Vu 1°) sous le n° 111 677, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 23 novembre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour : 1- la Ville d'Amiens, représentée par son maire en exercice ; 2- le Département de la Somme, représenté par son président du Conseil général ; 3- l'Association T.G.V. Amiens-Picardie-Normandie, dont le siège social est ..., représentée par son président en exercice ;
ils demandent au Conseil d'Etat :
1°) à titre principal d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 29 septembre 1989 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction d'une ligne nouvelle de chemin de fer à grande vitesse entre Paris, la frontière belge et le tunnel sous la manche, en tant que ce décret a déclaré d'utilité publique le tracé de cette ligne entre Chevrières et Arras ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler pour excès de pouvoir l'ensemble de ce décret ;
3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce décret ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 30 000 F au titre de l'article 1er du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988 ;
Vu, 2°) sous le n° 111 820, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 novembre 1989 et 29 mars 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la Commune de Seclin, représentée par son maire en exercice ; la Commune de Seclin demande au Conseil d'Etat :
1°) à titre principal, d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 29 septembre 1989 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction d'une ligne nouvelle de chemin de fer à grande vitesse entre Paris, la frontière belge et le tunnel sous la manche en tant que ce décret établit le tracé de cette ligne sur le territoire de la Commune de Seclin ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler pour excès de pouvoir l'ensemble de ce décret ;
3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce décret ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 30 000 F au titre de l'article 1er du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988 ;
Vu, 3°) sous le n° 111 821, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 30 novembre 1989, la requête présentée pour : - les villes de Lambersart (59130), Ennetières-en-Weppes (59320), Saint-André (59350), Verlinghem (59237), Bois Grenier (59280), Lompret (59840), représentées par leur maire en exercice ; - l'Association des résidants du quertier Pont Royal pour la défense de l'environnement dont le siège social est chez Mme Roselyne Z..., ... ; - le Syndicat des copropriétaires de la résidence "Jardin du Bourg" à Lambersart, dont le siège social est 9 et 11, Léon Trulin à Lille (59000) ; - l'Association du Parc de la Cessoie dont le siège social est chez M. Danjou, 52 rue André Messager à Lambrsart (59130) ; - l'Association syndicale libre de la Clairière de la Cessoie, dont le siège social est à la mairie de Lambersart (50130) ; - l'Association pour la participation à l'étude du tracé et profil du TGV, dont le siège est chez Mme Lisambert, 12 chemin des Muchets à Verlinghem
(59237) ; - l'Association de la rue Lalo, dont le siège social est chez Mme Van Eenooghe, 14 rue Lalo à Lambersart (59130) ; - l'Association de défense des Lompertois contre les nuisances du TGV, dont le siège social est chez M. Mazereuw, 4 rue Paul Brame à Lompret-Perenchies (59840) ; - l'Association L'Ermitage "Association des Nord Conquérants et environs", dont le siège social est chez M. Tournon, 43 rue René Mouchette-Lambersart (59130) ; - l'Association pour la qualité de la vie à Bois-Grenier, dont le siège social est chez M. Fix, la résidence de la Brandeville, Bois-Grenier à Armentières (59280) ; - la Confédération syndicale du cadre de vie à Lambersart, dont le siège social est chez Mme Dassonneville, 101 rue Pierre et Marie Curie, à Lambersart (59130) ; - l'Association des familles du Nord-Ouest de Lille, dont le siège est ..., toutes ces associations requérantes représentées par leur président en exercice ; elles demandent au Conseil d'Etat :
1°) à titre principal, d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 29 septembre 1989 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction d'une ligne nouvelle de chemin de fer à grande vitesse entre Paris, la frontière belge et le tunnel sous la Manche, en tant que ce décret a déclaré d'utilité publique le tracé de cette ligne entre les points kilométriques 13, 102, 834 correspondant au passage du TGV à la sortie de Lille au-dessus de la rivière la Basse Deule jusqu'au point kilométrique 28 + 658,46 au surplomb de la rivière la Beque ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler pour excès de pouvoir l'ensemble de ce décret ;
