Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 septembre 1994 et 20 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE N.R.J. dont le siège est ... (75783), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège ; la SOCIETE N.R.J. demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 29 mars 1994 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a autorisé la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion (CLT) à acquérir par l'intermédiaire de la société "France Audiovision Presse", sa filiale, 66 % du capital de la société Finvest, elle-même détentrice de la totalité des actions de la société SERC qui exploite la station Fun Radio et la décision implicite du Conseil rejetant son recours gracieux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Thiellay, Auditeur,
- les observations de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de la SOCIETE N.R.J. et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion,
- les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par la décision attaquée en date du 29 mars 1994, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a autorisé la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion (CLT) à acquérir par l'intermédiaire de sa filiale "France Audiovision Presse", 66 % du capital de la société Finvest, elle-même détentrice de la totalité des actions de la société SERC qui exploite la station Fun radio ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion :
Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, dans sa rédaction résultant de la loi du 1er février 1994 : "Une même personne physique ou morale ne peut, sur le fondement d'autorisations relatives à l'usage de fréquences dont elle est titulaire pour la diffusion d'un ou de plusieurs services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre, ou par le moyen d'un programme qu'elle fournit à d'autres titulaires d'autorisation, disposer en droit ou en fait de plusieurs réseaux que dans la mesure où la somme des populations recensées dans les zones desservies par ces différents réseaux n'excède pas 150 millions d'habitants" ;
Considérant, d'une part, que le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a pas méconnu ces dispositions en autorisant la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion à effectuer l'acquisition dont s'agit, dès lors qu'il est constant que la somme des populations desservies par les réseaux dont dispose ainsi cette société n'excède pas 150 millions d'habitants ;
Considérant, d'autre part, que la circonstance que, sous l'empire des dispositions alors en vigueur de l'article 41 de la loi du 30 septembre 1986 dans sa rédaction antérieure à la loi du 1er février 1994 fixant à 15 millions le nombre maximum d'habitants pouvant être desservi en vertu d'autorisations accordées à une même personne physique ou morale, le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait le 27 avril 1993, autorisé la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion à détenir 34 % des actions de la société Finvest à la condition qu'elle réduise à 25 % sa participation dans le capital de la radio M40 et que la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion n'a pas respecté ce dernier engagement, est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, qui s'apprécie au regard des dispositions précitées de l'article 41 en vigueur à la date du 29 mars 1994 ;
Considérant que si la SOCIETE N.R.J. invoque la méconnaissance des règles normales de la concurrence et la violation des dispositions de l'ordonnance susvisée du 1er décembre 1986, elle n'apporte, à l'appui de cette allégation, aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant, enfin, que la circonstance, invoquée par la requérante, selonlaquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel aurait, postérieurement à la décision attaquée, refusé l'agrément que sollicitait la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion aux fins de contrôle de la totalité du capital de la station M40 est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE N.R.J. n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 29 mars 1994 ;
Sur les conclusions de la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner la SOCIETE N.R.J. à payer à la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE N.R.J. est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE N.R.J. versera à la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion la somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE N.R.J., à la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion et au ministre de la culture et de la communication.