Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 décembre 1989 et 23 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing, dont le siège est ... ; la Chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 26 octobre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a, d'une part, annulé le jugement en date du 26 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné la Compagnie des signaux et d'entreprises électriques (CSEE) à lui verser la somme de 236 625,44 F avec intérêts de droit à compter du 11 mars 1982, en réparation des désordres affectant les candélabres installés sur la zone industrielle de Seclin (Nord), d'autre part, rejeté sa demande tendant à la condamnation de ladite compagnie à lui verser la somme de 845 810,12 F avec intérêts de droit capitalisés ;
2°) de condamner solidairement la Compagnie de signaux et d'entreprises électriques (CSEE) et l'Etat à lui verser la somme de 845 810,12 F avec intérêts de droit capitalisés ;
3°) subsidiairement, d'annuler ou de déclarer nul et non avenu l'une ou l'autre des deux décisions rendues respectivement le 6 novembre 1980 par le tribunal administratif de Lille et le 26 octobre 1989 par la cour administrative d'appel de Nancy ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Fombeur, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la Chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing et de la SCP Guiguet, Bachellier, de la Varde, avocat de la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier soumis au juge du fond que, par un jugement du 6 novembre 1980, devenu définitif, le tribunal administratif de Lille a rejeté la requête présentée par la ville de Seclin tendant à la condamnation conjointe et solidaire de la Chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing, de la Compagnie des signaux et d'entreprises électriques et de l'Etat à réparer le préjudice résultant des désordres affectant les candélabres installés sur la zone industrielle de ladite commune, en se fondant sur le motif, qui constitue le support nécessaire du dispositif, que le maître de l'ouvrage était la chambre de commerce et d'industrie et que, par suite, la ville n'avait pas qualité pour intenter l'action tendant à la mise en jeu de la responsabilité décennale des constructeurs ; que, par un second jugement en date du 26 juin 1986, le tribunal administratif de Lille s'est fondé sur l'autorité de la chose jugée par son jugement du 6 novembre 1980 pour déclarer recevable, en qualité de maître de l'ouvrage, la chambre de commerce et d'industrie à introduire une action en responsabilité décennale dirigée contre l'Etat et la Compagnie des signaux et d'entreprises électriques et tendant à la réparation du même préjudice ;
Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Nancy a relevé que la chambre de commerce et d'industrie était codéfendeur dans l'instance à laquelle a mis fin le jugement précité du 6 novembre 1980, alors que c'est en tant que demandeur qu'elle avait ensuite intenté une action en réparation du même préjudice contre la Compagnie des signaux et d'entreprises électriques et l'Etat ; que la cour administrative en a déduit que la chambre de commerce et d'industrie n'agissait pas en la même qualité dans la première et dans la deuxième instance et que l'autorité de la chose jugée par le premier jugement ne pouvait dès lors être invoquée à son encontre dans la nouvelle procédure ;
Considérant qu'en statuant ainsi, alors que l'autorité relative de la chose jugée peut être invoquée à l'encontre de toutes les personnes qui ont été partie en la même qualité dans l'instance ayant donné lieu à la décision passée en force de chose jugée, quelle qu'ait été leur situation dans cette instance, la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que dès lors, la Chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing est fondée à demander l'annulation de cet arrêt ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy ;
Article 1er : L'arrêt en date du 26 octobre 1989 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Nancy.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing, à la Compagnie de signaux et d'entreprises électriques, à la ville de Seclin, au président de la cour administrative d'appel de Nancy et au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme.