Vu 1°, sous le n° 203547, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier 1999 et 21 juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Eric X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 29 octobre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé le jugement du 30 janvier 1997 par lequel le tribunal administratif de Montpellier avait annulé l'arrêté du 25 octobre 1995 du président du conseil régional de Languedoc-Roussillon retirant l'arrêté du 30 décembre 1983 prononçant la titularisation de l'intéressé et la décision implicite par laquelle la région a rejeté la demande de régularisation de sa situation présentée le 7 juin 1995 par l'intéressé, et d'autre part, rejeté les conclusions de M. X tendant à l'annulation de l'article 3 dudit jugement ;
Vu 2°, sous le n° 219068, la requête enregistrée le 17 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Eric X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 18 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son recours en rectification d'erreur matérielle de l'arrêté du 29 octobre 1998 par lequel elle a :
1°) annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 30 janvier 1997 en tant que ce jugement a annulé l'arrêté du 25 octobre 1995 par lequel le président du conseil général du Languedoc-Roussillon a retiré son précédent arrêté du 30 décembre 1983 titularisant M. X en qualité d'attaché territorial et la décision implicite de la même autorité rejetant la demande de M. X tendant à la régularisation de sa situation administrative ;
2°) rejeté les conclusions de M. X à la régularisation de sa situation et à son reclassement ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu les notes en délibéré présentées par M. X ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi du 29 juillet 1881 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Delion, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. Eric X et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la région Languedoc-Roussillon,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n° 203547 et n° 219068 sont relatives à la même affaire ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la requête n° 203547 :
Considérant que, par délibération du 16 décembre 1983, le conseil régional du Languedoc-Roussillon a adopté un statut général du personnel de l'établissement public régional ; que, par arrêtés en date du 30 décembre 1983, le président de ce conseil a titularisé à compter du 1er janvier 1984 de nombreux agents contractuels dans des emplois prévus par ce statut, et en particulier M. X ; que la délibération du 16 décembre 1983 ayant été annulée le 14 novembre 1984 par le tribunal administratif de Montpellier, le président du conseil régional a pris le 14 janvier 1986 des arrêtés titularisant à nouveau les intéressés dans les conditions prévues par des délibérations réglementaires en dates du 14 février et du 7 novembre 1985 ; qu'à la demande du préfet de région, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ces arrêtés, par jugement en date du 25 mars 1986 devenu définitif ; que le président du conseil régional a ensuite, en premier lieu, par arrêté du 31 décembre 1987, nommé M. X à compter du 1er janvier 1988 en qualité d'agent contractuel de la région, puis a, en deuxième lieu, par lettre du 25 mars 1988, refusé de l'intégrer en qualité de fonctionnaire territorial et a, en troisième lieu, par arrêté du 7 janvier 1991, licencié M. X pour faute disciplinaire ; que par un arrêté en date du 25 octobre 1995, le président du conseil régional a retiré l'arrêté du 30 décembre 1983 susmentionné ; que par deux décisions successives, l'une implicite résultant du silence gardé sur une demande présentée le 7 juin 1995 par l'intéressé, l'autre explicite contenue dans une lettre du 1er mars 1996 du directeur général des services, la région a refusé de réintégrer M. X en tant que fonctionnaire territorial ;
Considérant que par un jugement en date du 30 janvier 1997, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 25 octobre 1995 susmentionné et la décision implicite résultant du silence gardé sur la demande présentée le 7 juin 1995 en tant qu'elle constitue un refus de régulariser la situation de l'intéressé, et rejeté le surplus des conclusions de M. X ; que saisie en appel, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement en tant qu'il prononçait l'annulation de ces deux décisions et rejeté le surplus des conclusions de M. X ; que M. X se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
Sur les conclusions à fins de non-lieu présentées par la région Languedoc-Roussillon :
Considérant que le litige soulevé par M. X devant la cour administrative d'appel est distinct de celui sur lequel le Conseil d'Etat a statué par sa décision du 26 octobre 2001 ; que par suite, la région n'est pas fondée à soutenir que l'intervention de cette décision aurait privé d'objet la requête de M. X ;
