Synthèse
Référence neutre : [1976] 2 R.C.S. 137
Date de la décision :
26/06/1975Sens de l'arrêt :
Les pourvois doivent être rejetés
Analyses
Indiens - Droits de chasse - Les accusés chassaient sans égard à la sécurité d’autrui dans le voisinage - Jouis s aient-ils de l’immunité en vertu de la cl. 13 de la Convention approuvée par le Manitoba Natural Resources Act, R.S.M. 1970, c. N30? - The Wildlife Act, R.S.M. 1970, c. W140, art. 10(1).
Violation de propriété — Chasseurs circulant sur une propriété privée sans la permission du propriétaire — Question de droit d’accès.
Les appelants, Indiens assujettis à un traité, ont tous été trouvés coupables d’avoir chassé sans égard à la sécurité des autres dans le voisinage, contrairement aux dispositions du par. (1) de l’art. 10 du Wildlife Act, R.S.M. 1970, c. W140, et les condamnations ont été confirmées en appel par nouveau procès devant la Cour de comté, et ensuite par la Cour d’appel du Manitoba. Sur autorisation, les appelants se sont pourvus devant cette Cour.
Il est reconnu que les accusés chassaient pour se nourrir et il ne fait pas de doute qu’ils le faisaient sans égard à la sécurité des autres dans le voisinage. Peu avant minuit, ils chassaient le chevreuil dans le champ de luzerne d’un fermier qui fut réveillé par le bruit des coups de carabine et une lumière brillant à travers la fenêtre de sa chambre à coucher. L’arme avait une portée de près de deux milles; dans ce rayon se trouvaient des fermes, des routes, des voies ferrées, des pâturages, un village et une station génétique. Par conséquent, les condamnations sont légitimes à moins que les accusés jouissent de l’immunité en vertu de la cl. 13 de la Convention du 14 décembre 1929, reproduite en annexe du Manitoba Natural Resources Act, R.S.M. 1970, c. N30.
Arrêt: Les pourvois doivent être rejetés.
En principe, il n’y a ni conflit ni contradiction entre le droit de chasser pour se nourrir, droit assuré par la cl. 13 de la Convention approuvée par le Manitoba Natural
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Resources Act, et la prescription du par. (1) de l’art. 10 du Wildlife Act, en vertu duquel l’exercice de ce droit ne doit pas mettre la vie d’autrui en danger. La première disposition vise la protection du gibier pour assurer aux Indiens de la province un approvisionnement continu en vivres et protéger leur droit de chasser pour se nourrir en toute saison de l’année; la seconde concerne le risque omniprésent de mort ou de blessure grave qui existe lorsque des chasseurs ne tiennent pas compte de la présence d’autres personnes dans le voisinage. Ainsi, le par. (1) de l’art. 10 ne restreint pas le type de gibier, le temps ou la méthode de chasse, il impose seulement à chaque individu l’obligation de chasser en ayant égard à la sécurité d’autrui.
Au regard de la question portant sur l’expression «un droit d’accès» contenue dans la cl. 13, même si cette Cour n’a pas à trancher définitivement cette question dans la présente affaire, il y a beaucoup à dire en faveur de la thèse que, au Manitoba, les chasseurs n’ont pas plus de droits que les citoyens ordinaires à l’égard de ce qui est propriété privée; ils n’ont aucun droit d’accès à une terre sans la permission du propriétaire et, sans cette permission, ils s’exposent à une poursuite pour violation de propriété en vertu de l’art. 2. du Petty Trespasses Act, R.S.M. 1970, c. P50.
Arrêt appliqué: Prince et Myron c. La Reine, [1975] R.C.S. 81; arrêts mentionnés: Daniels c. La Reine, [1968] R.C.S. 517; R. v. Wesley, [1932] 2 W.W.R. 337.
POURVOIS interjetés à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel du Manitoba[1], qui a confirmé un jugement du juge Kerr de la Cour de comté. Pourvois rejetés.
