Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 30 août et 30 décembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme QUITTERIE des X..., demeurant Bateau "Alea Jacta Est", ... ; Mme QUITTERIE des X... demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 29 juin 1993 de la cour administrative d'appel de Paris qui a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 2 avril 1992, par lequel le tribunal administratif de Paris, sur déféré du procès-verbal de contravention de grande voirie, l'a condamnée à évacuer son bateau de l'ensemble du domaine public fluvial, sous peine d'astreinte de 500 F par jour, et à une amende de 1 200 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 ;
Vu le code du domaine public et de la navigation intérieure ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Medvedowsky, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de Mme QUITTERIE des X... et de Me Foussard, avocat de l'établissement public "Les Voies navigables de France",
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne les conclusions relatives à l'amende :
Considérant que l'article 6 de la loi du 3 août 1995, portant amnistie, dispose que : "Sont amnistiées les contraventions de grande voirie lorsqu'elles ont été commises avant le 18 mai 1995" ; que l'infraction pour laquelle un procès-verbal a été dressé à l'encontre de Mme QUITTERIE des X..., entre dans les prévisions de cette disposition ; qu'il ressort des termes mêmes de l'article 17 de la loi du 3 août 1995, que le bénéfice de l'amnistie des contraventions de grande voirie n'est subordonné à aucune condition relative au paiement de l'amende à laquelle le contrevenant a été ou sera personnellement et définitivement condamné ; qu'ainsi, la condamnation au paiement d'une amende de 1 200 F prononcée à l'encontre de Mme QUITTERIE des X... doit être regardée comme amnistiée ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de Mme QUITTERIE des X... qui tendent à l'annulation de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Paris, en tant que celle-ci ne l'a pas déchargée de cette amende ;
En ce qui concerne les conclusions relatives à la réparation de l'atteinte portée au domaine :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 13 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procèsverbal de contravention ..., le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procèsverbal ... avec citation à comparaître dans le délai d'un mois devant le tribunal administratif" ; que la copie du procès-verbal du 26 mai 1989, dressé à l'encontre de Mme QUITTERIE des X... pour stationnement irrégulier de son bateau sur la Seine à la hauteur du Bois de Boulogne, ne lui a pas été notifiée dans le délai de 10 jours prévu à l'article L. 13 précité ; que, toutefois, il ne résulte pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cette notification tardive ait porté atteinte aux droits de la défense ; que, par suite, en jugeant que la procédure suivie n'avait pas été viciée par le non-respect du délai de dix jours prévu par l'article L. 13, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant qu'aux termes de l'article 29 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure : "Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial. Le contrevenant sera passible d'une amende de 6 000 F à 120 000 F (60 à 1 200 F), de la confiscation de l'objet constituant l'obstacle et du remboursement des frais d'enlèvement d'office par l'administration." ;
Considérant que le fait, par le propriétaire d'un bateau de le laisser stationner sans autorisation sur le domaine public fluvial est constitutif d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article 29 précité ; qu'ainsi, en se fondant sur cette disposition pour condamner Mme QUITTERIE des X..., sous peine d'astreinte de 500 F par jour, à évacuer son bateau du domaine public fluvial, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant que Mme QUITTERIE des X... n'était titulaire d'aucune autorisation de stationnement sur le domaine public fluvial ; que dans ces conditions, il appartenait au juge administratif, non seulement de la condamner à enlever son bateau de l'emplacement qu'elle occupait irrégulièrement, mais aussi de lui interdire de le faire stationner sur le domaine public fluvial dans son ensemble ; qu'ainsi, en prononçant une telle condamnation, la cour administrative d'appel n'a pas statué au-delà des conclusions dont elle était saisie ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner Mme QUITTERIE des X..., par application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, à payer à l'établissement public "Voies navigables de France" la somme de 12 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme QUITTERIE des X..., en tant qu'elles tendent à la décharge de l'amende pour contravention de grande voirie à laquelle elle avait été condamnée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme QUITTERIE des X... est rejeté.
Article 3 : Mme QUITTERIE des X... paiera une somme de 12 000 F à l'établissement public "Voies navigables de France", en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme QUITTERIE des X..., à l'établissement public "Voies navigables de France", au préfet de Paris et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.