Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Yacouta X..., demeurant ..., bâtiment 2, appartement 88 à Toulouse (31400) ; Mme X... demande au Conseil d'Etat ;
1°) d'annuler le jugement du 31 octobre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 26 octobre 1998 du préfet de la Haute-Garonne ordonnant sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision préfectorale du même jour fixant le pays de renvoi ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces deux décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par les lois des 2 août 1989, 10 janvier 1990 et 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Gendreau-Massaloux, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, "le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité tunisienne, qui s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 26 novembre 1997, de la décision du préfet de la Haute-Garonne en date du 21 novembre 1997 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire, entrait dans le cas visé au 3 du I de l'article 22 de l'ordonnance précitée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la décision de reconduite :
Considérant que l'arrêté attaqué, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision de reconduite à la frontière, est suffisamment motivé ;
Considérant que, si Mme X... souffre d'une affection chronique, il ne ressort pas des pièces du dossier que les soins qui lui sont nécessaires ne peuvent être dispensés qu'en France, et qu'en particulier elle ne puisse bénéficier en Tunisie d'un suivi médical approprié ; que la modicité des ressources de M. X... et les difficultés éventuelles de prise en charge des dépenses médicales effectuées en Tunisie sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ; que, par suite, le préfet de la Haute-Garonne a pu légalement, sans méconnaître les dispositions de l'article 25-8° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction issue du 11 mai 1998, ordonner la reconduite à la frontière de Mme X... ; qu'il n'a pas davantage commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté de reconduite sur la situation personnelle de Mme X... ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que si Mme X..., entrée en France en 1994, assiste son époux qui réside régulièrement sur le territoire français et souffre de problèmes de santé, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour de Mme X... en France, ainsi que de la circonstance que les enfants de M. et Mme X... résident en Tunisie, l'arrêté préfectoral attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision, distincte de l'arrêté de reconduite, fixant la Tunisie comme pays de destination, Mme X... ne produit aucun élément faisant obstacle à sa reconduite à destination du pays dont elle a la nationalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Yacouta X..., au préfet de la HauteGaronne et au ministre de l'intérieur.