M.F. Garfinkel et A.J. Conner, pour les appelants.
A.G. Bowering, pour l’intimée.
Le jugement de la Cour a été rendu par
LE JUGE DICKSON — Les appelants, Indiens assujettis au traité de la réserve indienne Long Plain du Manitoba, ont tous été trouvés coupables d’avoir chassé sans égard à la sécurité des autres dans le voisinage, contrairement aux dispositions de l’art. 10(1) du Wildlife Act, R.S.M. 1970, c. W140, et les condamnations ont été confirmées en appel par nouveau procès devant la cour de comté et ensuite par la Cour d’appel du Manitoba. L’au-
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torisation de se pourvoir devant cette Cour a été accordée le 4 juin 1973.
Il ne fait pas de doute que les accusés chassaient sans égard à la sécurité des autres dans le voisinage. Peu avant minuit ils chassaient le chevreuil dans le champ de luzerne d’un fermier qui fut réveillé par le bruit des coups de carabine et une lumière brillant à travers la fenêtre de sa chambre à coucher. L’arme avait une portée de près de deux milles; dans ce rayon, se trouvaient des fermes, des routes, des voies ferrées, des pâturages, un village et une station génétique. Les condamnations sont, par conséquent, légitimes, à moins que les accusés jouissent de l’immunité en vertu de la cl. 13 de la Convention du 14 décembre 1929, reproduite en annexe du Manitoba Natural Resources Act, R.S.M. 1970, c. N30, où il est dit:
[TRADUCTION] Pour assurer aux Indiens de la province la continuation de l’approvisionnement de gibier et de poisson destinés à leurs support et subsistance, le Canada consent à ce que les lois relatives au gibier et qui sont en vigueur de temps à autre dans la province, s’appliquent aux Indiens dans les limites de la province; toutefois, lesdits Indiens auront le droit que la province leur assure par les présentes de chasser et de prendre le gibier au piège et de pêcher le poisson, pour se nourrir en toute saison de l’année sur toutes les terres inoccupées de la Couronne et sur toutes les autres terres auxquelles lesdits Indiens peuvent avoir un droit d’accès.
L’article 46(1) du Wildlife Act, précité, se lit comme suit:
[TRADUCTION] Rien dans la présente loi ne restreint, ni ne supprime les droits et privilèges conférés par la clause 13 de la Convention approuvée par le Manitoba Natural Resources Act.
Dans Daniels c. White et la Reine[2], le juge Judson a fait l’historique de la cl. 13 précitée et dans Rex c. Wesley[3], le juge McGillivray de la Division d’appel de la Cour suprême d’Alberta a fait l’historique de sa contrepartie albertaine. Toutefois l’affaire qui porte plus directement sur le présent
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litige est Prince et Myron c. La Reine[4]. Les appelants, Indiens assujettis à un traité, étaient accusés d’avoir chassé illicitement le gros gibier en utilisant des lanternes, contrairement aux prescriptions du Game and Fisheries Act du Manitoba, R.S.M. 1954, c. 94; la Cour s’est penchée sur le sens de la phrase [TRADUCTION] «…le droit… de chasser… le gibier …pour se nourrir en toute saison de l’année sur toutes les terres inoccupées de la Couronne et sur toutes les autres terres auxquelles lesdits Indiens peuvent avoir un droit d’accès». Comme ici on s’accordait à dire que les accusés chassaient afin de pourvoir à leur subsistance. L’opinion de la majorité à la Cour d’appel du Manitoba a été exprimée par le juge en chef Miller du Manitoba[5], qui y a dit, aux pp. 238-9:
[TRADUCTION] Voici la question qui se pose: quelles restrictions du Game and Fisheries Act s’appliquent aux Indiens? Il me semble que leur façon de chasser et les méthodes qu’ils utilisent à cette fin doivent inévitablement être restreintes par la loi. Me Pollock, l’avocat des Indiens, a fait valoir que ceux-ci n’étaient astreints aux dispositions du Game and Fisheries Act que lorsqu’ils chassaient à des fins sportives ou commerciales. Je ne trouve pas cela dans la cl. 13 du Manitoba Natural Resources Act. Je ne pense pas qu’il soit défendu aux Indiens de chasser pour leur nourriture les 365 jours de l’année et ils peuvent chasser pour se nourrir sur toutes les terres inoccupées de la Couronne et sur toute terre à laquelle ils ont un droit d’accès. J’estime, toutefois, qu’ils n’ont aucun droit d’adopter une méthode ou une façon de chasser qui est contraire au Game and Fisheries Act, parce que la cl. 13 du Natural Resources Act stipule bien que le Game Act de la province s’applique aux Indiens à certains égards.
