Vu, enregistré le 19 février 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le jugement du 29 janvier 1998 par lequel le tribunal administratif de Rennes, avant de statuer sur la demande de M. François de X... tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1984 à 1986, ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis, a décidé, par application des dispositions de l'article 12 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, portant réforme du contentieux administratif, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante : l'annulation, quel qu'en soit le motif, par la Cour de cassation, de la décision de l'autorité judiciaire autorisant des agents de l'administration fiscale à effectuer une visite dans les locaux d'une personne morale et à saisir des documents se rapportant à des agissements mentionnés à l'article L. 16B du livre des procédures fiscales, est-elle de nature à affecter la valeur probante des documents saisis et à exclure leur utilisation pour justifier le bien-fondé de redressements opérés à l'égard d'un dirigeant de ladite personne morale et, dans le cas d'une société à responsabilité limitée, de son dirigeant ?
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les articles 57-11 à 57-13 ajoutés au décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, notamment son article 12 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Ainsi que l'a dit le Conseil d'Etat dans l'avis n° 174244 qu'il a rendu le 1er mars 1996, l'annulation par l'autorité judiciaire d'une opération de visite ou de saisie menée à l'encontre d'une personne morale en application des dispositions de l'article 94 de la loi du 29 décembre 1984, codifiées à l'article L. 16B du livre des procédures fiscales, si elle interdit désormais à l'administration d'opposer à celle-ci les informations recueillies à cette occasion, ne fait pas obstacle à ce que l'administration, dans une procédure d'imposition distincte concernant un autre contribuable, se fonde sur les faits révélés par l'opération annulée pour établir l'imposition de ce dernier. Il en va toutefois autrement lorsqu'il ressort de la demande d'autorisation de visite et de saisie adressée au juge par l'administration que celle-ci cherche à obtenir, par la visite et la saisie, même si ces opérations ne visent pas des lieux dont le contribuable a personnellement la disposition, des éléments lui permettant d'apporter la preuve des agissements de l'intéressé pour éluder l'impôt. Dans cette hypothèse, l'annulation de la visite ou de la saisie par l'autorité judiciaire fait obstacle à ce que des informations recueillies à l'occasion de la visite ou de la saisie soient opposées par l'administration à ce contribuable. Tel est le cas, lorsque l'administration a demandé l'autorisation de visiter les locaux d'une société en vue de vérifier, notamment, les indices qu'elle détient sur les agissements d'un dirigeant de la société.
Dans le cas d'une procédure suivie indépendamment de la procédure annulée, cette annulation ne prive pas, par elle-même, de valeur probante les pièces obtenues par l'administration au cours de la visite ou de la saisie.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Rennes, à M. François de X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.