Vu 1°) sous le n° 85 469 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 mars 1987 et 13 mai 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour 1°) la Fédération nationale de l'énergie C.G.T., demeurant ... à Pantin Cedex (93507), 2°) M. Gilbert A..., administrateur de Gaz de France, demeurant ..., 3°) M. Patrice B..., administrateur de Gaz de France, demeurant ..., 4°) M. Henri D..., administrateur de Gaz de France, demeurant ..., 5°) Mme Danièle X..., administrateur d'Electricité de France, demeurant ..., 6)° M. Bernard Z..., administrateur d'Electricité de France, demeurant ..., 7°) M. Jean-Paul F..., administrateur d'Electricité de France, demeurant ..., 8°) M. Marc E..., salarié du Gaz de France, demeurant 2 Cité Lagrange à Saint-André (59350), 9°) M. Gilbert BOISSIN, salarié d'Electricité de France, demeurant ..., Loire-sur-Rhône (69700), 10°) M. André C..., agent EDF-GDF, demeurant 155, rue du Château des Rentiers à Paris (75013) ; les requérants demandent l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 30 décembre 1986 portant fixation de l'intérêt et de l'acompte sur dividende dus à l'Etat en 1986 par Electricité de France et Gaz de France au titre des dotations en capital qui leur ont été consenties ;
Vu 2°), sous le n° 85 470, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 2 mars et le 13 mai 1987, présentés pour 1°) la Fédération nationale de l'énergie C.G.T., demeurant ... à Pantin Cedex (93507), 2°) M. Gilbert A..., administrateur de Gaz de France, demeurant ..., 3°) M. Patrice B..., administrateur de Gaz de France, demeurant ..., 4°) M. Henri D..., administrateur de Gaz de France, demeurant ..., 5°) Mme Danièle X..., administrateur d'Electricité de France, demeurant ..., 6)° M. Bernard Z..., administrateur d'Electricité de France, demeurant ..., 7°) M. Jean-Paul F..., administrateur d'Electricité de France, demeurant ..., 8°) M. Marc E..., salarié du Gaz de France, demeurant 2 Cité Lagrange à Saint-André (59350), 9°) M. Gilbert BOISSIN, salarié d'Electricité de France, demeurant ..., Loire-sur-Rhône (69700), 10°) M. André C..., agent EDF-GDF, demeurant 155, rue du Château des Rentiers à Paris (75013) ; les requérants demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 86-1360 1986 relatif aux dotations en capital attribuées à Electricité de France et Gaz de France ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 ;
Vu la loi n° 48-1268 du 17 août 1948 ;
Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 ;
Vu le décret n° 56-493 du 14 mai 1956 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Même, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la Fédération nationale de l'énergie C.G.T. et de la SCP Coutard, Mayer, avocat de d'Electricité de France et de Gaz de France,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées de la Fédération nationale de l'énergie et autres présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la régularité de la procédure :
Considérant que le décret et l'arrêté attaqués, qui concernent les règles applicables à l'intérêt et au dividende auxquels donnent lieu, en vertu du décret susvisé du 14 mai 1956, les dotations en capital consenties par l'Etat à Electricité de France et à Gaz de France, se bornent à édicter des mesures relatives aux relations financières entre l'Etat, Electricité de France et Gaz de France ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à prétendre que les actes attaqués auraient dû, en vertu de l'article 45 de la loi du 8 avril 1946 susvisé, être précédés de l'avis du conseil supérieur de l'électricité et du gaz ;
Sur le moyen tiré de l'incompétence des auteurs du décret et de l'arrêté attaqués :
Considérant que le décret du 14 mai 1956, pris en vertu de l'habilitation donnée par le législateur au pouvoir réglementaire par la loi du 17 août 1948 a prévu que des dotations de l'Etat pourront compléter le capital d'Electricité de France et celui de Gaz de France et que ces dotations donneraient lieu à l'attribution au profit de l'Etat d'un intérêt et d'un dividende prélevé par priorité sur les bénéfices nets de chaque exercice ;
