Vu la requête, enregistrée le 28 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Christine X, demeurant ... ; Mme X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 9 septembre 2003 par lequel le vice-président délégué du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 12 mars 2002 du maire de Bergheim refusant de lui accorder des congés bonifiés en juillet 2002 et, d'autre part, à ce que soient réservés ses droits à dommages et intérêts et, enfin, à ce que soit mise à la charge de la commune de Bergheim la somme de 1 300 euros qu'elle demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Bergheim la somme de 2 000 euros dont elle réclame le versement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 78-399 du 20 mars 1978 modifié relatif, pour les départements d'outre-mer, à la prise en charge des frais de voyage de congés bonifiés accordés aux magistrats et fonctionnaires civils de l'Etat ;
Vu le décret n° 88-168 du 15 février 1988 pris pour l'application des dispositions du deuxième alinéa du 1° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Marion, Auditeur,
- les observations de Me de Nervo, avocat de Mme X et de la SCP Parmentier, Didier, avocat de la commune de Bergheim,
- les conclusions de M. Francis Donnat, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour déterminer la localisation du centre des intérêts moraux et matériels de Mme X, le vice-président délégué du tribunal administratif de Strasbourg a notamment affirmé qu'il n'est pas contesté que Mme X ne possède aucun bien immobilier à la Réunion alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que l'intéressée a produit un acte notarié en date du 13 février 1990 duquel il résulte qu'elle a hérité de son père, avec sa mère et ses dix frères et soeurs, de terrains situés à la Réunion ; qu'il suit de là que le jugement attaqué est entaché de dénaturation des faits et doit pour ce motif être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles 1er et 4 du décret du 20 mars 1978, rendu applicable aux fonctionnaires territoriaux par le décret du 15 février 1988, que les fonctionnaires qui exercent leurs fonctions sur le territoire européen de la France et dont le lieu de résidence habituelle se situe dans un département d'outre-mer ou dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon peuvent bénéficier, dans les conditions déterminées par le présent décret, de la prise en charge par l'Etat des frais d'un voyage de congé, dit congé bonifié ; qu'aux termes de l'article 3 du décret du 20 mars 1978 : Le lieu de résidence habituelle est le territoire européen de la France ou le département d'outre-mer où se trouve le centre des intérêts moraux et matériels de l'intéressé ;
Considérant que Mme X, née à la Réunion en 1958, y a résidé jusqu'en 1993 ; qu'elle a épousé en 1993 un conjoint né en métropole où le couple vit depuis le 1er janvier 1994 ; qu'un enfant est né de cette union en 1995 ; que la commune de Bergheim a recruté en 1995 Mme X par un contrat à durée déterminée, plusieurs fois renouvelé, avant de la nommer à compter du 1er janvier 1998 agent administratif titulaire à temps complet ; qu'ainsi, en dépit du fait que sa mère ainsi que ses frères et soeurs habitent à la Réunion, où elle possède en copropriété des terrains acquis par héritage, Mme X doit être regardée comme ayant fixé en métropole le centre de ses intérêts moraux et matériels ; qu'elle n'est par suite pas fondée à demander l'annulation de la décision du 12 mars 2002 par laquelle le maire de la commune de Bergheim a refusé pour ce motif de lui accorder le bénéfice d'un congé bonifié ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bergheim, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme X la somme que la commune de Bergheim demande au même titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du vice-président délégué du tribunal administratif de Strasbourg en date du 9 septembre 2003 est annulé.
Article 2 : La demande de Mme X présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme X et la commune de Bergheim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Christine X et à la commune de Bergheim.