Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 janvier et 21 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Philippe X, demeurant ... ; M. et Mme X demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 25 octobre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation du jugement du 22 juin 2000 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion rejetant leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de la Réunion a refusé de faire droit à la demande d'indemnité d'éloignement de Mme X ;
2°) mette à la charge de l'Etat la somme de 2 188 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Salesse, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. et Mme X,
- les conclusions de M. Francis Donnat, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges d'appel que M. et Mme X, professeurs des écoles, ont été affectés simultanément dans l'académie de la Réunion à compter du 1er septembre 1994 ; que si M. X a perçu l'indemnité d'éloignement prévue par l'article 2 du décret du 22 décembre 1953 et qui a pour objet de compenser les sujétions résultant de l'éloignement de métropole des fonctionnaires affectés outre-mer, en revanche la demande de Mme X de pouvoir bénéficier également de cette indemnité a été rejetée ;
Considérant qu'aux termes des dispositions, en vigueur à la date de la décision administrative attaquée, de l'article 8 du décret du 22 décembre 1953 : Dans le cas où un ménage de fonctionnaires de l'Etat est affecté dans un même département d'outre-mer, les deux conjoints ne peuvent cumuler l'indemnité d'éloignement ;
Sur le moyen tiré de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant que si M. et Mme X soutiennent que l'article 8 précité du décret du 22 décembre 1953 méconnaît les articles 8, 12 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen qui n'a pas été soulevé devant les juges du fond et qui n'est pas d'ordre public est irrecevable devant le juge de cassation ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité :
Considérant que les requérants soutiennent que les dispositions de l'article 8 du décret du 22 décembre 1953 ont pour effet de porter une atteinte illégale au principe d'égalité en traitant de façon plus rigoureuse le fonctionnaire marié que celui qui vit en concubinage ;
Considérant qu'une telle différence de traitement ne reposerait sur aucune justification fondée sur la nature de l'indemnité d'éloignement et serait constitutive d'une illégalité ; qu'il y a lieu toutefois, dès lors que ne seront ainsi méconnus ni les intentions des auteurs du texte ni l'objet et le sens de la règle qu'ils ont posée, d'interpréter l'article 8 précité du décret du 22 décembre 1953, compte tenu du changement dans les circonstances survenu depuis sa publication, comme appelant l'application de la règle de non cumul de deux indemnités d'éloignement non seulement aux fonctionnaires mariés mais aussi aux fonctionnaires vivant en concubinage stable et continu ; que ce motif qui répond à une argumentation invoquée devant le juge du fond et ne comporte l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif juridiquement erroné retenu par l'arrêt attaqué pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté attaqué qui est suffisamment motivé ;
Sur les conclusions de M. et Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme X demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Philippe X et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.