3°) de déclarer qu'il sera sursis à l'exécution de ce décret ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 15 000 F au titre de l'article 1er du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988 ;
Vu, 4°) sous le n° 111 834, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 30 novembre 1989, présentée par l'Association Menschen Lyk Wyder, dont le siège social est ..., représentée par M. Gilles Roquette, administrateur, dûment habilité ; l'association demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 29 septembre 1989 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction d'une ligne nouvelle de chemin de fer à grande vitesse entre Paris, la frontière belge et le tunnel sous la Manche ;
2°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce décret ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu la directive du Conseil des Communautés européennes du 27 juin 1985 ;
Vu la loi 82-653 du 30 décembre 1982 ;
Vu la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 ;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 ;
Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. du Marais, Auditeur,
- les observations de Me Roue-Villeneuve, avocat de la Ville D'Amiens et autres et de la Ville de Lambersart et autres,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n° 111 677 de la Ville d'Amiens et autres, n° 111 820 de la Ville de Seclin et autres, n° 111 821 de la Ville de Lambersart et autres et n° 111 834 de l'Association Menschen Lyk Wyder sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les interventions du "Groupement de défense du TGV par Amiens" et de la Ville D'Erquinghem-Lys :
Considérant que le "Groupement de défense du TGV par Amiens" et la Ville D'Erquinghem-Lys ont intérêt à l'annulation du décret attaqué ; qu'ainsi leurs interventions sont recevables ;
Sur le moyen relatif au groupe de travail présidé par M. X... :
Considérant que le groupe de travail présidé par M. X..., et mis en place par le ministre de l'équipement, avait pour objet non de donner un avis nécessaire à la régularité de la procédure d'utilité publique mais de chercher une conciliation entre les parties en présence ; qu'il n'entrait donc pas dans le champ d'application de l'article 14 du décret du 28 novembre 1983 qui s'applique, en vertu des dispositions de l'article 10 du même décret, "aux organismes collégiaux dont l'avis est requis préalablement aux décisions prises" ;
Sur le moyen tiré de l'absence de délibération du conseil d'administration de la Société Nationale des Chemins de Fer Français sollicitant l'ouverture d'une procédure de déclaration d'utilité publique :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 7 de la loi du 26 juillet 1983 : "Aucune décision relative aux grandes orientations stratégiques, économiques, financières ou technologiques de l'entreprise, notamment sur le contrat de plan, ne peut intervenir sans que le conseil d'administration ... en ait préalablement délibéré" ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le conseil d'administration de la SNCF a délibéré sur les dispositions essentielles du projet de la ligne du TGV-Nord au cours de ses séances du 21 octobre 1987, du 16 décembre 1988 et du 13 juillet 1989 ; que le président du conseil d'administration de la SNCF était compétent, en application des textes portant statut de l'établissement public de la SNCF, pour prendre la décision sollicitant l'ouverture de la procédure de déclaration d'utilité publique préalable au décret attaqué ; que la méconnaissance des stipulations du contrat de plan Etat-SNCF 1985-1989, à la supposer établie, ne peut être utilement invoquée, comme moyen de légalité, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le décret attaqué ;
Sur le moyen tiré de ce que l'étude d'évaluation socio-économique n'aurait pas été rendue publique avant l'ouverture de l'enquête :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 14 de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs : "les grands projets d'infrastructures et les grands choix technologiques sont évalués sur la base de critères homogènes permettant de procéder à des comparaisons à l'intérieur d'un même mode de transport et entre différents modes ou combinaisons de mode. Ces évaluations sont rendues publiques avant l'adoption définitive des projets concernés" ; que le projet du TGV-Nord doit être considéré, en application de l'article 2 du décret du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 précité comme un grand projet d'infrastructures ; qu'il résulte des dispositions de l'article 6 du décret précité, que sous réserve du secret de la défense nationale ou du secret en matière commerciale et industrielle, le dossier d'évaluation prévu à l'article 4 est inséré dans les dossiers soumis à enquête publique ; qu'ainsi l'administration a pu légalement ne rendre publique l'étude d'évaluation du projet qu'au moment de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, en l'insérant dans le dossier soumis au public dont il constitue la partie "E" ;
