Vu, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 octobre 1993, le recours présenté par le MINISTRE CHARGE DU BUDGET, tendant à ce que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 7 juillet 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé l'article 1er du jugement du 2 décembre 1991 du tribunal administratif de Nantes :
1°) a limité à la somme de 72 926 F pour la période du 1er juillet 1982 au 31 janvier 1983 le montant de la taxe sur la valeur ajoutée remis à la charge de la Société d'économie mixte de construction de La Roche-sur-Yon (SEMYON) et rejeté le surplus des conclusions de son recours tendant à ce que soient mises à la charge de cette société les sommes de 394 952 F et 239 456 F, correspondant aux compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle avait été assujettie au titre respectivement des exercices 1979-1980 et 1981-1982 et dont le tribunal administratif lui a accordé décharge ;
2°) a condamné l'Etat à payer à la société anonyme Semyon une somme de 3 000 F, au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, modifiée par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Salat-Baroux, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la S.A. Semyon,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : "Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel" ; que le 1) de l'article 266 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au cours de la période d'imposition concernée par le présent litige, que la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée "est constituée : a) pour les livraisons de biens et les prestations de services, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir en contrepartie de la livraison ou de la prestation ..." ; que cette dernière disposition a été prise pour l'adaptation de la législation nationale à l'article 11 A-1 de la 6ème directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, selon lequel "la base d'imposition est constituée : a) pour les livraisons de biens et les prestations de services ... par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les subventions versées, pour la période du 1er janvier 1979 au 30 juin 1982, par la ville de La Roche-sur-Yon à la Société d'économie mixte de construction de La Roche-sur-Yon (SEMYON), qui avait pour activité la mise en oeuvre d'actions d'urbanisme et de construction, étaient destinées à compenser les pertes résultant d'erreurs commises dans la conception et l'exécution de programme de logements, de retards de commercialisation et d'insuffisances de gestion, qu'elles ne correspondaient pas à des prestations de services individualisées, fournies par la Société d'économie mixte de construction de La Roche-sur-Yon à la ville, et que leur octroi n'était lié à aucun engagement de la société quant aux prix de vente des logements ou au niveau des loyers ; qu'en déduisant de ces faits, qu'elle a souverainement constatés, que ces subventions n'avaient pas de lien direct avec les avantages qui pouvaient résulter pour la ville de l'activité de la société et qu'elles ne constituaient la contrepartie directe d'aucun engagement qu'aurait pris la société envers la ville, de sorte qu'elles ne devaient pas être comprises dans les bases d'imposition de la société à la taxe sur la valeur ajoutée, la cour administrative d'appel de Nantes n'a commis aucune erreur de droit dans l'application des dispositions précitées du code général des impôts ; que le MINISTRE CHARGE DU BUDGET n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l'Etat à payer à la société Semyon une somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE CHARGE DU BUDGET est rejeté.
Article 2 : L'Etat paiera à la société SEMYON une somme de 15 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à la société SEMYON.