Vu 1°), sous le n° 137322, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 mai 1992 et 7 septembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES (74230) représentée par son maire en exercice dûment mandaté à cet effet ; la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 mars 1992 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de la Haute-Savoie, annulé l'arrêté du 10 juillet 1991 par lequel le maire de Villards-sur-Thones a autorisé la SA VINYCE à construire une station-service au lieu-dit "les Pezzils" ;
2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement susvisé du tribunal administratif de Grenoble en date du 3 mars 1992 ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 20 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu 2°), sous le n° 137321, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 mai 1992 et 7 septembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA VINYCE dont le siège social est à Villards-sur-Thones (74230) Les Pezzils ; la SA VINYCE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 mars 1992 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de la Haute-Savoie, annulé l'arrêté du 10 juillet 1991 par lequel le maire de Villards-sur-Thones a autorisé la SA VINYCE à construire une station-service au lieu-dit "les Pezzils" ;
2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement susvisé du tribunal administratif de Grenoble en date du 3 mars 1992 ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 20 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;
Vu la loi n° 90-1260 du 31 décembre 1990 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Valérie Roux, Auditeur,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de S.A. VINYCE INTERMARCHE, Entreprise indépendante et de la commune des Villards-sur-Thones,
- les conclusions de M. Fratacci, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de la S.A. VINYCE INTERMARCHE et de la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte de l'examen du déféré soumis au tribunal administratif de Grenoble que le préfet de la Haute-Savoie soulevait un moyen tiré de la violation par l'arrêté attaqué de celles des dispositions de la loi du 27 décembre 1973 qui sont relatives aux projets comportant la création dans une commune de moins de 40 000 habitants d'établissements de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 m2 et qui exigent la délivrance d'une autorisation d'urbanisme commercial avant l'octroi d'un permis de construire ; qu'ainsi, en se fondant sur une méconnaissance des articles 29 et 29-1 de ladite loi, applicables aux faits de l'espèce, le tribunal administratif n'a pas retenu un moyen qui ne lui aurait pas été soumis ;
Sur la recevabilité du déféré du préfet de la Haute-Savoie devant le tribunal administratif :
Considérant que, par courrier du 10 septembre 1991, le préfet de la HauteSavoie a demandé au maire de Villards-sur-Thones le retrait de l'arrêté du 10 juillet 1991 accordant à la S.A. VINYCE un permis de construire une station-service au lieu-dit "les Pezzils" ; que la lettre de refus du maire est parvenue à la préfecture le 30 septembre 1991 ; que le déféré tendant à l'annulation de cet arrêté et de cette décision a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Grenoble le 29 novembre 1991 ; que, dès lors, c'est à bon droit que ce déféré a été déclaré recevable par les premiers juges ;
Sur la légalité interne du permis de construire :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 29 de la loi d'orientation du commerce et de l'artisanat du 27 décembre 1973, dont les termes sont repris à l'article L.451-5 du code de l'urbanisme, sont soumis à autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial préalablement à l'octroi du permis de construire, dans les communes dont la population est inférieure à 40 000 habitants, les projets de constructions nouvelles entrainant création de magasins de commerce de détail d'une surface de plancher hors oeuvre supérieure à 2 000 m2, ou d'une surface de vente supérieure à 1 000 m2 ; que l'article 29-1 de ladite loi, dans sa rédaction issue de la loi du 31 décembre 1990, dispose que : "Pour la détermination des seuils de superficie prévus au 1° de l'article 29 ci-dessus, il est tenu compte de tous les magasins de commerce de détail qui font partie ou sont destinés à faire partie d'un même ensemble commercial. Sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins qui sont réunis sur un même site et qui : 1° soit ont été conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier, que celle-ci soit réalisée en une ou en plusieurs tranches ; 2° soit bénéficient d'aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l'accès des divers établissements ; 3° soit font l'objet d'une gestion commune de certains éléments de leur exploitation, notamment par la création de services collectifs ou l'utilisation habituelle de pratiques et de publicités commerciales communes ; 4° soit sont réunis par une structure juridique commune, contrôlée directement ou indirectement par au moins un associé, exerçant sur elle une influence au sens de l'article 357-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ou ayant un dirigeant de droit ou de fait commun" ;
Considérant que par arrêté en date du 10 juillet 1991 le maire de Villards-surThones a accordé à la SA VINYCE un permis de construire une station-service d'une superficie de 84,50 m2 au voisinage immédiat d'un supermarché d'une surface de vente de 999 m2, dont la construction avait été autorisée par un permis de construire en date du 7 mars 1991 ; qu'il résulte des pièces du dossier que si le permis de construire la station-service a été accordé à la SA VINYCE tandis que le permis de construire le supermarché a été délivré à la société en nom collectif Norminter, cette dernière société agissait pour le compte de la SA VINYCE ; qu'ainsi les établissements en cause, qui sont réunis sur un même site, et disposent d'une publicité, d'une enseigne et d'aménagements de voirie communs, devaient, au regard de l'un au moins des critères prévus par le dernier alinéa précité de l'article 29-1, être regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial ; que, par suite, pour la détermination du seuil de superficie susmentionné, les surfaces de vente de ces deux commerces devaient être comptabilisées ensemble ; que, dès lors, leur superficie totale étant supérieure à 1 000 m2, le permis de construire délivré le 10 juillet 1991 était entaché d'illégalité faute d'avoir été précédé de l'autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial prévue par l'article L.451-5 du code de l'urbanisme ;Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA VINYCE INTERMARCHE et la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté susvisé du maire de cette commune en date du 10 juillet 1991 ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens" ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer les sommes que la SA VINYCE INTERMARCHE et la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de la SA VINYCE INTERMARCHE et de la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SA VINYCE INTERMARCHE, à la COMMUNE DE VILLARDS-SUR-THONES et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.