Considérant que le communiqué en date du 23 mars 1988 par lequel le Premier ministre a rendu public le tracé retenu par le gouvernement pour le TGV-Nord et aux termes duquel "la possibilité de réaliser, dans un deuxième temps une liaison TGV directe supplémentaire de Paris vers le tunnel, via Amiens, a été prise en considération", est par lui-même dépourvu d'effet juridique ; qu'il ne saurait valoir décision de réaliser une opération par tranches successives ; que les requérants ne sont, ainsi, pas fondés à soutenir que le décret attaqué méconnaît les dispositions de l'article 3 du décret du 17 juillet 1984, qui ne concerne que les opérations susceptibles d'être réalisées par tranches successives ;
Considérant, dès lors, que l'exception d'illégalité invoquée par les requérants à l'encontre de l'article 7 du décret précité du 17 juillet 1984, dont les dispositions ne sont applicables qu'aux projets qui ne font pas l'objet d'une enquête publique, ou qui ne font l'objet que d'une enquête par tranches successives, est, en tout état de cause, inopérante ;
Sur le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'évaluation socio-économique :
Considérant que l'article 4 du décret du 17 juillet 1984 précité dispose : "L'évaluation des grands projets d'infrastructures comporte :... 3° Les motifs pour lesquels, parmi les partis envisagés par le maître d'ouvrage, le projet présenté a été retenu ; ... L'évaluation des grands projets d'infrastructures comporte également une analyse des différentes données de nature à permettre de dégager un bilan prévisionnel, tant des avantages et inconvénients entraînés, directement ou non, par la mise en service de ces infrastructures dans les zones intéressées que des avantages et inconvénients résultant de leur utilisation par les usagers. Ce bilan comporte l'estimation d'un taux de rentabilité pour la collectivité calculée selon les usages des travaux de planification. Il tient compte des prévisions à court et à long terme qui sont faites, au niveau national ou international, dans les domaines qui touchent aux transports, ainsi que des éléments qui ne sont pas inclus dans le coût du transport, tels que la sécurité des personnes, l'utilisation rationnelle de l'énergie, le développement économique et l'aménagement des espaces urbain et rural. Il est établi sur la base de grandeurs physiques et monétaires ; ces grandeurs peuvent ou non faire l'objet de comptes séparés. Les diverses variantes envisagées par le maître d'ouvrage d'un projet font l'objet d'évaluations particulières selon les mêmes critères. L'évaluation indique les motifs pour lesquels le projet présenté a été retenu" ;
Considérant que la partie "E" du dossier d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique est intitulée "Evaluation socio- économique" ; que l'enquête portait sur le tracé intitulé "B" ; que les différents "fuseaux de tracé" intitulés A1, A2, A3, A4, B', B", B"', analysés aux pages 76 à 88 du chapitre 4, intitulé "les motifs de choix du projet retenu" de cette étude, constituent des "partis envisagés" au sens du 3°) de l'article 4 précité, et non des "variantes" au sens du dernier alinéa du même article et qu'il n'y avait donc pas lieu de faire application des dispositions de l'avant-dernier alinéa dudit article 4 en calculant un "bilan prévisionnel, tant des avantages et inconvénients" pour chacun des "fuseaux de tracé" ; qu'il résulte, enfin, du dossier d'enquête que, conformément aux dispositions précitées du 3°) de l'article 4, ces différents "partis" sont comparés au tracé B et que le document fait apparaître les raisons pour lesquelles ils ne pouvaient être retenus ; que les paragraphes 3.3, intitulés "le bilan économique et financier" et 3.4, "l'analyse des effets prévisibles" de ladite étude font une présentation détaillée des avantages et inconvénients du seul projet mis à l'enquête au regard d'un grand nombre de critères répondant aux prescriptions des dispositions précitées et qui se traduit par le calcul d'un "bilan coût avantage monétarisable" ; que le moyen tiré de ce que cette "étude d'évaluation socio-économique" ne comporterait ni analyse des coûts de renouvellement de l'infrastructure projetée, ni estimation suffisamment détaillée du taux de rentabilité financière conformément aux dispositions des 1°) et 2°) de l'article 4 précité manque en fait ; qu'il résulte de tout ce qui précède que l'étude d'évaluation jointe au dossier d'enquête comporte l'ensemble des informations requises par l'article 4 du décret du 17 juillet 1984 précité ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R.11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :
