Vu la requête enregistrée le 29 décembre 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme X..., demeurant ... ; Mme X... demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 3 mai 1991, notifiée le 13 novembre 1997, par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité lui a notifié le décret du 18 avril 1991 lui refusant l'acquisition de la nationalité française ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la nationalité française ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Ribadeau Dumas, Auditeur,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code de la nationalité française en vigueur à la date de la décision attaquée : "Le gouvernement peut s'opposer, par décret en Conseil d'Etat, à l'acquisition de la nationalité française dans le délai d'un an à compter de la date prévue au deuxième alinéa de l'article 106 pour indignité ou défaut d'assimilation" ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 106 du même code : "Le délai d'opposition court à compter de la date du récépissé prévu à l'article 105, deuxième alinéa ( ...)" ;
Considérant que Mme X... a souscrit le 10 avril 1990, sur le fondement des dispositions de l'article 37-1 du code de la nationalité française alors applicables, une déclaration en vue d'acquérir la nationalité française, dont il lui a été donné récépissé le 19 avril 1990 ; qu'un décret portant opposition à l'acquisition de la nationalité française par l'intéressée a été pris le 18 avril 1991, mais, faute d'avoir été notifié, n'a pas produit d'effet ; que toutefois, par lettre du 3 mai 1991, notifiée le 13 novembre 1997, le ministre chargé des naturalisations a entendu notifier à Mme X... le décret d'opposition signé le 18 avril 1991 ;
Considérant qu'eu égard au délai anormalement long et non imputable à Mme X... écoulé depuis la signature du décret du 18 avril 1991, ce décret n'était plus susceptible d'être notifié ; qu'ainsi, la lettre du 3 mai 1991 doit être regardée comme ayant notifié à Mme X... une nouvelle décision d'opposition qui lui fait par elle-même grief ; que cette nouvelle décision ne satisfaisant pas aux conditions relatives notamment au délai, auxquelles la loi subordonne la faculté d'opposition à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger d'un Français, Mme X... est fondée à en demander l'annulation ;
Article 1er : La décision contenue dans la lettre du ministre des affaires sociales et de la solidarité du 3 mai 1991 est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., épouse Y... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.