Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre et 2 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe Y, demeurant ... ; M. Y demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 septembre 2004 rejetant sa protestation tendant à l'annulation des élections cantonales des 21 et 28 mars 2004 en vue de la désignation du conseiller général du canton de Saint-Gervais ;
2°) d'annuler lesdites élections ;
3°) de constater l'inéligibilité de M. X ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Struillou, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Ricard, avocat de M. Y et de la SCP Laugier, Caston, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 741-7 et R. 741-8 du code de justice administrative que, lorsque le président de la formation de jugement exerce les fonctions de rapporteur, la minute du jugement est signée par le rapporteur, par l'assesseur le plus ancien et par le greffier d'audience ; que la minute du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 septembre 2004 comportant ces trois signatures, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions analysées ci-dessus du code électoral manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que le jugement du tribunal administratif de Grenoble ne comporterait pas tous les visas de textes nécessaires n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes des premier et deuxième alinéas de l'article L. 52-1 du code électoral : Pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d'une élection, et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite. / A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin ;
Considérant, en premier lieu, que la période mentionnée par le deuxième alinéa de l'article L. 52-1 commençant le 1er septembre 2003, le grief tiré du contenu des numéros du bulletin municipal de Saint-Gervais publiés avant cette date ne peut être accueilli ;
Considérant, en deuxième lieu, que les n° 4 et 5 du bulletin municipal de Saint-Gervais publiés entre le 1er septembre 2003 et le 8 mars 2004, selon une périodicité identique aux numéros précédents, ne contiennent aucune référence directe ou indirecte à l'élection cantonale à venir et présentent, de manière identique à celle des numéros précédents, la vie municipale, les activités de la commune de Saint-Gervais et les événements qui s'y déroulent ; que la publication de ces bulletins ne peut, dans ces conditions, être regardée comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en troisième lieu, que l'envoi aux abonnés du service des eaux de la commune d'un courrier explicatif, non signé, faisant état des raisons pour lesquelles le prix de la part communale de l'eau et de l'assainissement sera, en 2004, réduit de 50 % ne peut être regardé comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en quatrième lieu, que la manifestation organisée le 13 mars 2004 pour célébrer le 30e anniversaire de la fusion, à compter du 1er janvier 1974, entre la commune de Saint-Gervais et la commune de Saint-Nicolas de Veroce, ne peut, compte tenu de son programme et de la modestie de son coût, être regardée comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en cinquième lieu, que la manifestation d'ouverture de la saison d'hiver, organisée le 19 décembre 2003, s'inscrit dans la continuité de celle organisée le 14 décembre 2002, à une date qui, de manière traditionnelle, marque l'ouverture de la saison de sports d'hiver à la veille des vacances de Noël ; que, dans ces conditions, elle ne peut non plus être regardée comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en sixième lieu, que le bulletin Infos GNPEA, qui contient un court article remerciant le maire de Saint-Gervais pour son intervention et qui n'a pas été adressé aux élus de Saint-Gervais, ne peut, en raison de sa faible diffusion, être regardé comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en septième lieu, que la carte de voeux adressée, pour l'année 2004, par le maire et les membres du conseil municipal de Saint-Gervais, constitue un envoi traditionnel dont le contenu se situe très directement dans le prolongement des cartes adressées les années précédentes et ne contient aucune allusion, ni aux réalisations municipales, ni aux élections cantonales de mars 2004 ; que cet envoi ne peut donc être regardé comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en huitième lieu, que la publication dans le journal Le Dauphiné libéré d'articles relatant les actions de M. X en sa qualité de maire de Saint-Gervais, ne peut, eu égard à son contenu, être regardée comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant, en neuvième lieu, que les griefs relatifs à la lettre adressée, en mars 2004, aux parents d'élèves pour leur faire part de l'allégement du coût du repas scolaire et à la diffusion, sur France 2, de reportages consacrés à M. X sont nouveaux en appel ; qu'ils sont, par suite, irrecevables et ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant, en dixième lieu, d'une part, qu'aucune des publications et manifestations organisées entre le 1er septembre 2003 et les élections cantonales de mars 2004 ne pouvant être regardées comme ayant été engagées ou effectuées en vue de l'élection cantonale, les dépenses qui ont permis de les réaliser n'entrent pas dans le champ d'application de l'article L. 52-12 du code électoral, d'autre part, que le grief tiré de ce que le coût de certaines autres publications diffusées pendant la période allant de mars 2003 à septembre 2003 devrait être intégré dans le compte de campagne n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa protestation dirigée contre les élections cantonales des 21 et 28 mars 2004 ;
Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en l'espèce il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. Y est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe Y, à M. X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.