Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 avril 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 6 février 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Hilario X ;
2°) de rejeter la demande de M. X devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Stéphane Verclytte, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité philippine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 3 octobre 2002, de l'arrêté du même jour par lequel le PREFET DE POLICE a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré en France en 1996 et y réside depuis auprès de son épouse, compatriote titulaire d'une carte de séjour temporaire vie privée et familiale régulièrement renouvelée depuis 2001 et avec laquelle il a eu trois enfants aujourd'hui majeurs, dont l'un réside également en France ; que l'épouse de M. X a subi deux interventions chirurgicales sérieuses en février et mars 2002 ; que, dans ces circonstances, et alors même que l'intéressé peut bénéficier du regroupement familial, l'arrêté attaqué ordonnant la reconduite à la frontière de M. X a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 16 avril 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 6 février 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;
Sur les conclusions incidentes à fin d'injonction :
Considérant que M. X demande qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer une carte de séjour temporaire ; que si l'annulation de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière rend impossible l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre et impose à l'administration de réexaminer sa demande de titre de séjour, elle n'implique pas par elle-même la délivrance d'un tel titre ; que, par suite, les conclusions de M. X tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE POLICE de lui délivrer une carte de séjour ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros que M. X demande en application de ces dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X sont rejetées.
Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Hilario X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.