Le juge d’appel Freedman, comme il était alors, exposant les motifs de la minorité, dit à la p. 242:
[TRADUCTION] A mon avis, le point fondamental de cette affaire c’est que, lors de la présumée infraction, les Indiens accusés chassaient pour se nourrir et non à des fins sportives ou commerciales. En vertu de l’art. 72(1) du Game and Fisheries Act, R.S.M. 1954, ch. 94, et de la cl. 13 du Manitoba Natural Resources Act, R.S.M., 1954, ch. 180, la situation particulière de l’Indien est reconnue lorsqu’il chasse en vue de se nourrir. Le but évident de ces dispositions est d’assurer aux Indiens, à
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l’intérieur de certains territoires, le droit absolu de chasser le gibier et de pêcher le poisson afin de pourvoir à leur subsistance. La disposition de la cl. 13 du Manitoba Natural Resources Act énonçant que la loi de la province sur le gibier et le poisson s’applique aux Indiens a, à mon avis, un caractère secondaire. Son effet se limite à imposer à l’Indien la même obligation qu’aux autres citoyens, c’est-à-dire que lorsqu’il chasse à des fins sportives ou commerciales, il ne doit chasser que de la façon et au temps prescrits par la loi. Le citoyen ordinaire, toutefois, ne chasse pas pour s’alimenter ou survivre. Mais l’Indien le fait, et la loi écrite, qui reconnaît son droit de subsistance, l’exempte des lois ordinaires relatives au gibier lorsqu’il chasse pour se nourrir dans des endroits où il a la permission de le faire.
L’arrêt de cette Cour fut rendu par le juge Hall, supra. Il adopta les motifs du juge d’appel Freedman dans sa dissidence à la Cour d’appel et fît sien l’énoncé suivant du juge d’appel McGillivray dans Rex v. Wesley, précité:
[TRADUCTION] «Si l’effet de la disposition n’est que de donner aux Indiens l’avantage supplémentaire de chasser pour leur nourriture «en dehors de la saison», et que, par ailleurs, ils sont assujettis aux lois de la province sur la chasse, il s’ensuit que le nombre d’animaux d’une espèce donnée qu’ils peuvent tuer en une année peut être limité même si ce nombre n’est pas suffisant pour assurer leur subsistance, et même si aucun autre gibier ne leur est accessible. Je ne crois pas que le texte de la clause indique que c’était l’intention des législateurs. Le but poursuivi, à mon sens, c’était que, lorsque l’Indien, comme l’homme blanc, chasse dans un but sportif ou commercial, il soit assujetti aux lois touchant la préservation du gibier mais que, lorsqu’il chasse les animaux sauvages pour la nourriture essentielle à sa subsistance, il soit considéré d’un point de vue tout à fait différent de l’homme blanc qui, en général, ne chasse pas pour se nourrir; et il est, par l’exception stipulée à la cl. 12, assuré de la continuité de l’exercice d’un droit dont il jouit depuis un temps immémorial.»