Considérant qu'en prévoyant que le dividende pourrait faire l'objet de versement d'acomptes déterminés sur la base des résultats des comptes prévisionnels, en supprimant le taux global maximum de l'intérêt et du dividende et en fixant le taux maximum des intérêts dus à l'Etat à raison des dotations en capital, le décret attaqué n'a pas porté atteinte aux règles constitutives d'Electricité de France et de Gaz de France ni à l'autonomie de ces établissements publics, telles qu'elles ont été définies par la loi susmentionnée du 8 avril 1946 et notamment son article 4, complété par le décret du 14 mai 1956 ; qu'ainsi le décret attaqué n'est pas entaché d'incompétence ; qu'il en est de même de l'arrêté attaqué qui détermine, pour l'année 1986, le taux de l'intérêt dû à l'Etat, et les montants d'acompte sur dividende ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance de la loi du 8 avril 1946 :
Considérant, en premier lieu, que l'article 4 de la loi du 8 avril 1946 dispose que les services d'Electricité de France et de Gaz de France "suivent pour leur gestion financière et comptable les règles en usage dans les sociétés industrielles et commerciales ..." ; que ces règles ne peuvent s'appliquer que dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec les dispositions de nature législative applicables à Electricité de France et à Gaz de France ; qu'en prévoyant la rémunération des dotations en capital apportées par l'Etat à ces établissements publics sous forme d'intérêt et de dividende dont le taux et le montant sont fixés par arrêté interministériel, le décret du 14 mai 1956, pris ainsi qu'il a été dit ci-dessus, sur habilitation du législateur, a nécessairement dérogé à celles des règles en usage dans les sociétés industrielles et commerciales, qui concernent la distribution de dividendes aux associés ; que par suite les dispositions de l'article 347 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés ne sauraient être appliquées à Electricité de France et à Gaz de France ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à invoquer la méconnaissance par le décret et l'arrêté attaqués de l'article 4 de la loi du 8 avril 1946 ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'article 16 de ladite loi dispose que "le solde net des biens, droits et obligations transférés aux établissements publics prévus par la présente loi constitue le capital de l'établissement. Ce capital appartient à la Nation. Il est inaliénable et, en cas de pertes d'exploitation, il doit être reconstitué sur les résultats des exercices ultérieurs" ; que les dotations en capital sont, en vertu de l'article 1er du décret susmentionné du 14 mai 1956, soumises aux règles fixées par l'article 16 ; que le versement d'acomptes sur dividende déterminés sur la base des résultats des comptes provisionnels et destinés à être régularisés, une fois connus les résultats définitifs de l'exercice, ne constitue pas un prélèvement sur le capital et ne porte pas atteinte à l'intégrité de celui-ci ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à invoquer la méconnaissance par le décret et l'arrêté attaqués de l'article 16 de la loi du 8 avril 1946 ;
Considérant, en troisième lieu, que les requérants invoquent la méconnaissance par le décret et l'arrêté attaqués des dispositions de l'article 32 de la même loi aux termes desquelles "... Les bénéfices réalisés par Electricité de France et Gaz de France sont versés à un compte ouvert dans leurs comptabilités respectives et dénommés fonds national du développement, soit de l'électricité, soit du gaz ..." ; que le prélèvement du dividende par priorité sur les bénéfices nets de chaque exercice a été prévu non par les décisions attaquées mais par le décret du 14 mai 1956 qui a lui-même prévu cette dérogation expresse à l'article 32 précité ; qu'ainsi le moyen susénoncé ne saurait être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le décret et l'arrêté attaqués sont entachés d'excès de pouvoir ;
Article 1er : Les requêtes n°s 85 469 et 85 470 de la Fédération nationale de l'énergie C.G.T. et autres sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération nationale de l'énergie, à MM. Gilbert A..., Patrice B..., Henri D..., Mme Danièle X..., MM. Bernard Z..., Jean-Paul F..., Marc E..., Gilbert Y... et André C..., à Electricité de France et Gaz de France, au ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur et au ministre du budget.