Vu la requête, enregistrée le 12 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Robert X, président des tribunaux administratifs de Nouvelle-Calédonie et de Mata-Utu demeurant à ... ; il demande au juge des référés du Conseil d'Etat de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la décision contenue dans les lettres du 5 avril 2004 du secrétaire général du Conseil d'Etat et du 22 avril 2004 du Vice-Président du Conseil d'Etat, refusant de le maintenir en surnombre et sur place pour exercer l'une des fonctions dévolues aux premiers conseillers dans les conditions prévues par les articles L. 233-7 et L. 233-8 du code de justice administrative ;
il soutient qu'il y a urgence eu égard au temps nécessaire pour régler les modalités de son départ en retraite, prévu pour le 5 octobre 2004 ; que la décision litigieuse, qui refuse de le maintenir en surnombre dans la même juridiction mais lui propose une prolongation d'activité au tribunal administratif de Papeete, le contraint de vendre immédiatement la propriété qu'il possède à Nouméa ; qu'il existe, en l'état de l'instruction, plusieurs moyens susceptibles de créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse ; que l'administration gestionnaire a compétence liée pour lui accorder une prolongation sur place en vertu du principe d'inamovibilité prévu à l'article L. 231-3 du code de justice administrative ; que le refus de l'administration, motivé par le fait qu'ayant été chef de juridiction, il ne peut exercer les fonctions de premier conseiller dans le tribunal qu'il a présidé, méconnaît le principe d'égalité de traitement entre les chefs de juridiction et les conseillers ou premiers conseillers et constitue une discrimination illégale ;
Vu les décisions dont la suspension est demandée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2004, présenté par le secrétaire général du Conseil d'Etat ; il tend au rejet de la requête ; il soutient qu'il n'existe pas, en l'état de l'instruction, de doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse ; que les garanties d'indépendance et d'inamovibilité dont jouissent les magistrats administratifs ne créent pas de droit au maintien sur place d'un chef de juridiction affecté en surnombre, au delà de la limite d'âge ; que la décision contestée ne constitue pas une discrimination illégale ; qu'en effet, la différence de traitement contestée découle de l'article L. 233-7 du code de justice administrative ; que la différence de situation entre un chef de juridiction et un conseiller ou un premier conseiller permet, à elle seule, un traitement différent de la demande sans porter atteinte au principe d'égalité ; qu'au surplus, des circonstances particulières tenant à la petite taille des juridictions de Nouvelle-Calédonie et de Mata-Utu, à l'absence de besoin d'effectifs supplémentaires et aux caractéristiques sociologiques propres aux collectivités territoriales d'Outre-Mer justifient, dans l'intérêt du service, que M. X ne soit pas maintenu sur place ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le mardi 25 mai 2004, présenté par M. X ; il reprend les mêmes conclusions et les mêmes moyens ; il ajoute que le mémoire en défense est irrecevable dès lors qu'il n'est pas régulièrement signé et qu'il n'est pas présenté par l'autorité compétente ;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2004 présenté par le secrétaire général du Conseil d'Etat ; il tend au rejet de la requête et soutient que le mémoire enregistré le 19 mai 2004 était régulièrement présenté au nom de l'Etat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. Robert X et, d'autre part, le secrétaire général du Conseil d'Etat ;
Vu le procès verbal de l'audience publique du mercredi 2 juin 2004 à 17 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- M. Robert X ;
- les représentants du secrétariat général du Conseil d'Etat ;
Considérant que la possibilité pour le juge des référés de prononcer, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée à la double condition que l'urgence le justifie et qu'il soit fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 233-7 du code de justice administrative : Les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, lorsqu'ils atteignent la limite d'âge résultant de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, sont, sur leur demande, maintenus en activité, en surnombre, pour exercer l'une des fonctions dévolues aux premiers conseillers pendant une durée de trois ans non renouvelable ;
Considérant que saisi par M. X, président des tribunaux administratifs de Nouvelle Calédonie et de Mata-Utu, d'une demande présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 233-7 du code de justice administrative et tendant à être maintenu sur place en surnombre, à compter du 5 octobre 2004, le Vice-Président du Conseil d'Etat a, par la décision dont la suspension est demandée, rejeté cette demande en tant qu'elle portait sur un maintien en activité dans les juridictions présidées jusqu'à cette date par l'intéressé ;
Considérant que M. X soutient, d'une part, que cette décision méconnaît la portée des dispositions de l'article L. 231-3 du code de justice administrative, aux termes duquel Lorsqu'ils exercent leurs fonctions de magistrats dans une juridiction administrative, les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ne peuvent recevoir, sans leur consentement, une affectation nouvelle, même en avancement et, d'autre part, qu'en entendant traiter de façon différente, pour l'application de l'article L. 233-7, les chefs de juridiction et les autres magistrats du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la décision méconnaît le principe d'égalité entre agents d'un même corps ;
Considérant toutefois que, s'agissant du moyen tiré de l'article L. 231-3, la décision attaquée n'a ni pour objet ni pour effet de prononcer une affectation à laquelle l'intéressé ne consentirait pas et qu'elle ne met d'autre condition à la mise en oeuvre au profit de M. X des dispositions de l'article L. 233-7 que celles tenant à une affectation dans une juridiction autre que celle qu'il présidait antérieurement ; que s'agissant du moyen tiré du principe d'égalité entre agents d'un même corps, il résulte des termes mêmes de l'article L. 233-7 que celui-ci traite de façon différente pour l'application de cet article, les premiers conseillers et les magistrats ayant atteint le grade de président, seuls ces derniers devant changer de fonction ;
Considérant, dans ces conditions, qu'aucun des moyens invoqués par M. X ne paraît en l'état de l'instruction de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision dont la suspension est demandée ; que dès lors et sans qu'il soit besoin de rechercher si la condition de l'article L. 521-1 du code de justice administrative tenant à l'urgence est remplie, la requête doit être rejetée ;
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. Robert X est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Robert X et au secrétaire général du Conseil d'Etat.
Copie en sera adressée pour information au Garde des Sceaux, ministre de la Justice.