L’arrêt Prince et Myron montre bien qu’un Indien est libre de chasser ou de piéger le gibier autant qu’il le désire, quand il le désire et par les moyens qu’il choisit à condition que ce soit pour se nourrir personnellement et sur des terres inoccupées de la Couronne ou auxquelles il a un droit d’accès. Toutefois, il n’a pas le droit de chasser dangereusement au mépris de la sécurité des gens du voisinage. L’arrêt Prince et Myron traite des moyens permis. Ni cet arrêt ni ceux qui l’ont
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précédé n’ont traité de la protection de la vie humaine. Je suis d’accord avec ce qu’a dit le juge Hall à la Cour d’appel du Manitoba dans la présente cause:
[TRADUCTION] La loi applicable est le Wildlife Act, supra, notamment l’art. 41(1). L’art. 10(1), en vertu duquel lés accusés ont été inculpés ne restreint pas le type de gibier, le temps ou la méthode de chasse, il impose seulement l’obligation de chasser en ayant égard à la sécurité d’autrui. Cette prescription est-elle une restriction ou une atteinte au droit des Indiens de chasser pour leur nourriture sur les terres auxquelles ils ont un droit d’accès? Si Ton prend ce droit en termes absolus, la réponse est clairement affirmative; mais est-ce le cas? Non, le droit de chasser pour se nourrir, conféré ou attribué par l’accord et ratifié par la loi, ne peut pas être vu de cette façon. Il y a une restriction inhérente au droit, il faut l’exercer raisonnablement. L’article 10(1) n’est que l’énoncé législatif de ce concept, à savoir que le droit sera exercé en ayant égard à la sécurité d’autrui, y compris celle des Indiens.
A mon avis, il n’y a, en principe, ni conflit ai contradiction entre le droit de chasser pour se nourrir, droit assuré par la cl. 13 de la Convention approuvée par le Manitoba Natural Resources Act, et la prescription de l’art. 10(1) du Wildlife Act, en vertu duquel l’exercice de ce droit ne doit pas mettre la vie d’autrui en danger. La première disposition vise la protection du gibier pour assurer aux Indiens de la province un approvisionnement continu en vivres et protéger leur droit de chasser pour se nourrir en toute saison de l’année; la seconde concerne le risque omniprésent de mort ou de blessure grave qui existe lorsque des chasseurs ne tiennent pas compte de la présence d’autres personnes dans le voisinage. A mon avis, la Cour d’appel du Manitoba a eu raison de répondre négativement à la question sur laquelle l’autorisation d’en appeler à cette Cour a été accordée, à savoir:
[TRADUCTION] Le juge du procès a-t-il fait erreur en décidant que la clause 13 de l’annexe du Manitoba Natural Resources Agreement Act, 1930, ne donne pas d’immunité aux accusés contre les restrictions de chasse édictées par le Wildlife Act et, plus particulièrement, l’art. 10(1)?
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Une autre question a été soulevée au cours des plaidoiries, c’est le sens qu’il faut donner aux mots «toutes les autres terres auxquelles lesdits Indiens peuvent avoir un droit d’accès», à la fin de la cl. 13. Il n’est pas clair que l’on puisse attaquer en cette Cour la conclusion du juge de première instance selon qui les accusés avaient droit d’accès aux terres où ils chassaient lorsqu’ils ont été arrêtés. Toutefois, l’autorisation d’appel ne se limite pas à la seule question soumise à la Cour d’appel et, considérant l’inquiétude des fermiers soulevée, nous a-t-on affirmé, par l’arrêt majoritaire de la Cour d’appel du Manitoba dans Prince et Myron précité, j’estime qu’il peut être opportun et à propos de faire quelques observations sur l’expression «droit d’accès», sans en faire un motif décisif. Baron, le plaignant, n’a pas donné aux accusés la permission d’aller sur sa terre pour chasser ou à toute autre fin; il ne les connaissait pas. Il n’avait pas mis d’écriteaux sur ses terres. Les paragraphes (1) et (2) de l’art. 40 du Wildlife Act du Manitoba disent ceci:
[TRADUCTION] 40(1). Le propriétaire ou l’occupant légal de toute terre autre qu’une terre de la Couronne peut donner avis qu’il est défendu de chasser ou de tirer le gibier ou des animaux exotiques sur sa terre, en apposant et maintenant alentour des écriteaux d’au moins un pied carré faisant face à l’extérieur, à intervalle de deux cent vingts verges au plus, portant l’inscription «Chasse par autorisation seulement» ou «Chasse interdite» ou toute autre inscription au même effet.
