Vu la requête enregistrée le 13 mars 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, tendant à l'annulation de l'arrêt n° 96PA00173 du 30 décembre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a accordé à la société anonyme R.D. Promotion la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1986 et 1987 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Belliard, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société anonyme R.D. Promotion,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 44 quater du code général des impôts : "Les entreprises créées du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1986, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions prévues ... au III de l'article 44 bis, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices industriels ou commerciaux qu'elles réalisent à compter de la date de leur création jusqu'au terme du trente-cinquième mois suivant celui au cours duquel cette création est intervenue. Les bénéfices réalisés au cours des vingt-quatre mois suivant la période d'exonération précitée ne sont retenus dans les bases de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de leur montant ..." ; qu'aux termes du III de l'article 44 bis du même code : " ... les entreprises créées dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes, ou pour la reprise de telles activités ne peuvent bénéficier de l'abattement ci-dessus ..." ;
Considérant que pour annuler le jugement par lequel le tribunal administratif de Paris avait refusé à la société anonyme R.D. Promotion le bénéfice des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts pour les exercices clos en 1986 et 1987, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que l'administration avait estimé à tort que cette société qui, selon son objet social, exerce l'activité de promoteur immobilier, avait été créée pour la reprise des activités de la SCI Reinhardt Diaz, dès lors que l'activité exercée par cette dernière ne pouvait être qualifiée d'activité de promotion immobilière, la condition d'habitude exigée par l'article 35-I-1° du code général des impôts qui vise notamment les personnes qui achètent des biens immeubles en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou en locaux, n'étant pas remplie en l'espèce ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Reinhardt Diaz avait pour objet l'acquisition d'une propriété située rue Diaz et rue Reinhardt à Boulogne-Billancourt et la construction sur ces terrains d'un immeuble collectif à usage professionnel et d'habitation ainsi que la division de cet immeuble en fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance, et généralement toutes opérations quelconques, mobilières, immobilières, se rapportant directement ou indirectement à l'objet social et susceptibles d'en faciliter la réalisation ; que la SCI Reinhardt Diaz a signé le 21 novembre 1985 une promesse de vente de l'immeuble en l'état futur d'achèvement à la société immobilière Batibail ; que la SCI Reinhardt Diaz a été transformée par ses deux associés, par délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 20 janvier 1986, en SARL R.D. Promotion ayant le même siège social et dont ils demeuraient les deux seuls associés ; que la SARL qui avait pour objet social toutes opérations de promotion immobilière et notamment toutes opérations de construction-vente de tous ensembles immobiliers réalisés, le cas échéant, sous couvert de sociétés civiles, a poursuivi sur les terrains acquis par la SCI Reinhardt Diaz qui lui ont été transférés à la suite de la dissolution de la SCI, l'édification de l'immeuble dont le projet de construction et de vente avait été préparé par la SCI ; que la SARL R.D. Promotion au nom de laquelle le permis de construire avait été transféré, a repris les éléments d'exploitation de la société dissoute et s'est substituée à celle-ci dans tous les contrats passés par cette dernière, s'agissant notamment des terrains à bâtir, des financements, de la convention de mandataire délégué conclueentre la SCI et la SA ICAP, aux termes de laquelle cette dernière s'engageait à accomplir toutes opérations nécessaires pour assurer la construction de l'ensemble immobilier, et la promesse de vente consentie à la société Batibail ; que la SARL R.D. Promotion a vendu en bloc l'immeuble en état futur d'achèvement le 13 mars 1986 à la société Investibail, gérée par la société Batibail qui avait été la bénéficiaire de la promesse de vente susmentionnée ;
Considérant que la cour administrative d'appel de Paris n'a pu, sans commettre d'erreur de droit, se borner à juger que l'absence d'identité de l'objet social des deux sociétés tel qu'il ressortait de leurs statuts et le fait que la SCI Reinhardt Diaz ne puisse être regardée comme ayant exercé avant sa dissolution une activité de construction-vente, suffisaient à démontrer l'absence de reprise par la SARL R.D. Promotion d'une activité préexistante, sans rechercher si les conditions de transformation de la SCI Reinhardt Diaz en SARL R.D. Promotion, et la continuité des activités exercées en fait par les deux sociétés n'établissaient pas la réalité de la reprise d'une activité préexistante ; que, par suite, le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL R.D. Promotion a poursuivi et mené à son terme le projet de la SCI Reinhardt Diaz qui consistait à édifier un immeuble et à le vendre en bloc en état futur d'achèvement ; qu'ainsi la transformation de la SCI Reinhardt Diaz en SARL n'est pas, à elle seule, de nature à établir que la SARL R.D. Promotion n'aurait pas été créée pour la reprise de l'activité exercée par la SCI Reinhardt Diaz ; que, par suite, le tribunal administratif de Paris a jugé à bon droit que la société R.D. Promotion, devenue le 1er janvier 1992 la société anonyme R.D. Promotion, ne pouvait pas prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts ;
Sur les conclusions de la société R.D. Promotion tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la société R.D. Promotion la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 30 décembre 1997 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la société R.D. Promotion devant la cour administrative d'appel de Paris sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la société R.D. Promotion tendant à ce que l'Etat lui verse la somme de 12 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SA R.D. Promotion et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.