Considérant que le dossier soumis à l'enquête comprend obligatoirement, aux termes de l'article R.11-3-I du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : "I. Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages ... 4°) Les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; 5°) L'appréciation sommaire des dépenses" ; qu'il résulte du dossier soumis à l'enquête que le pétitionnaire a satisfait à cette obligation d'informer le public au sujet des principaux ouvrages d'art, des opérations d'aménagement de la Gare du Nord ainsi que de leur coût ; que les intéressés ont été mis à même de connaître le coût réel de l'opération tel qu'ill pouvait être raisonnablement apprécié à la date de l'enquête ; que, par suite, la circonstance, à la supposer établie, que l'estimation initiale des dépenses aurait été dépassée, est sans influence sur la légalité de la décision attaquée dès lors qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que cette estimation ait été entachée d'erreurs de nature à vicier la procédure ;
Sur le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact :
Considérant, en premier lieu, que si les requérants soutiennent que le décret du 12 octobre 1977, pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, serait illégal en tant que ses dispositions méconnaîtraient les objectifs fixés par les points 1, 2 et 3 de l'annexe III de la directive du Conseil des Communautés Européennes du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, il résulte tant de l'ensemble des dispositions de ce décret que de celles qui figurent au code de l'urbanisme, notamment en matière de règles d'utilisation du sol, et au code de l'expropriation pour cause d'utilité publique que les objectifs fixés aux trois points susmentionnés par la directive du 27 juin 1985 ne sont pas méconnus ; que, par suite, l'exception d'illégalité du décret du 12 octobre 1977 opposée par les requérants n'est pas fondée ;
Considérant, en second lieu, que l'étude d'impact indique que la Société Nationale des Chemins de Fer Français s'est engagée à respecter, en ce qui concerne les nuisances sonores, certains seuils maxima qui sont clairement précisés et calculés selon la méthode habituellement suivie en la matière ; qu'elle n'était pas tenue, dans le dossier de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, de décrire le détail des mesures à prendre pour atteindre cet objectif ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte du dossier d'enquête que l'étude d'impact qui y était jointe contenait l'ensemble des informations requises par l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 précité ;
Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la composition et du fonctionnement de la commission d'enquête :
Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. Dreyfus, président de la commission d'enquête, du fait des fonctions qu'il avait antérieurement exercées ou de la mission d'expert qu'il avait reçue des sociétés "Eurotunnel" et "Transmanche Luck" afin d'arbitrer les éventuels litiges susceptibles de naître entre ces deux sociétés, ait eu un intérêt dans la réalisation de l'ouvrage qui n'offrait pas toutes les garanties d'indépendance nécessaires ; que la présence dans la commission de M. Y..., ingénieur à la direction départementale de l'agriculture du Val-de-Marne, service qui n'est ni maître d'oeuvre ni maître d'ouvrage ni susceptible d'assurer le contrle de l'opération projetée, ne saurait entacher d'irrégularité la composition de ladite commission ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte du rapport qu'elle a établi et qui comporte régulièrement les deux parties prévues par la réglementation, que la commission d'enquête n'a pas été influencée par le communiqué du Premier ministre en date du 3 août 1988, qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, était dépourvu d'effet juridique ;
Considérant, en troisième lieu, que la commission n'avait pas à faire état des pétitions ou d'opinions, dont d'ailleurs certains de ses membres avaient effectivement eu connaissance, qui ne lui étaient pas destinées et qui ne lui avaient pas été adressées ;
Sur le moyen tiré de l'absence de l'avis du préfet du Nord :
