Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 30 mai, 2 juillet et 24 septembre 1984, présentés pour Mlle Kim Dung X..., titulaire d'une officine pharmaceutique, demeurant ... ; Mlle X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler une décision en date du 17 avril 1984, par laquelle le conseil national de l'ordre des pharmaciens a maintenu la peine d'interdiction d'exercer la pharmacie pendant six mois, prononcée à son encontre par le conseil régional d'Ile-de-France ;
2°) d'ordonner le sursis à exécution de cette décision du conseil national de l'ordre des pharmaciens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Kessler, Maître des requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de Mlle Kim Dung X... et de la SCP Célice, Blancpain, avocat du Conseil national de l'ordre des pharmaciens,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, que si aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ratifiée par la France en vertu de la loi du 31 décembre 1973 et publiée au Journal Officiel par décret du 3 mai 1974 : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle", les juridictions disciplinaires ne statuent pas en matière pénale et ne tranchent pas de contestations sur des droits et obligations de caractère civil ; que, dès lors, les dispositions précitées de l'article 6-1 de la convention européenne susvisée ne leur sont pas applicables ; qu'aucun principe général du droit n'impose la publicité des débats dans le cas où une juridiction statue en matière disciplinaire ; qu'il suit de là que Mlle X... n'est pas fondée à soutenir que la décision de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins, prise, après que les débats aient eu lieu, conformément à l'article 26 du décret du 26 octobre 1948, en audience non publique, serait intervenue dans des conditions irrégulières ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article R.5015-34 du code de la santé publique : "Sont interdits ... 5°- Toute facilité accordée à quiconque se livre à l'exercice illégal de la pharmacie" ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment du rapport d'inspection du pharmacien, inspecteur régional de la santé, en date du 29 janvier 1982 qu'en jugeant que Mlle X..., titulaire d'une officine de pharmacie ..., a facilité l'aprovisionnement, le stockage et la vente de médicaments par la société dite "Sipar" dont elle était co-gérante et qui se présentait comme grossiste à l'exportation sans disposer à l'époque de l'autorisation prévue à cet effet par l'article L. 598 du code, le conseil national de l'ordre des pharmaciens ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts, non plus qu'en jugeant que certains des médicaments ainsi délivrés contenant des substances vénéneuses, étaient délivrés sans que fussent respectées les dispositions des articles R.5171, R.5173 et R.5177 du code précité qui subordonnent la vente de tels médicaments à la présentation d'une ordonnance émanant d'un praticien habilité et à l'accomplissement de diverses formalités ; que c'est dès lors par une exacte application des dispositions susmentionnées du code de la santé publique que le conseil national de l'ordre des pharmaciens a jugé que les faits établis à l'encontre de Mlle X... présentaient le caractère de fautes professionnelles de nature à justifier une sanction disciplinaire ;
Considérant enfin que l'appréciation à laquelle se livre le conseil national pour appliquer une sanction déterminée, compte tenu de la gravité des faits reprochés à l'intéressé, n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le conseil national de l'ordre des pharmaciens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la sanction que lui avait infligée le conseil régional de l'Ile-de-France ;
Article 1er : La requête de Mlle X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle X..., au conseil national de l'ordre des pharmaciens et au ministre délégué à la santé.