[TRADUCTION] 40(2). Quiconque, sans le consentement du propriétaire ou occupant légal, chasse le gibier ou des animaux exotiques sur une terre où des écriteaux sont apposés conformément au par. (1), est coupable d’une infraction et passible sur poursuite sommaire intentée par un particulier d’une amende de deux cents dollars au plus et d’emprisonnement pour un mois au plus ou de l’une de ces peines.
Au premier procès, le magistrat a dit:
[TRADUCTION] En l’espèce, je n’ai aucune preuve qu’il était défendu de chasser sur la terre du plaignant, et suis d’avis que les quatre accusés avaient un droit d’accès pour chasser.
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Au second procès, le juge de la cour de comté n’a rien dit du droit d’accès. Il a considéré qu’il n’y avait que deux points en litige: d’abord, la chasse, ensuite, le danger; il a statué contre les accusés sur ces deux points. En Cour d’appel, le juge Hall, au nom du tribunal, a dit:
[TRADUCTION] Vu que le droit d’appel est restreint, nous nous sentons obligés d’accepter les conclusions implicites du juge du procès que les accusés sont des Indiens assujettis à un traité qui chassaient pour se nourrir sur des terres auxquelles ils avaient un droit d’accès.
Apparemment, le magistrat avait conclu, comme question de droit, que les accusés avaient un droit d’accès aux terres où ils chassaient et cette conclusion a été acceptée par la Cour d’appel. On prétend fonder cette thèse sur l’énoncé du juge en chef Miller du Manitoba dans La Reine c. Prince et Myron, supra; après avoir cité les par. (1) et (2) de l’art. 76 du Game and Fisheries Act (aujourd’hui les par. (1) et (2) de l’art. 40 du Wildlife Act, il poursuivit (p. 238):
[TRADUCTION] Je crois qu’à moins que des écriteaux soient apposés sur la terre, conformément à l’art. 76(2), tout le monde a le droit d’y pénétrer pour chasser. Il est vrai que le propriétaire ou l’occupant peuvent signifier aux gens de s’en aller et, s’ils le font, personne, même un Indien, n’a le droit de chasser sur cette terre et y a droit d’accès; mais, en l’absence d’une interdiction, par écriteau ou autrement, les Indiens avaient un droit d’accès à la terre où ils ont été trouvés en train de chasser. Le fait que la terre était cultivée ne fait aucune différence. Le fait que les droits de common law relatifs à l’entrée sans autorisation sur une propriété privée sont sauvegardés ne fait aucune différence non plus.
Devant la présente Cour, il fut admis que les accusés Prince et Myron avaient droit d’accès à la terre en question. Le juge Hall, au nom de la Cour, dit à la p. 83, R.C.S. [1964]:
[TRADUCTION] Dans cette Cour, il fut admis que les appelants étaient des Indiens, qu’ils chassaient le chevreuil en vue de se procurer de la nourriture pour leur usage personnel et qu’ils chassaient sur des terres où ils avaient un droit d’accès. Ce sont là des éléments essentiels pour l’issue de ce pourvoi.
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La question n’a donc pas été débattue en cette Cour et elle n’a pas fait l’objet de la décision.
