Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 17 octobre 1989 et 12 juillet 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE, dont le siège est chez M. Serge X..., Rouvroy (02100) Saint-Quentin, représenté par son président en exercice ; le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 août 1989 par lequel le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement et de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs autorise la tenderie aux vanneaux dans le département des Ardennes ;
2°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention du 19 mars 1902 relative à la préservation des oiseaux utiles à l'agriculture ;
Vu la directive communautaire n° 79/409/CEE relative à la conservation des oiseaux sauvages ;
Vu le code rural et notamment son article 373 ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Savoie, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs :
Considérant que l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs a intérêt au maintien de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant que, par l'arrêté attaqué, le secrétaire d'Etat chargé de l'environnement autorise la capture des vanneaux huppés et des pluviers dorés à l'aide de filets à nappes fixés à terre, dénommée "tenderie aux vanneaux", dans diverses communes du département des Ardennes ;
Considérant, d'une part, que les vanneaux huppés et les pluviers dorés ne sont pas des oiseaux utiles à l'agriculture au sens des stipulations de la convention pour la protection des oiseaux utiles à l'agriculture, signée le 19 mars 1902 à Paris ; que, dès lors que le moyen tiré de la violation de l'article 3 de ladite convention ne saurait être utilement invoqué à l'appui d'un recours contre l'arrêté attaqué ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 373 du code rural : "Dans le temps où la chasse est ouverte, le permis donne à celui qui l'a obtenu le droit de chasser de jour, soit à tir, soit à courre, à cor et à cri, soit au vol, suivant les distinctions établies par des arrêtés du ministre de l'agriculture, sur ses propres terres et sur les terres d'autrui avec le consentement decelui à qui le droit de chasse appartient. Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la chasse de certains oiseaux de passage en petites quantités, le ministre chargé de la chasse autorise, dans les conditions qu'il détermine, l'utilisation des modes et moyens de chasse consacrés par les usages traditionnels, dérogatoires à ceux autorisés par l'alinéa précédent. Tous les autres moyens de chasse, y compris l'avion et l'automobile, même comme moyens de rabat, sont formellement prohibés" ; que l'arrêté attaqué qui autorise la chasse aux filets, laquelle est une chasse traditionnelle, de deux espèces d'oiseaux, prévoit notamment une période de chasse réglementée, institue un régime spécifique d'autorisation pour toute personne souhaitant utiliser les filets et fait obligation de relacher tout gibier autre que celui dont la chasse est autorisée lorsqu'il a été capturé accidentellement ; que dans ces conditions, l'arrêté attaqué ne contrevient pas aux dispositions précitées du code rural, lesquelles sont compatibles avec les objectifs définis par la directive du conseil des communautés européennes du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ;
Considérant, enfin, qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature : "Lorsqu'un intérêt scientifique particulier ou que les nécessités de la préservation du patrimoine biologique national justifient la conservation d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées, sont interdits : La destruction ou l'enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat" ;
Considérant que l'arrêté attaqué prévoit que tout gibier capturé accidentellement n'appartenant pas aux espèces dont la chasse est autorisée, doit être relâché immédiatement ; qu'ainsi, ledit arrêté ne méconnaît pas les dispositions de la loi du 10 juillet 1976 et notamment son article 3 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 17 août 1989 attaqué ;
Article 1er : L'intervention de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs est admise.
Article 2 : La requête du RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE, à l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs et au ministre de l'environnement.