Vu la requête, enregistrée le 21 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 janvier 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 18 janvier 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Y ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Picard, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y, de nationalité turque, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 18 octobre 2001 de la décision du 27 septembre 2001 du PREFET DU VAL-D'OISE lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire national ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la mesure de reconduite :
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme Y a fait valoir qu'entrée en France en septembre 1998, elle a épousé le 20 juillet 2000 un ressortissant turc qui réside régulièrement en France et dont elle a eu deux enfants, nés en France ; que, toutefois, eu égard, d'une part, à la possibilité dont dispose Mme Y de solliciter, pour elle et pour ses enfants, le bénéfice des dispositions relatives au regroupement familial, et d'autre part, aux circonstances de l'espèce, et notamment à la durée de son séjour en France, ainsi qu'à l'existence d'attaches avec son pays où elle a vécu jusqu'à l'âge de 20 ans, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Y devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des circonstances ci-dessus rappelées, l'arrêté contesté soit entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
Considérant que Mme Y, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée, n'apporte aucun élément dont il ressortirait qu'elle court des risques personnels en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement du 30 janvier 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 18 janvier 2002 ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement en date du 30 janvier 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme Y devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à Mme Elif X..., épouse Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.