Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 20 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 9 novembre 1984 en tant que, par ce jugement, le tribunal a déchargé la société Thermale de Molitg-les-Bains des droits auxquels cette société a été assujettie en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1974 pour un montant de 256 984,45 F, ainsi que de la totalité des pénalités mises à sa charge par l'avis de mise en recouvrement du 11 juillet 1972,
2°) en ce qui concerne les droits, remette à la charge de la société le montant de droits dont le tribunal administratif l'a déchargée,
3°) en ce qui concerne les pénalités :
- à titre principal, rétablisse l'amende fiscale de 200 % pour manoeuvres frauduleuses à raison des rappels de taxes afférents aux rehaussements sur recettes et décide que les rappels de droits non contestés seront assortis de l'indemnité de retard prévue à l'article 1727 du code général des impôts ;
- à titre subsidiaire, décide que les rappels de taxes afférents aux rehaussements sur recettes seront assortis de la pénalité prévue en cas de mauvaise foi, l'indemnité de retard étant appliquée par le surplus ;
- à titre très subsidiaire, décide que l'indemnité de retard sera appliquée sur la totalité des rappels de taxes maintenus à la charge de la société ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Latournerie, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Ryziger, avocat de la société Thermale de Molitg-les-Bains,
- les conclusions de M. Martin-Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en tant qu'il statue sur la demande n° 2 835 F de la société thermale de Molitg-les-Bains tendant à la décharge des droits et pénalités qui ont été assignés à cette société en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1974, le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 9 novembre 1984 est frappé d'appel par le ministre et d'appel incident par la société ;
Considérant que la société thermale de Molitg-les-Bains, qui pendant la période susindiquée, avait pour activité l'exploitation d'établissements thermaux et hôteliers à Molitg-les-Bains, Eugénie-les-Bains, Barbotan et Saint-Christau ainsi que la culture et la vente de plancton thermal a fait l'objet d'une procédure de rectification d'office au motif que, pour l'établissement thermal de Barbotan, dans lequel elle réalisait la plus grande partie de son chiffre d'affaires, sa comptailité était, en ce qui concerne le mode d'enregistrement comptable et les pièces justificatives des recettes, entachée de graves irrégularités et omissions de nature à lui retirer toute valeur probante ;
Considérant, en premier lieu, que la société thermale de Molitg-les-Bains enregistrait les recettes de l'établissement de cure de Barbotan sur deux fiches quotidiennes conservées dans un classeur chronologique, présentant, l'une la répartition des recettes par mode de paiement, l'autre le détail des prestations de services dispensées avec leur prix et la somme des remboursements faits aux clients ayant annulé leur réservation ou réduit la durée de leur cure ; que ces indications, regroupées ensuite et collationnées dans des registres cotés et paraphés, étaient suffisamment détaillées pour assurer la régularité en la forme de la comptabilité, sans qu'il fût nécessaire en outre que fût indiquée, en face de chaque prestation ou remboursement, la référence au nom du curiste ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'à supposer que la société ait refusé de communiquer au vérificateur le bordereau des reçus d'arrhes et des cartes de cure ayant donné lieu à remboursement, ainsi que le carnet à souche des cartes de cure vendues, cette circonstance ne saurait être retenue à l'encontre de la société qui, en application des dispositions de l'article 378 du code pénal, ne pouvait que refuser la communication de ces pièces qui comportaient le nom des personnes soignées ; qu'enfin elle n'était pas tenue de les communiquer après avoir procédé à l'occultation de ces noms ; qu'il suit de là que l'administration n'établit pas que la comptabilité était tenue dans des conditions de nature à lui faire perdre son caractère probant ; que, dès lors, la société thermale de Molitg-les-Bains est fondée à soutenir que la procédure de rectification d'office dont elle a fait l'objet, qui l'a privée de la saisine de la commission départementale qu'elle avait demandée, est irrégulère ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à demander le rétablissement des droits et d'une partie des pénalités dont le tribunal administratif a déchargé la société et que les conclusions du recours incident de la société tendant à la décharge de la partie des droits laissés à sa charge par le jugement attaqué doivent, en revanche, être accueillies ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est rejeté.
Article 2 : La société thermale de Molitg-les-Bains est déchargée du complément de taxe sur la valeur ajoutée laissé à sa charge par le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 9 novembre 1984.
Article 3 : En tant qu'il statue sur la requête n° 2 835 F de la société thermale de Molitg-les-Bains relative à la taxe sur la valeur ajoutée, le jugement du tribunal administratif de Montpellier en datedu 9 novembre 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société thermale de Molitg-les-Bains et au MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE LA PRIVATISATION, CHARGE DU BUDGET.