Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 septembre 1999 et 27 janvier 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU, dont le siège est ..., venant aux droits de la SA Aria ; la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 6 juillet 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 24 janvier 1995 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de la société Aria tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle reste assujettie au titre de la période du 1er octobre 1986 au 17 décembre 1988 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vallée, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU,
- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Analyse et réalisations informatiques angevines (Aria), aux droits de laquelle vient la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er octobre 1986 au 17 décembre 1988 ; qu'à l'issue de cette vérification l'administration fiscale a remis en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des prestations des services informatiques fournies par la SA Aria tant à ses deux actionnaires, la Caisse fédérale du Crédit mutuel agricole et rural d'Anjou et la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU, qu'aux caisses locales du Crédit mutuel de Maine-et-Loire, exonération dont la SA Aria avait cru pouvoir bénéficier au cours de la période considérée sur le fondement de l'article 261 B du code général des impôts ; que la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 juillet 1999 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 24 janvier 1995 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, après lui avoir accordé une réduction de la base d'imposition, rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel la SA Aria a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 1986 au 17 décembre 1988 ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 261 B du code général des impôts, pris pour l'adaptation de la législation nationale à l'article 13 A f) de la 6ème directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 : "Les services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués par des personnes physiques ou morales exerçant une activité exonérée de taxe sur la valeur ajoutée ou pour laquelle elles n'ont pas la qualité d'assujetti, sont exonérés de cette taxe, à la condition qu'ils concourent directement et exclusivement à la réalisation de ces opérations exonérées ou exclues du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et que les sommes réclamées aux adhérents correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes" ;
Considérant qu'un groupement ne perd pas le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 261 B du code général des impôts pour les services rendus à ses membres lorsqu'il rend des services à des personnes non-adhérentes ayant la qualité d'assujetti ou dont l'activité n'est pas exonérée ; que ces dernières prestations sont alors seulement soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions de droit commun ; que, par suite, pour écarter le moyen tiré de ce que la SA Aria constituait elle-même un groupement satisfaisant aux conditions posées par l'article 261 B pour les prestations fournies à ses actionnaires, la cour ne pouvait, sans erreur de droit, se fonder sur ce que la société requérante avait fourni, au cours de la période litigieuse, des prestations au GIE-MAT qui exerçait une activité soumise à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que cette personne morale n'était pas actionnaire de la SA Aria et ne pouvait être regardée comme l'un des adhérents du groupement qu'elle aurait formé ; que, dès lors, l'arrêt attaqué doit être annulé en tant qu'il a rejeté la demande de la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui a été réclamé à la SA Aria au cours de la période considérée ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pendant la période du 1er octobre 1986 au 17 décembre 1988, l'activité de la SA Aria entrait dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et n'était pas exonérée de cette taxe ; que, par suite, la SA Aria ne pouvait constituer, avec ses actionnaires et les caisses locales, un groupement remplissant les conditions posées par l'article 261 B ;
Considérant que si la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU, à laquelle étaient facturées l'intégralité des prestations de services informatiques fournies par la SA Aria, fait valoir qu'elle répartissait les frais entre les différents bénéficiaires de ces prestations, elle n'établit pas que les sommes réclamées aux adhérents correspondaient exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la SA Aria aurait elle-même constitué un groupement satisfaisant aux conditions fixées par l'article 261 B doit, en tout état de cause, être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU n'est pas fondée à soutenir, sur le terrain de la loi fiscale, que les prestations en cause pouvaient bénéficier de l'exonération prévue par l'article 261 B du code général des impôts ;
Considérant que pour soutenir que l'ensemble formé par Aria, les caisses fédérales et les caisses locales du crédit mutuel d'Anjou formait un groupement au sens de cet article, la requérante se prévaut, sur le terrain de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'une part, de deux lettres adressées les 9 mars et 1er août 1979 par le service de la législation fiscale à la Confédération nationale du crédit mutuel, d'autre part, de l'instruction 3 CA-79 du 15 février 1979 et de la note 3 A-6-82 du 16 mars 1982 ;
Considérant, sur le premier point, qu'il ne résulte pas des termes des lettres en cause que le service de la législation fiscale ait entendu prendre formellement position, compte tenu des dispositions de l'article 261 B et de la question qui lui était posée, sur la situation de la SA Aria dont l'activité entrait dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et n'était pas exonérée ;
Considérant, sur le second point, que ni l'instruction du 15 février 1979, ni la note du 16 mars 1982, qui concerne l'hypothèse d'une mise à disposition de locaux par une société à un de ses associés, n'étendent davantage le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 261 B à des groupements rendant des services à l'un de ses membres exerçant une activité entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et non exonérée ;
Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction que l'ensemble des prestations réalisées par la société Aria étaient facturées à la seule CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU ; que l'administration a pu ainsi considérer que la prise en charge par la Caisse fédérale, lors de la fusion-absorption d'Aria le 17 décembre 1988, du déficit d'exploitation de cette société, représentait le règlement des prestations que celle-ci lui avait fournies ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a réintégré ce déficit dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée de la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de sa demande ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 6 juillet 1999 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel la SA Aria a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 1986 au 17 décembre 1988.
Article 2 : La requête de la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU présentée devant la cour administrative d'appel de Nantes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL D'ANJOU et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.