Colombie-Britannique, en retranchant la précision «du sexe masculin» et en modifiant l’ancien groupe d’âge de façon à viser maintenant les personnes en apparence âgées de moins de vingt-deux ans; et dans le cas de l’Ontario, en ajoutant la précision «du sexe masculin»: voir 1968-69 (Can.) c. 38, art. 115 et 112.
Quel que puisse en être le résultat, le fait d’invoquer et de considérer la Déclaration canadienne des droits relativement à une loi fédérale apporte de façon indéniable une dimension nouvelle à l’inteprétation. L’acte d’interprétation doit tenir compte de prescriptions et de normes prévues à la Déclaration canadienne des droits qui, indépendamment de cette loi-là, pourraient
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être ou pourraient ne pas être vues comme pertinentes, et, même vues comme pertinentes, ne pourraient avoir la définition qu’elles possèdent en tant que directives statutaires. On ne peut, par conséquent, dire que la majorité dans les affaires Turcotte et Anderson serait arrivée inévitablement aux mêmes conclusions si la Déclaration canadienne des droits avait été mise dans la balance; et il en va de même pour la minorité dans ces mêmes affaires, parce que la Déclaration aurait pu tout aussi bien paraître à la minorité une simple confirmation de sa conclusion qu’amener celle-ci à statuer comme l’ont fait les Juges d’appel Branca et Nemetz en la présente espèce.
Il est important de voir que la Déclaration canadienne des droits ne requiert pas toujours qu’un texte législatif fédéral touché par ses dispositions soit déclaré inopérant. Il peut arriver qu’il doive l’être, suivant le principe énoncé dans l’arrêt Drybones, précité, si on ne peut l’interpréter ou l’appliquer d’une façon qui soit compatible avec la Déclaration canadienne des droits. Cependant, ce que la Déclaration commande avant tout de faire, c’est de décider si la mesure contestée peut recevoir une interprétation compatible lui permettant de demeurer un texte législatif portant effet. Si l’acte d’interprétation fait à la lumière de la Déclaration entraîne ce résultat, il n’est pas nécessaire, et ce serait même un abus de pouvoir judiciaire, de rendre inefficace la mesure fédérale.
A la lumière de ces considérations, j’aborde le point qui avait été laissé en suspens dans l’arrêt Turcotte, à savoir, l’effet de la Déclaration canadienne des droits sur l’interprétation et l’application de l’art. 150. L’avocat du procureur général de l’Ontario a demandé à cette Cour d’étudier séparément et de façon définitive l’effet de la Déclaration sur l’art. 44. A mon avis, il ne serait pas judicieux d’agir de la sorte en l’absence de plaidoiries d’avocats contestant la position du procureur général de l’Ontario. Dans la mesure où les articles 150 et 44 sont similaires, ce qui est dit ici au sujet de l’art. 150 s’applique avec la même force à l’art. 44, mais
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on aurait tort d’appliquer à l’art. 44 les conclusions concernant l’art. 150 sans égard aux différences de leurs formulations respectives.
Comme question de compétence législative seulement, on ne peut mettre en doute le droit qu’a le Parlement de donner des applications spéciales à ses lois criminelles ou autres, que ce soit en termes d’application locale ou autrement. Ceci a été reconnu depuis les débuts de l’existence de cette Cour: voir, par exemple, Fredericton c. La Reine[15]. Avec la Déclaration canadienne des droits, le Parlement a introduit certaines contraintes qui, suivant leur portée, limitent la mesure dans laquelle une loi valide peut être assortie d’une portée restreinte ou avoir une application spéciale. Ces contraintes, lorsqu’elles s’appliquent, sont, bien entendu, aussi susceptibles d’être retirées par le Parlement qu’elles étaient susceptibles d’être introduites, mais pour paraphraser ce que le Juge Abbott dit dans ses motifs dans l’arrêt Procureur Général du Canada c. Lavell, Isaac et al. c. Bédard, rendu le 27 août 1973 et non encore publié dans les Recueils,[16] dans son choix des politiques, le Parlement, lorsqu’il a agi dans les limites de sa compétence législative, était seul maître, même si les tribunaux se voyaient confier des responsabilités d’interprétation et d’application qu’ils n’avaient pas auparavant.
