Vu la requête, enregistrée le 8 juillet 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS", dont le siège social est ..., représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 30 avril 1982 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des impositions en matière de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1972 au 30 septembre 1976,
2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée, Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts applicable à l'imposition contestée : "1 - Les affaires faites en France ... sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité de nature industrielle et commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats. 2 - Cette taxe s'applique quels que soient : - d'une part, le statut juridique des personnes qui interviennent dans la réalisation des opérations imposables ou leur situation au regard de tous autres impôts ... - d'autre part, la forme ou la nature de leur intervention et le caractère habituel ou occasionnel de celle-ci." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS" a consenti, par un bail du 1er septembre 1971, à la société anonyme "Maisons Blanches", afin de permettre à cette dernière d'exercer l'activité de restauration d'entreprise, la location d'un immeuble à usage industriel et commercial dont elle est propriétaire ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, si la location consentie par la société civile immobilière portait, pour partie, sur des locaux, dits laboratoires, spécialement conçus pour la préparation de la charcuterie et de la pâtisserie et comportant des aménagements tels que monte-charge, tunnel de congélation, rails de transport, elle portait également pour partie sur des locaux ne faisant l'objet d'aucun aménagement spécial et ne comprenait pas les éléments mobiliers nécessaires à l'activité du preneur ; que, dès lors, cette location, qui excluait ainsi, pour l'essentiel, le matériel nécessaire à l'exploitation, présentait, en principe, un caractère civil par nature n'entraînant pas son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le loyer prévu par le bail conclu entre la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS" et la société "Maisons Blanches" était fixe ; que, si la société requérante soutient qu'elle a consenti une diminution dudit loyer par suite, notamment, d'un incendie qui a affecté les biens loués, elle n'établit pas, ce faisant, que le montant du loyer fût lié à l'activité de la société "Maisons Blanches" ; que, par suite, la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS" ne saurait valablement soutenir que, du fait du bail consenti, elle participait aux résultats de l'entreprise locataire ; Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que le principal actionnaire de la société locataire était également l'un des associés majoritaires de la société civile bailleresse ne suffit pas à donner au bail conclu dans les conditions et selon les modalités susindiquées le caractère d'un bail commercial pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant, enfin que, si la société civile immobilière invoque une instruction de la direction générale des impôts en date du 17 septembre 1980 qui permettrait l'exercice d'une option à titre rétroactif, ladite instruction est postérieure à la date de versement des sommes dont la décharge est demandée ; que par suite, et en tout état de cause, la société requérante n'est pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts repris à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui procède que la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS" n'est pas fondée à soutenir que les loyers qu'elle percevait étaient passibles de plein droit de la taxe sur la valeur ajoutée ni, par suite, à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Versailles, lui déniant le bénéfice d'un droit à déduction, a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière "RUNGIS MORANGIS" et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.