Considérant qu'il résulte du procès-verbal de la conférence d'instruction mixte à l'échelon central que le préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, préfet du Nord a émis un avis sur l'opération ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
Sur le moyen tiré de la consultation du Haut-Comité à l'environnement :
Considérant que le Haut-Comité à l'environnement, lorsqu'il a examiné le projet contesté, le 15 septembre 1989, était présidé par le délégué à la qualité de la vie ; qu'en l'absence de dispositions fixant les modalités de sa suppléance, le secrétaire d'Etat, président de ce comité, pouvait régulièrement être suppléé par ce haut fonctionnaire ;
Considérant qu'en application de l'arrêté du Premier ministre du 6 mai 1988, les membres nommés comme "personnalité exerçant un mandat électif" pouvaient être remplacés par leurs suppléants ; que, dès lors, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le quorum était atteint et le Haut-Comité pouvait délibérer valablement ; qu'il résulte du compte rendu de la réunion que le Haut-Comité a eu une connaissance exacte et complète du projet et a pu en délibérer ; qu'il n'est pas établi que le ministre de l'environnement n'ait pas eu connaissance exacte de cet avis et de la position adoptée par les membres du comité ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article L.300-1 du code de l'urbanisme :
Considérant que le projet du TGV-Nord ne constitue pas une opération d'aménagement au sens du deuxième alinéa de l'article L.300-1 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, le moyen invoqué est inopérant ;
Sur le moyen tiré de l'incompatibilité du décret attaqué avec le plan d'occupation des sols de Seclin :
Considérant que le plan d'occupation des sols de la commune de Seclin applicable au moment de la décision avait été révisé en 1985 pour tenir compte du passage ultérieur de la ligne nouvelle du TGV-Nord ; que la circonstance que le tracé retenu comporte un passage au-dessus de l'autoroute A1 alors que les documents graphiques annexés au plan d'occupation des sols de la ville de Seclin prévoyaient un passage sous cette autoroute, ne révèle pas une incompatibilité entre ce plan d'occupation des sols et le décret attaqué ;
Sur le moyen tiré de l'absence d'utilité publique :
Considérant qu'une opération ne peut être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet du TGV-Nord a pour objet de réaliser une liaison rapide entre Paris, Lille, Londres et Bruxelles, qu'il s'inscrit dans un cadre plus général visant à faciliter les liaisons entre les métropoles du Nord de l'Europe, à améliorer l'aménagement du territoire et notamment la desserte de l'agglomération lilloise ; que ce projet revêt un caractère d'utilité publique ; qu'eu égard tant à l'importance de l'opération qu'aux précautions prises, et notamment en matière de mesures compensant les nuisances sonores, les inconvénients de toute nature que présente le projet retenu, ne peuvent être regardés comme excessifs par rapport à l'intérêt que l'opération présente ; que, dès lors, ni ces inconvénients, ni le coût de l'ouvrage ne sont de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique ;
Sur le tracé retenu :
Considérant que si les requérants soutiennent que d'autres tracés auraient offert les mêmes avantages que le tracé retenu par le décret attaqué, au prix d'inconvénients moindres ou à un coût équivalent pour le pétitionnaire compte tenu d'une participation éventuelle des collectivités locales concernées et qu'ainsi auraient été commise une erreur manifeste d'appréciation et méconnu un principe d'égalité entre les collectivités publiques, il n'appartient pas au Conseil d'Etat, statuant au Contentieux, d'apprécier l'opportunité du tracé retenu et par là, de se prononcer sur les perspectives de développement des collectivités publiques non desservies par ce tracé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaqué ; que dès lors, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution, les requêtes doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 1er du décret susvisé du 2 décembre 1988 et de condamner l'Etat à payer aux collectivités et associations requérantes les sommes qu'elles demandent sous les n° 111 677, 111 820 et 111 821, au titre des sommes exposées par elles et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Les interventions du "Groupement de défense du TGV par Amiens" et de la ville d'Erquinghem-Lys sont admises.
Article 2 : Les requêtes n° 111 677 de la ville d'Amiens et autres, n° 111 820 de la ville de Seclin, 111 821 de la ville de Lambersart et autres et 111 834 de l'association Menschen Lyk Wider sont rejetées.