En l’espèce présente, le grief de l’accusé, l’intimé en cette Cour, est que l’effet de l’art. 150 de la Loi sur les prisons et les maisons de correction tel qu’appliqué à son endroit par le juge de première instance a entraîné une interprétation et une application d’une loi du Canada qui lui ont dénié en tant qu’individu «le droit… à l’égalité devant la loi et à la protection de la loi», contrairement à l’al. b) de l’art. 1 et à l’art. 2 de la Déclaration canadienne des droits. L’alinéa b) de l’art. 1 parle du «droit de l’individu»; et, énoncée simplement, la question est de savoir s’il y a eu suppression, diminution ou transgression du droit de l’intimé à l’égalité devant la loi lorsqu’on lui a imposé une peine
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additionnelle et par conséquent plus sévère que celle qui lui aurait été imposée ou qui aurait pu l’être si, par exemple, il avait été trouvé coupable de la même infraction en Alberta ou dans une des autres provinces de l’Ouest ou au Québec ou dans une des provinces de l’Atlantique. Il y a aussi la prétention selon laquelle même en Colombie-Britannique son sort aurait été différent s’il n’avait pas été «âgé, en apparence, de moins de vingt-deux ans».
En se penchant sur ces questions, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique devait nécessairement considérer le Code criminel, en vertu duquel le prévenu avait été inculpé et dans lequel était prévue la peine dont il était passible pour l’infraction commise, comme le point de référence pour décider si l’art. 150 allait à l’encontre de la Déclaration canadienne des droits. On l’a reconnu, les dispositions pertinentes du Code criminel sont elles-mêmes inattaquables à cet égard. A mon avis, la majorité de la cour a eu raison de conclure que dans la mesure où l’art. 150 prévoit l’imposition d’une punition plus rigoureuse de l’accusé en Colombie-Britannique qu’ailleurs au Canada (excepté en Ontario), pour la même infraction, il lui dénie en tant qu’individu l’égalité devant la loi.
L’inégalité provient de la privation plus grande à laquelle l’intimé a été exposé en l’espèce en regard de celle à laquelle il aurait été exposé si l’instruction de son délit avait eu lieu ailleurs au Canada, excepté en Ontario. On fait valoir, cependant, que le but de l’art. 150 (comme de l’art. 44) est de prévoir, par la réunion de peines déterminées et indéterminées, des services de réhabilitation et de correction qui peuvent aider les détenus à se réintégrer dans la société plus facilement sinon plus rapidement. Ce que cette proposition implique, c’est une prétention selon laquelle ce but-là, pour les détenus de Colombie-Britannique faisant partie d’un certain groupe d’âge et pour les détenus de sexe masculin en Ontario, établit une classification permise dans le cadre du droit de l’individu à l’égalité devant la loi.
La question que soulève cette proposition est de savoir si le but qu’on allègue requiert néces-
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sairement que l’art. 150 soit interprété de façon à ce que le magistrat devant qui l’accusé est trouvé coupable, ait droit, nonobstant la Déclaration canadienne des droits, d’imposer une réunion de peines qui excède les limites décrétées par le Code criminel. Il est certain que l’art. 150 n’élimine pas clairement les peines maximums prévues au Code criminel. S’il le faisait, il faudrait se demander si la politique qu’on dit être à la base de cet article est compatible avec la Déclaration canadienne des droits lorsque cette politique s’applique à toute infraction fédérale punissable d’une période d’emprisonnement d’au moins trois mois. Je ne crois pas que j’aie à aborder cet aspect parce que dans ce cas douteux, comme celui qui est présentement en cause, il vaut mieux soutenir une interprétation qui est nettement compatible avec la Déclaration canadienne des droits que s’engager dans une enquête qui pourrait comporter un examen de la réalité de la politique et de la question de savoir si cette politique peut, en tout état de cause, s’accorder avec l’al. b) du par. 1 de la Déclaration canadienne des droits lorsqu’elle vaut seulement pour la Colombie‑Britannique dans les termes dans lesquels elle est exprimée à l’art. 150.
A l’égard des questions qu’on dit entrer en conflit avec la Déclaration canadienne des droits, j’adopterais la même approche avec celle qui prévaut lorsqu’un conflit d’ordre constitutionnel est évoqué, à savoir, donner la préférence à une interprétation susceptible d’éviter semblable conflit.
