Vu, 1°) sous le n° 109 307, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 24 juillet 1989 et le 25 août 1989, présentés par MM. J... Laine et Eloi I..., demeurant à Vincly, Fruges (62310), ils demandent que le Conseil d'Etat :
- réforme le jugement du 22 juin 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille s'est déclaré incompétent pour statuer sur leur demande fondée sur l'irrégularité d'inscriptions ou de radiations sur la liste électorale,
- annule l'ensemble des résultats des opérations électorales qui se sont déroulées le 12 mars 1989 dans la commune de Vincly,
Vu, 2°) sous le n° 109 397, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 juillet 1989 et le 24 août 1989, présentés pour M. Jean C..., demeurant à Vincly, Fruges (62310), Mme Edwige C...
A..., demeurant à Vincly, Fruges (62310) et M. Omer E..., demeurant à Vincly, Fruges (62310) ; ils demandent que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 22 juin 1989 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé leur élection en qualité de conseillers municipaux lors des opérations électorales du 12 mars 1989 dans la commune de Vincly ainsi que l'élection de M. Jean C... en qualité de maire du 19 mars 1989,
- rejette les requêtes de MM. D... et I...,
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. d' Harcourt, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. Jean C... et autres,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées de MM. D... et I..., d'une part, et de M. C..., Mme C... et M. E..., d'autre part, ont trait aux opérations électorales auxquelles il a été procédé le 12 mars 1989 pour le renouvellement, au premier tour de scrutin, du conseil municipal de la commune de Vincly, Pas-de-Calais ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la composition de la liste électorale :
Considérant que si MM. G..., D... et I... ont présenté un grief tiré d'irrégularités de la révision de la liste électorale, ils n'ont invoqué, à l'appui de ce grief, aucun moyen précis tendant à établir que ces irrégularités auraient été constitutives d'une manoeuvre, seule de nature à rendre la juridiction administrative compétente pour se prononcer sur ledit grief ; que s'ils soutiennent en appel que ce n'est qu'en raison du défaut de publicité donnée à la liste électorale qu'ils auraient été empêchés d'étayer leur suspicion d'une manoeuvre, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est déclaré incompétent pour statuer sur les irrégularités alléguées ;
Sur le déroulement du scrutin :
Considérant que si MM. D... et I... soutiennent que le bureau de vote aurait siégé vers 13 h 30 à effectif incomplet, ils ne font pas état de la survenance à cette occasion d'incidents ou de fraudes que les membres du bureau absents n'auraient pu constater ;
Sur l'élection des conseillers municipaux :
En ce qui concerne Mme Edwige C... :
Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité du déféré du préfet :
Considérant qu'aux termes de l'article L.231 du code électoral, dans la rédaction de ce texte issue de l'article 23 de la loi n° 88-1262 du 30 décembre 1988 : " ... Les agents salariés communaux ne peuvent être élus au conseil municipal de la commune qui les emploie ..." ; que, si les pièces du dossier ne permettent pas de déterminer avec certitude, compte tenu des ambiguïtés et des contradictions qu'elles présentent, si Mme C... a été effectivement employée par la commune de Vincly, ni à quelle date il aurait été mis fin à ses éventuelles fonctions, il résulte en tout état de cause d'une attestation du comptable communal, dont les mentions ne sont pas contestées, qu'elle ne percevait aucune rémunération de la commune ; qu'ainsi, elle n'avait pas, en tout état de cause, la qualité "d'agent salarié communal" au sens du texte précité ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif l'a déclarée inéligible ;
En ce qui concerne MM. Morenval et Jean C... :
Considérant qu'il ressort du procès-verbal des opérations du scrutin que le bureau électoral a déclaré nuls sept bulletins ; que le tribunal administratif, estimant que ces bulletins étaient valables, a opéré un nouveau décompte des résultats, dont il ressortait que la majorité absolue s'établissait à 57 voix, ce qui l'a conduit à annuler l'élection de MM. Morenval et Jean C... ;
Mais considérant que six des bulletins concernés comportent des traits tracés à l'encre noire, soit sous les mots "Elections Municipales" soit parallèlement au trait imprimé au-dessous du titre de la liste ; que ces traits, qui ne pouvaient avoir pour objet d'expliciter le vote de l'électeur, doivent être regardés comme des signes de reconnaissance ; qu'il y a lieu, dès lors, de réformer le jugement attaqué en ce qui concerne ces six bulletins et de confirmer leur annulation ; qu'à la suite de cette annulation, la majorité absolue se trouve ramenée à 54 voix ; qu'il suit de là que l'élection de M. E... doit être proclamée ; qu'en revanche, c'est à bon droit que le tribunal administratif a annulé l'élection de M. Jean C..., qui n'a obtenu que 53 suffrages ;
Sur l'élection du maire et des adjoints :
Considérant qu'aux termes de l'article L.122-4 du code des communes "le conseil municipal élit le maire et les adjoints parmi ses membres" ; qu'il suit de là que, même s'il n'avait été saisi d'aucune protestation tendant à l'annulation de l'élection comme maire de M. Jean C..., et en l'absence de tout autre grief relatif à cette élection, le tribunal administratif devait, ainsi qu'il l'a fait, prononcer d'office cette annulation comme conséquence de celle de l'élection de l'intéressé en qualité de conseiller municipal ; qu'en revanche, c'est à tort qu'il a prononcé celle de Mme Edwige C... comme adjoint au maire, dès lors que la présente décision valide son élection comme conseiller municipal, et qu'aucun grief n'est présenté contre son élection en qualité d'adjoint ; que toutefois, conformément à l'article L.122-9 du code des communes, il y aura lieu pour le conseil municipal de procéder à une nouvelle élection de l'ensemble des adjoints à la suite de l'élection du maire consécutive à la présente décision ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 22 juin 1989, est annulé en tant qu'il prononce l'annulation de l'élection de M. Omer E... et de Mme Edwige C... en qualité de conseillers municipaux de la commune de Vincly, et de l'élection de cette dernière en qualité d'adjoint au maire.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête susvisée de M. Jean C..., Mme Edwige C... et M. E... est rejeté, ensemble la requête de MM. D... et I....
Article 3 : La présente décision sera notifiée à MM. D..., I..., Jean C..., à Mme Edwige C..., à M. E..., à MM. H..., L..., Z..., B..., X..., G..., K..., Y..., à M. Gilles F... et au ministre de l'intérieur.