Dans la présente affaire, il n’est pas nécessaire d’exprimer une opinion décisive sur ce point, mais je dois dire que si l’énoncé précité du juge en chef Miller du Manitoba est un exposé fidèle de la loi, les conséquences en sont bien étendues. A ce compte, au Manitoba, n’importe qui peut pénétrer sur n’importe quelle terre où il n’y a pas d’écriteau et y chasser sans la permission du propriétaire, du moins jusqu’à ce qu’on l’expulse; le port d’une arme à feu justifie un acte qui, autrement serait une intrusion. Je doute sérieusement que la loi soit ainsi. L’article 40 du Wildlife Act ne traite pas du droit de propriété immobilière. L’objectif en est plutôt, me semble-t-il, d’établir une infraction distincte en vertu de la loi provinciale à l’égard des terres munies d’écriteaux et non pas de conférer un droit d’accès à celles où il n’y en a pas. Tout le travail et les dépenses de la pose et l’entretien des écriteaux sont un travail fastidieux et onéreux qui ont pour objet d’indiquer qu’il s’agit d’une propriété privée, d’en détourner les chasseurs et de donner lieu à une infraction en vertu de l’art. 40(2) à l’égard de ceux qui y pénètrent sans permission. Un fermier manitobain ne doit pas se voir contraint, par l’art. 40(1) du Wildlife Act, à poser des écriteaux sur sa terre sous peine de devoir tolérer l’intrusion de chasseurs sans permission. Avec grand respect, j’estime que dans Prince et Myron c. La Reine, la majorité de la Cour d’appel du Manitoba peut avoir fait erreur dans son opinion sur l’art. 76 du Game and Fisheries Act, aujourd’hui l’art. 40, en omettant de reconnaître l’importance du par. (4) qui se lit comme suit:
[TRADUCTION] 76. (4) Rien dans cet article ne limite ni n’atteint le recours en common law d’un tel propriétaire ou occupant pour intrusion sur le fonds d’autrui.
Le paragraphe (4) de l’art. 40 du Wildlife Act, a renforcé cette disposition en ajoutant la mention des recours prévus par loi écrite:
[TRADUCTION] 40(4). Rien dans cet article ne limite ni n’atteint les droits ou recours qu’une personne a, en vertu de la common law ou de la loi écrite, pour intrusion sur le fonds d’autrui.
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Le juge en chef Miller du Manitoba reconnaissait le droit du propriétaire d’obliger des chasseurs à quitter sa propriété. Il admettait aussi que le «droit d’accès» est un droit limité; il accordait tout de même aux chasseurs un statut spécial et un droit d’accès que n’a pas en général celui qui se rend coupable de violation du droit de propriété. Même si nous n’avons pas à trancher définitivement cette question dans la présente affaire, je crois pouvoir affirmer qu’il y a beaucoup à dire en faveur de la thèse que, au Manitoba, les chasseurs n’ont pas plus de droits que les citoyens ordinaires à l’égard de ce qui est propriété privée; ils n’ont aucun droit d’accès à une terre sans la permission du propriétaire et, sans cette permission, ils s’exposent à une poursuite pour intrusion sur le fonds d’autrui en vertu de l’art. 2 du Petty Trespasses Act, R.S.M. 1970, c. P50. La question du droit d’accès doit normalement être tranchée dans chaque cas particulier, comme une question de fait et non comme une question de droit, sur l’ensemble de la preuve dans l’affaire.
Je suis d’avis de rejeter les présents pourvois.
Appels rejetés.
Procureurs des appelants: Pollock & Conner, Winnipeg.
Procureur de l’intimée: Procureur général du Manitoba, Winnipeg.
[1] [1973] 4 W.W.R. 512, 35 D.L.R. (3d) 473.
[2] [1968] R.C.S. 517.
[3] [1932] 2 W.W.R. 337.
[4] [1964] R.C.S. 81.
[5] (1964), 40 W.W.R. 234.
Parties
Demandeurs :
MyranDéfendeurs :
Sa Majesté la ReineProposition de citation de la décision:
Myran c. La Reine, [1976] 2 R.C.S. 137 (26 juin 1975)
Origine de la décision
Date de l'import :
06/04/2012Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1975-06-26;.1976..2.r.c.s..137