Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mai et 13 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Ferdinand X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 15 mars 2004 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire de retraite en vue d'y inclure la bonification d'ancienneté prévue aux articles L. 12 b) et R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;
2°) d'enjoindre à l'Etat de modifier, dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision à intervenir, les conditions dans lesquelles sa pension lui a été concédée et de la revaloriser rétroactivement, à compter de l'entrée en jouissance initiale ;
3°) de décider que les sommes dues porteront intérêt à compter de son recours gracieux, avec capitalisation ;
4°) subsidiairement, de condamner l'Etat à réparer, d'une part, le préjudice résultant pour lui de la privation du supplément de pension auquel le pensionné était en droit de prétendre depuis l'entrée en jouissance de sa pension en lui allouant un capital, augmenté des intérêts de droit à compter du recours gracieux assortis de leur capitalisation, d'autre part, le préjudice résultant de la perte de supplément de la pension en lui allouant une rente ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité de Rome instituant la Communauté européenne ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le décret n° 2001-407 du 7 mai 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Claudie Boiteau, chargée des fonctions de maître des requêtes, rapporteur,
- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : /A tout moment en cas d'erreur matérielle ; /Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère en cas d'erreur de droit (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, ingénieur général de l'armement de 2ème classe, a été admis au bénéfice d'une solde de réserve par arrêté du 6 octobre 1997 du ministre de la défense notifié le même jour ; qu'ainsi, le délai imparti à M. X pour exciper, au soutien d'une demande de révision de sa pension, de l'erreur de droit qu'aurait commise l'administration en ne prenant pas en compte dans les éléments de liquidation de cette pension la bonification d'ancienneté mentionnée au b) de l'article L. 12 du même code était expiré lorsque, le 29 novembre 2002, l'intéressé a saisi le ministre de la défense d'une telle demande ;
Considérant que la circonstance que, statuant sur une question préjudicielle relative à cette bonification d'ancienneté, la Cour de justice des Communautés européennes a rendu, le 29 novembre 2001, un arrêt interprétant une disposition du droit communautaire sans limiter les effets dans le temps de cet arrêt n'affecte pas le droit d'un Etat membre de la Communauté européenne d'opposer aux demandes de révision de pensions établies en violation de cette disposition un délai de forclusion, dès lors que ce délai, mentionné à l'article L. 55 précité du code des pensions civiles et militaires de retraite, s'applique de la même manière aux demandes de révision de pension qui sont fondées sur le droit communautaire et à celles qui sont fondées sur le droit interne ;
Considérant, enfin, que les dispositions de l'article L. 55 précitées ont pour objet d'ouvrir, aussi bien aux pensionnés qu'à l'administration, un droit à révision des pensions concédées dans le cas où la liquidation de celles-ci est entachée d'une erreur de droit et de prévoir que ce droit est ouvert dans les mêmes conditions de délai aux pensionnés et à l'administration ; que, d'une part, le délai de révision ainsi prévu bénéficie aussi bien aux pensionnés, dont les droits à pension sont définitivement acquis au terme de ce délai, qu'à l'administration qui est, postérieurement à l'expiration de ce même délai, mise à l'abri de contestations tardives et que, d'autre part, l'instauration d'un délai d'un an s'avère suffisante pour permettre aux pensionnés de faire valoir utilement leurs droits devant les juridictions ; qu'ainsi, ces dispositions ne méconnaissent ni le droit d'accès à un tribunal, ni le droit à un recours effectif, ni les exigences qui s'attachent à la protection d'un droit patrimonial, tels qu'ils découlent des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier protocole additionnel à cette convention ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la défense, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, ce ministre a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit prescrit à l'administration de réviser sa pension et de la revaloriser de manière rétroactive ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant que, si M. X demande, à titre subsidiaire, la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité correspondant à la revalorisation sollicitée de sa pension, en réparation du préjudice que la privation de cette somme constitue pour lui et au motif que ce préjudice serait imputable au retard apporté par l'Etat français à harmoniser le droit interne avec le principe d'égalité des rémunérations entre fonctionnaires masculins et féminins, ces conclusions ont, en réalité, le même objet que les conclusions pécuniaires tendant à la révision de sa pension et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Ferdinand X et au ministre de la défense.