L’avocat de l’appelante a insisté devant cette Cour sur deux arrêts américains, State v. Meyer[17], un arrêt du Minnesota, et Cunningham v. U.S. [18], un arrêt de la Cour d’appel des États-Unis (5e Circuit). Il n’y était pas question d’une limitation locale de la nature de celle que nous retrouvons dans les art. 150 et 44. Il s’agissait plutôt de lois — une loi du Minnesota dans un cas et une loi du Congrès des États-Unis dans l’autre — qui s’appliquaient aux jeunes contreve-
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nants à travers tout le ressort législatif dans chaque cas. Il n’y avait aucune application locale sélective dans une partie du ressort seulement. En effet, dans l’arrêt Cunningham, le tribunal a dit, p. 472, que (traduction) «la protection égale des lois se trouve à être fournie si la loi en cause s’applique de la même façon générale à tous ceux qui sont compris dans la même catégorie»; et la catégorie était clairement les jeunes contrevenants aux États-Unis, pas n’importe quel groupe semblable mis à part suivant l’État ou la région. La décision rendue dans l’affaire Salsburg v. State of Maryland[19] est en quelque sorte plus proche de la position de l’appelante mais elle peut facilement être considérée différente.
A mon avis, une interprétation de l’art. 150 à la lumière de la Déclaration canadienne des droits qui permettrait à un tribunal de Colombie-Britannique d’imposer la peine maximum d’emprisonnement décrétée pour l’infraction sous l’empire du Code criminel et d’imposer en plus une peine indéterminée de jusqu’à deux ans moins un jour, me paraît manifestement étrangère au but même par lequel on l’a dit animée. Il me semble beaucoup plus conforme au but proposé, considéré à la lumière de la Déclaration canadienne des droits, que l’union d’une peine déterminée et d’une peine indéterminée soit limitée au total par la période maximum d’emprisonnement qu’édicté le Code criminel ou cette autre loi fédérale qui crée l’infraction et décrète la peine dont celle-ci est punissable. De cette façon, il y a une garantie d’égalité de durée permise de peine, et à l’intérieur de cette limite une marge permettant d’en amoindrir la rigueur pour servir une fin de réhabilitation et de redressement. Quand on adopte ce point de vue, qui emporte mon adhésion, le facteur âge sous le régime de l’art. 150 n’équivaut plus à un élément punitif dans cette disposition mais tourne plutôt à l’avantage de l’accusé qui est
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dans le groupe d’âge visé. Il devient par conséquent superflu d’examiner l’arrêt Procureur Général de Colombie-Britannique c. Smith[20], et je note simplement que la Déclaration canadienne des droits ne fut pas invoquée dans cette affaire-là, qui reposait sur des motifs d’ordre purement constitutionnel.
Ce point de vue a aussi pour effet de laisser l’art. 150 subsister en tant que disposition opérante, compatible à la fois avec le Code criminel et la Déclaration canadienne des droits. Par conséquent, je rejetterais le pourvoi mais je modifierais l’arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique en retranchant le dernier alinéa qui déclare l’art. 150 inopérant et en lui substituant une disposition déclarant que l’art. 150, interprété et appliqué sous le régime de l’art. 1, al. b), et de l’art. 2 de la Déclaration canadienne des droits, n’autorise pas l’imposition d’une peine déterminée et d’une peine indéterminée qui excèdent au total celle fixée dans le cas présent par le Code criminel.
Pourvoi accueilli, LES JUGES SPENCE, LASKIN et DICKSON étant dissidents.
Procureur de l’appelante: George L. Murray, Vancouver.
Procureur de l’intimé: Donald J. Sorochan, Vancouver.
[1] (1973), 39 D.L.R. (3d) 161, 22 C.R.N.S. 271, 13 C.C.C. (2d) 137.
[2] [1970] R.C.S. 843.
[3] [1970] R.C.S. 843.
[4] [1970] R.C.S. 282.
[5] [1972] R.C.S. 889.
[6] (1972), 31 D.L.R. (3d) 465.
[7] [1938] R.C.S. 100.
[8] [1943] R.C.S. 438.
[9] [1974] R.C.S. 1349.
[10] [1970] R.C.S. 843.
[11] [1970] R.C.S. 282.
[12] [1974] S.R.C. 1349
[13] [1970] R.C.S. 843.
[14] [1970] R.C.S. 282.
[15] (1880), 3 R.C.S. 505.
[16] Publié depuis, [1974] R.C.S. 1349.
[17] (1947), 3 N.W. 2d 3.
[18] (1958), 256 F. 2d 467.
[19] (1954), 346 U.S. 545.
[20] [1967] R.C.S. 702.
Parties
Demandeurs :
Sa Majesté la ReineDéfendeurs :
BurnshineProposition de citation de la décision:
R. c. Burnshine, [1975] 1 R.C.S. 693 (1 avril 1974)
Origine de la décision
Date de l'import :
06/04/2012Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1974-04-01;.1975..1.r.c.s..693