Vu la requête, enregistrée le 21 mars 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION GENERALE DES SALARIES DES ORGANISATIONS AGRICOLES ET DE L'AGRO-ALIMENTAIRE (FGSOA), dont le siège social est ... ; la fédération demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 26 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 16 mai 1989 par laquelle le ministre de l'agriculture et de la forêt a confirmé la décision du 16 novembre 1988 de l'inspecteur du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole du département de l'Ain autorisant le licenciement par la société d'intérêt collectif agricole de Bechanne de MM. Philippe X... et Jean-Pierre Y..., représentants du personnel et ce pour motif économique ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Kessler, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'agriculture et de la forêt :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L. 425-1 du code du travail, en ce qui concerne les délégués du personnel, titulaire ou suppléant, et de l'article L. 436-1 dudit code, en ce qui concerne les membres titulaires et suppléants des comités d'entreprise, que tout licenciement envisagé par l'employeur de ces salariés est obligatoirement soumis pour avis au comité d'entreprise et qu'il ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; qu'en vertu de ces dispositions, ces salariés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'u ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la Société d'Intérêt Collectif Agricole de Béchanne a connu entre 1985 et 1988 de graves difficultés financières ; qu'elle a, pour faire face à ces difficultés, décidé de restructurer son entreprise en supprimant 9 postes de salariés dont 4 salariés protégés ; qu'elle a supprimé le service "élevage de poules" où travaillait M. Y... et un des postes du service livraison où travaillait M. X... ; qu'ainsi la réalité du motif économique du licenciement de MM. Y... et X... ne peut être sérieusement contestée ;
Considérant que l'entreprise ne pouvait, à la date à laquelle elle a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier MM. Y... et X..., reclasser les intéressés en son sein, aucun poste n'étant alors vacant ;
Considérant que la discrimination alléguée par les requérants ne ressort pas des pièces du dossier ; que contrairement à ce qu'ils allèguent l'ordre dans lequel il a été procédé aux licenciements ne manifeste aucune manoeuvre destinée à licencier en priorité des représentants syndicaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le ministre de l'agriculture et de la forêt a confirmé la décision du 16 novembre 1988 de l'inspecteur du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole du département de l'Ain autorisant le licenciement de MM. Y... et X... ;
Article 1er : La requête de la FEDERATION GENERALE DES SALARIES DES ORGANISATIONS AGRICOLES ET DE L'AGRO-ALIMENTAIRE (FGSOA) est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION GENERALE DES SALARIES DES ORGANISATIONS AGRICOLES ET DE L'AGRO-ALIMENTAIRE (FGSOA), à la Société d'Intérêt Collectif Agricole de Bechanne, à MM. Y... et X... et au ministre de l'agriculture et de la forêt.