Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 avril 1997 et 1er août 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la VILLE DE TOULON, représentée par son maire en exercice dûment habilité à cet effet par une délibération du conseil municipal ; la VILLE DE TOULON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 4 février 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, à la demande de M. et Mme Jean-Marie X..., après avoir annulé le jugement du 18 janvier 1996 du tribunal administratif de Nice, a annulé l'arrêté du 18 avril 1995 du préfet du Var déclarant cessibles des terrains sur les territoires des communes de Cabasse, Carcès et Vins-sur-Caramy au profit de la VILLE DE TOULON ;
2°) de condamner M. et Mme X... à payer à la VILLE DE TOULON la somme de 12 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le décret n° 89-3 du 3 janvier 1989 modifié ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lambron, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la VILLE DE TOULON,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Lyon, saisie par M. et Mme X... d'un appel contre un jugement du 18 janvier 1996 du tribunal administratif de Nice, a annulé ce jugement et l'arrêté du 18 avril 1995 du préfet du Var déclarant cessibles des terrains sur les territoires des communes de Cabasse, Carcès et Vins-sur-Caramy au profit de la VILLE DE TOULON ;
Sur la régularité de l'arrêt attaqué :
Considérant que la cour administrative d'appel, en relevant que l'avis favorable que la commission d'enquête avait émis sur le projet de création des périmètres de protection immédiate et rapprochée de la retenue de Carcès, de la Fontaine d'Ajonc et de la prise sur l'Issole, utilisée pour l'alimentation d'eau potable de l'agglomération toulonnaise, était assorti de propositions tendant à la modification des limites entre les divers périmètres de protection et de certaines prescriptions accompagnant leur mise en oeuvre, et en estimant que de telles propositions devaient par suite être analysées comme des réserves conditionnant les conclusions de la commission d'enquête, a donné à son arrêt une motivation suffisante ;
Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 11-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : "L'utilité publique est déclarée par décret en Conseil d'Etat. Si au vu des avis émis, les conclusions du commissaire ou de la commission chargée de l'enquête sont favorables, l'utilité publique pourra cependant être déclarée par arrêté ministériel ou par arrêté préfectoral" ;
Considérant qu'en regardant les propositions contenues dans l'avis favorable que la commission d'enquête a émis sur le projet de création des périmètres de protection immédiate et rapprochée de la retenue de Carcès, de la Fontaine d'Ajonc et de la prise sur l'Issole, dont il était instamment recommandé à l'administration de tenir compte, comme des réserves conditionnant l'avis favorable de la commission d'enquête, la cour s'est livrée, sans les dénaturer, à une appréciation souveraine des faits qui n'est pas susceptible d'être remise en cause devant le juge de cassation ; qu'après avoir constaté que, si l'administration avait pris diverses mesures pour limiter les inconvénients de l'expropriation en ce qui concerne les propriétaires riverains de l'Issole, cette circonstance ne pouvait être regardée comme constituant la levée des réservesémises par la commission d'enquête, la cour a pu légalement en déduire que, l'avis de la commission d'enquête ne pouvant être regardé comme favorable, M. et Mme X... étaient fondés à exciper de l'illégalité résultant de l'incompétence de l'auteur de la déclaration d'utilité publique prononcée par le préfet du Var le 3 juillet 1992 pour demander l'annulation de l'arrêté du 18 avril 1995 par lequel ledit préfet a déclaré cessibles au profit de la VILLE DE TOULON les terrains nécessaires au projet ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 20 du code de la santé publique : "En vue d'assurer la protection de la qualité des eaux, l'acte portant déclaration d'utilité publique des travaux de prélèvement d'eau destinée à l'alimentation des collectivités humaines détermine autour du point de prélèvement un périmètre de protection immédiate dont les terrains sont à acquérir en pleine propriété, un périmètre de protection rapprochée à l'intérieur duquel peuvent être interdits ou réglementés toutes activités et tous dépôts ou installations de nature à nuire directement ou indirectement à la qualité des eaux et, le cas échéant, un périmètre de protection éloigné à l'intérieur duquel peuvent être réglementés les activités, installations et dépôts ci-dessus visés./ Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de l'alinéa précédent ( ...)" ; qu'aux termes de l'article 4 du décret susvisé du 3 janvier 1989 dans sa rédaction alors en vigueur : "L'utilisation d'eau prélevée dans le milieu naturel en vue de la consommation humaine est autorisée par arrêté du préfet, pris après avis du conseil départemental d'hygiène ( ...)" ; que selon l'article 5 du même décret : "La procédure d'instruction de la demande d'autorisation prévue à l'article 4 comporte l'avis de l'hydrogéologue agréé en matière d'hygiène publique sur les disponibilités en eau et les mesures de protection à mettre en place ( ...)" ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la VILLE DE TOULON, les dispositions précitées de l'article L. 20 du code de la santé publique et du décret du 3 janvier 1989 n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que, dans le cadre de la procédure préalable à la déclaration d'utilité publique, la commission d'enquête émette des réserves sur les mesures de protection prévues par le projet soumis à enquête ; qu'en se fondant sur l'existence de telles réserves pour constater l'illégalité de l'acte portant déclaration d'utilité publique, la cour administrative n'a pas méconnu les dispositions législatives et réglementaires relatives à la protection des eaux destinées à la consommation humaine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la VILLE DE TOULON n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. et Mme X..., qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, soient condamnés à verser à la VILLE DE TOULON la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la VILLE DE TOULON est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE TOULON, à M. et Mme JeanMarie X... et au ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.