Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 mars 1992 et 24 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Catherine X... demeurant au lieu-dit "Les Grands Champs", route de Vesenex à Divonne-les-Bains (01220) ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 26 décembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de M. et Mme Y..., annulé la décision du 26 août 1985 par laquelle le maire de Théoule-sur-Mer a décidé la modification de la limite parcellaire entre les lots n°s 21 et 22 du lotissement "Rocs et Mimosas" ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme Y... devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) de condamner les époux Y... à lui verser la somme de 8 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme, notamment ses articles L. 315-1 et suivants ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Daussun, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de Mme X... et de la SCP Lesourd, Baudin, avocat de M. et Mme André Y...,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention de M. X... :
Considérant que M. X... ayant la qualité de partie au litige devant le tribunal administratif, son intervention formée le 24 juillet 1992 doit être regardée comme un appel ; que cet appel, formé plus de deux mois après la notification qui lui a été faite du jugement du tribunal administratif, est tardif et par suite irrecevable ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 315-42 et R. 315-47 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction applicable au présent litige, les actes portant modification des documents d'un lotissement doivent faire l'objet, d'une part, d'un affichage en mairie, d'autre part, d'un affichage sur le terrain ; que le délai de recours contre ces actes ne court qu'à compter de l'accomplissement de ces deux mesures de publicité ; qu'il n'est pas contesté que si la décision du 26 août 1985 du maire de Théoule-sur-Mer modifiant les documents du lotissement "Rocs et Mimosas" a fait l'objet d'un affichage en mairie, elle n'a fait l'objet d'aucun affichage sur le terrain concerné ; que, dès lors, aucune tardiveté ne peut être opposée à la demande de M. et Mme Y... ;
Sur la légalité de la décision du 26 août 1985 :
Considérant que M. et Mme Y... ont demandé au tribunal administratif de Nice l'annulation de la décision du 26 août 1985 par laquelle le maire de Théoule-sur-Mer a rectifié la limite séparative du lot dont ils sont propriétaires dans le lotissement "Rocs et Mimosas" à Théoule et du lot voisin appartenant à M. X... et à sa soeur, Mme X... ; que cette décision, qui trouve sa base légale dans les dispositions des articles L. 315-1 et suivants du code de l'urbanisme, ne pouvait être regardée comme constituant une emprise irrégulière sur la propriété de M. et Mme Y... ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé, pour ce motif, cette décision ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les moyens soulevés par M. et Mme Y... devant le tribunal administratif ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 315-3 du code de l'urbanisme : "Lorsque les deux tiers des propriétaires détenant ensemble les trois quarts au moins de lasuperficie d'un lotissement ou les trois quarts des propriétaires détenant au moins les deux tiers de ladite superficie le demandent ou l'acceptent, l'autorité compétente peut prononcer la modification de tout ou partie des documents, et notamment du cahier des charges concernant ce lotissement, lorsque cette modification est compatible avec la réglementation d'urbanisme applicable au secteur où se trouve situé le terrain" ;
Considérant que si les dispositions précitées autorisent le maire de Théoule-sur-Mer à modifier les documents du lotissement Rocs et Mimosas et notamment le plan parcellaire de celui-ci, elles lui font obligation de s'assurer, avant de prendre une telle décision, que tous les colotis, et, notamment, ceux dont les parcelles sont susceptibles d'être modifiées, ont été informés de la modification projetée de manière à faire valoir leurs droits ; qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que M. et Mme Y... aient été invités à donner leur avis ou même informés de la modification sollicitée par les consorts X... et adoptée par la décision en litige ; qu'il suit de là que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande de première instance, cette décision a été prise à la suite d'une procédure irrégulière ; que Mme X... n'est, par suite, pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a annulée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. et Mme Y... qui ne sont pas dans la présente instance, la partie perdante, soient condamnés à verser à Mme X... la somme qu'elle demande à ce titre ;
Article 1er : L'intervention de M. X... n'est pas admise.
Article 2 : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Catherine X..., à M. et Mme André Y..., à M. Jean-Michel X..., à la commune de Théoule-sur-Mer et au ministre de l'intérieur.