Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 novembre 1994 et 28 mars 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour MM. Jean-Claude et Alain X..., demeurant à Bethon (51260) Anglure ; MM. X... demandent au Conseil d'Etat l'annulation du jugement en date du 27 septembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aube du 6 février 1992 refusant à M. Alain X... l'autorisation d'exploiter 19 ha 95 ares 47 de terres sises à Villeneuve au Chatelot et Perigny La Rose, ensemble l'annulation de l'arrêté préfectoral précité du 6 février 1992 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Arnoult, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Vuitton, avocat de MM. Jean-Claude et Alain X...,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'agriculture et la pêche :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du préfet de l'Aube refusant à M. Alain X... l'autorisation d'exploiter 19 hectares 95 ares 47 centiares de terres a été notifié à ce dernier le 7 février 1992 ; que, le recours de MM. X... contre cet arrêté ayant été enregistré le 8 avril 1992 au greffe du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne, dans les délais du recours contentieux, les conclusions du préfet de l'Aube fondées sur la tardiveté de la requête ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de l'Aube du 6 février 1992 :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 188-2-1 du code rural, dans sa rédaction résultant de la loi du 23 janvier 1990, en vigueur à la date de l'arrêté du préfet de l'Aube du 6 février 1992 : "Sont soumises à autorisation préalable les opérations ci-après : 1° Les agrandissements ou réunions d'exploitations agricoles qui ont pour effet de porter la superficie de l'exploitation qui en résulte au-delà du seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures agricoles. Ce seuil doit être compris entre deux et quatre fois la surface minimum d'installation" ; qu'il résulte de ces dispositions que ne sont pas soumis à autorisation les agrandissements ayant pour conséquence d'augmenter la superficie d'une exploitation agricole déjà supérieure à ce seuil, fixé à 70 hectares par le schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aube ; que, dès lors, M. Alain X..., qui exploitait déjà une surface supérieure au seuil précité de 70 hectares, n'était pas tenu, au titre de l'article 188-2-1 du code rural précité, de solliciter une autorisation pour l'opération projetée ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 188-2-II du code rural alors en vigueur : "Sont également soumises à autorisation préalable, quelles que soient les superficies en cause, les opérations ci-après : ... 2° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles ayant pour conséquence : a) De supprimer une exploitation agricole d'une superficie au moins égale à deux fois la surface minimum d'installation ou de ramener la superficie d'une exploitation agricole en deça de ce seuil" ; qu'il résulte de ces dispositions que ne sont pas soumis à autorisation les agrandissements ayant pour conséquence de réduire la superficie d'une exploitation agricole déjà inférieure à deux fois la surface minimum d'installation ; que, par suite, M. Alain X... n'était pas tenu de solliciter une autorisation pour une opération qui retirait des terres à une exploitation de 57 hectares, inférieure au seuil de 70 hectares résultant des dispositions du schéma directeur départemental ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. Jean-Claude et Alain X... sont fondés à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 27 septembre 1994 et de l'arrêté précité du préfet de l'Aube en date du 6 février 1992 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 27 septembre 1994, ensemble l'arrêté du préfet de l'Aube en date du 6 février 1992 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. Jean-Claude et Alain X..., à Mme Y... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.