Sur les conclusions du pourvoi :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;
Considérant que la cour a jugé que M. X n'était pas fondé à se prévaloir des droits qu'il estimait tenir de l'arrêté du 30 décembre 1983 dès lors que, par lettre du 16 février 1984 adressée au président du conseil régional dans le délai du recours contentieux, il avait exprimé son refus d'être titularisé et sa volonté de rester contractuel ; qu'il ressort toutefois du dossier soumis aux juges du fond qu'à supposer que cette lettre du 16 février 1984 ait constitué un recours administratif contre l'arrêté du 30 décembre 1983, ce recours n'a pas été accueilli avant que l'intéressé n'y ait renoncé, en entreprenant dès le mois de mars 1985 de faire valoir les droits qu'il estimait tenir du caractère définitif de cet arrêté ; que dès lors, en estimant que M. X s'était opposé à sa titularisation et qu'il avait, pour ce motif, conservé la qualité d'agent contractuel, la cour a dénaturé les pièces du dossier ; que M. X est ainsi fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sur l'appel incident de la région Languedoc-Roussillon :
En ce qui concerne l'arrêté du 25 octobre 1995 du président du conseil régional :
Considérant que la décision du 25 mars 1988 par laquelle la région a refusé de régulariser la situation de M. X a eu pour objet et pour effet de retirer l'arrêté du 30 décembre 1983 prononçant la titularisation de l'intéressé ; que l'arrêté du 25 octobre 1995 par lequel le président du conseil régional a explicitement retiré l'arrêté du 30 décembre 1983, étant purement confirmatif de la décision du 25 mars 1988, n'a pas affecté la situation juridique de M. X ; que les conclusions dirigées contre cet arrêté sont, par suite, irrecevables ; que dès lors, la région Languedoc-Roussillon est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier en a prononcé l'annulation ;
En ce qui concerne le refus implicite opposé à la demande de M. X en date du 7 juin 1995 tendant à ce que sa situation soit régularisée sur le fondement de l'arrêté du 30 décembre 1983 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en application d'une décision du 26 octobre 2001 du Conseil d'Etat statuant au contentieux et ainsi que l'a constaté le Conseil d'Etat statuant au contentieux par sa décision du 12 juillet 2002, la région Languedoc-Roussillon a reconstitué la carrière de M. X et l'a réintégré en tant que fonctionnaire de la région en raison des droits qu'il tenait de l'arrêté du 30 décembre 1983 ; que les conclusions de la région Languedoc-Roussillon tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé la décision implicite par laquelle la région a refusé de régulariser la situation administrative de l'intéressé ont, par suite, perdu leur objet ;
Sur l'appel de M. X :
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la lettre du 1er mars 1996 du directeur général des services de la région Languedoc-Roussillon, en tant que cette décision oppose un refus à la demande de régularisation de la situation de l'intéressé impliquée par l'arrêté du 30 décembre 1983 :
Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la région Languedoc-Roussillon a reconstitué la carrière de M. X et l'a réintégré en tant que fonctionnaire de la région en raison des droits qu'il tenait de l'arrêté du 30 décembre 1983 ; que les conclusions dirigées contre la décision susanalysée ont, par suite, perdu leur objet ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus de la région de réintégrer M. X dans un emploi défini par référence à l'emploi de directeur général adjoint des études financières au conseil général et de secrétaire général de commune de plus de 80 000 habitants, puis dans le cadre d'emplois des administrateurs territoriaux :
Considérant qu'en application de la décision du 26 octobre 2001 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, il incombait à la région, pour régulariser la situation de M. X, de procéder à la reconstitution de carrière de l'intéressé par comparaison avec la progression moyenne des autres agents qu'elle avait titularisés dans le grade d'attaché régional par des arrêtés du 31 décembre 1983 ; qu'il ressort des pièces du dossier que le respect de ces prescriptions devait conduire à la réintégration de M. X dans le cadre d'emplois des attachés territoriaux, ainsi que la région y a procédé par des arrêtés des 7 et 27 février 2002 comme l'a d'ailleurs constaté le Conseil d'Etat statuant au contentieux par sa décision du 7 juillet 2002 ; que les conclusions susanalysées doivent, par suite, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de plusieurs décisions de recrutement opérées par la région depuis l'année 1986 :
Considérant que les décisions contestées ne sont pas désignées avec une précision suffisante par M. X ; que les conclusions dirigées contre elles ne sont, par suite, pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à ce que l'arrêté du 31 décembre 1987 par lequel le président du conseil régional a réintégré M. X en tant qu'agent contractuel soit déclaré faux et inexistant par le juge judiciaire ou à défaut par le juge administratif :
Considérant que, sauf dans le cas où une loi prévoit expressément que les mentions d'un acte administratif font foi jusqu'à inscription de faux, le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires fait obstacle à ce que l'exactitude de ces mentions soit appréciée par un tribunal de l'ordre judiciaire ; qu'il appartient donc à la juridiction administrative d'apprécier l'authenticité de l'arrêté du 31 décembre 1987 susmentionné ; que la circonstance que l'ampliation de cet arrêté reçue par M. X n'aurait pas porté le timbre des services de la préfecture de l'Hérault ne saurait ni suffire à établir que cet arrêté constitue un faux, ni conduire à regarder cet acte comme inexistant ; qu'au demeurant, les conditions dans lesquelles a été notifié et appliqué à M. X cet arrêté concernant sa situation en tant que contractuel sont en tout état de cause sans incidence sur la reconstitution de sa carrière de fonctionnaire titulaire à laquelle la région a régulièrement procédé, en application de la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 26 octobre 2001, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans sa décision du 7 juillet 2002 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que M. X demande qu'il soit enjoint à la région de le réintégrer dans un emploi défini par référence à l'emploi de directeur général adjoint des études financières au conseil général et de secrétaire général de commune de plus de 80 000 habitants, puis dans le cadre d'emploi des administrateurs territoriaux, en conséquence de l'annulation des décisions refusant de le réintégrer dans ces mêmes conditions ; que le rejet, par la présente décision, des conclusions tendant à l'annulation desdites décisions entraîne, par voie de conséquence, le rejet de cette demande d'injonction ;
Sur les conclusions tendant à ce que la juridiction administrative saisisse le Procureur de la République :
Considérant qu'en l'absence de dispositions particulières, il n'appartient pas au Conseil d'Etat dans l'exercice de ses fonctions juridictionnelles de faire application du second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale ;
Sur les conclusions tendant à la suppression des passages des mémoires de la région qui mettraient en cause la dignité de M. X :
Considérant que M. X invoque à l'appui de ses conclusions les dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, qui permettent aux tribunaux, dans les causes dont ils sont saisis, de prononcer la suppression des écrits injurieux, outrageants et diffamatoires ; que les mémoires de la région Languedoc-Roussillon ne comportent pas de passages présentant ces caractères ; que les conclusions de M. X tendant à l'application de ces dispositions doivent par suite être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a, après avoir annulé deux des décisions de la région Languedoc-Roussillon qu'il contestait, rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;
Sur la requête n° 219068 :
Considérant que M. X demande l'annulation de l'arrêt du 18 janvier 2000 de la cour administrative d'appel de Marseille rejetant son recours en rectification d'erreur matérielle dirigé contre l'arrêt du 29 octobre 1998 ; que l'annulation de l'arrêt du 29 octobre 1998 prononcée par la présente décision rend ces conclusions sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de condamner M. X et la région à verser les sommes demandées au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 29 octobre 1998 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 219058.
Article 3 : Le jugement du 30 janvier 1997 du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il annule l'arrêté du 25 octobre 1995 du président du conseil régional de Languedoc-Roussillon.
Article 4 : Les conclusions de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 1995 du président du conseil régional de Languedoc-Roussillon sont rejetées.
Article 5 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le surplus des conclusions présentées en appel par la région Languedoc-Roussillon.
Article 6 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. X tendant à l'annulation de la lettre du 1er mars 1996 du directeur général des services de la région Languedoc-Roussillon, en tant que cette décision oppose un refus à la demande de régularisation de la situation de l'intéressé.
Article 7 : Le surplus des conclusions présentées en appel par M. X est rejeté.
Article 8 : Les conclusions de la région Languedoc-Roussillon tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le surplus des conclusions du pourvoi de M. TERNON sont rejetées.
Article 9 : La présente décision sera notifiée à M. Eric X, à la région Languedoc-Roussillon et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.