Vu 1°), sous le n° 266900, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 avril et 13 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE PUBLIQUE SGEN CFDT ; la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE PUBLIQUE SGEN CFDT demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret n° 2004-186 du 26 février 2004 portant création de l'université de technologie en sciences des organisations et de la décision de Paris ;Dauphine ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 266944, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 avril et 27 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'UNION NATIONALE DES ETUDIANTS DE FRANCE (UNEF), dont le siège est ..., et l'UNEF AGE DAUPHINE, dont le siège est ... ; l'UNION NATIONALE DES ETUDIANTS DE FRANCE (UNEF) et l'UNEF AGE DAUPHINE demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret n° 2004 ;186 du 26 février 2004, portant création de l'université de technologie en sciences des organisations et de la décision de Paris ;Dauphine ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale et au recteur de l'académie de Paris de prendre toutes dispositions utiles, afin que les candidats au baccalauréat puissent procéder à leur préinscription à l'université Paris ;Dauphine dans le respect des règles de la sectorisation ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 avril 2005, présentée pour la FEDERATION DES SYNDICATS GENEAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE PUBLIQUE SGEN CFDT ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre-Antoine Molina, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE PUBLIQUE SGEN CFDT et de la SCP Monod, Colin, avocat de l'université Paris ;Dauphine,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de l'UNION NATIONALE DES ETUDIANTS DE FRANCE (UNEF) et de l'UNEF AGE DAUPHINE d'une part, et de la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE CFDT d'autre part, sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et l'université Paris ;Dauphine :
Sur la légalité externe du décret du 26 février 2004 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a été consulté et a rendu son avis le 22 avril 2003 sur le décret du 26 février 2004 qui dote l'université Paris-Dauphine du statut de grand établissement ; que la seule circonstance qu'un projet de réforme du statut des universités de technologie, dont l'adoption était envisagée lorsque le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a été consulté, ait été abandonné entre cette consultation et l'intervention du décret attaqué ne constitue pas un changement de situation de nature à imposer que le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche soit consulté à nouveau ; que si le Gouvernement a, postérieurement à cette consultation, apporté certaines modifications au projet de décret soumis à ce conseil, il ressort des pièces du dossier, et notamment du texte du projet qui lui a été soumis, que le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a été consulté sur la question de la transformation de l'université de Paris ;Dauphine en grand établissement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la consultation de ce conseil aurait été irrégulière doit être écarté ;
Sur la légalité interne du décret du 26 février 2004 :
Sur les moyens dirigés contre l'ensemble des dispositions du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret attaqué : L'université de technologie en sciences des organisations et de la décision de Paris-Dauphine, ci-après désignée université Paris-Dauphine, est un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel auquel s'applique le statut de grand établissement au sens de l'article L. 717-1 du code de l'éducation. Il est soumis aux dispositions de ce même code et des textes pris pour son application, sous réserve des dérogations prévues au présent décret. ;
Considérant qu'en dépit de la dénomination retenue pour le nouvel établissement, ces dispositions lui confèrent le statut de grand établissement, mais n'ont pas eu pour objet et ne sauraient avoir pour effet de lui conférer celui d'université, régi par le chapitre 2 du titre 1er du livre VII du code de l'éducation, ou celui d'université de technologie, prévu à l'article L. 711 ;3 du même code ; qu'ainsi les moyens tirés de ce que le pouvoir réglementaire ne pouvait doter l'université Paris-Dauphine à la fois du statut d'université, d'université de technologie et de grand établissement manquent en fait ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'objectif de valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme ne peut qu'être écarté ;
Considérant que le moyen tiré de ce que le montant des dotations attribuées par l'Etat à l'université Paris ;Dauphine est susceptible d'évoluer, à la suite du changement de statut de l'établissement, est sans influence sur la légalité du décret attaqué ;
Considérant que le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire, ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de confiance légitime est inopérant ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 717 ;1 du code de l'éducation : Des décrets en Conseil d'Etat fixent les règles particulières d'organisation et de fonctionnement des grands établissements dans le respect des principes d'autonomie et de démocratie définis par le présent titre. / Ils peuvent déroger aux dispositions des articles L. 711-1, L. 711-4, L. 711-5, L. 711-7, L. 711-8, L. 714-2, L. 719-1, L. 719-2 à L. 719-5, L. 719-7 à L. 719-11 en fonction des caractéristiques propres de chacun de ces établissements. / Les dispositions des articles L. 712-4, L. 811-5, L. 811-6, L. 952-7 à L. 952-9 sont applicables aux établissements mentionnés au présent article, sous réserve des dérogations fixées par décret en Conseil d'Etat, compte tenu de leurs caractéristiques propres ; qu'en outre, si l'article L. 612 ;3 du même code dispose que le premier cycle universitaire est ouvert à tout titulaire du baccalauréat ou d'une qualification ou expérience équivalente, il prévoit qu'une sélection peut être opérée, notamment pour l'accès aux grands établissements ;
Considérant qu'au regard de ces dispositions le Gouvernement pouvait, sans entacher le décret attaqué d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir, donner à l'université Paris ;Dauphine, transformée en grand établissement, la faculté de sélectionner les étudiants à l'entrée du premier cycle et de délivrer les diplômes propres tout en prévoyant qu'elle demeurerait régie par certaines dispositions applicables aux universités ;
Sur les moyens dirigés contre l'article 5 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret attaqué : Le président de l'université Paris ;Dauphine est élu par l'ensemble des membres des trois conseils réunis en assemblée, à la majorité des membres en exercice de celle ;ci dans les conditions définies à l'article L. 712 ;2 du code de l'éducation et du décret pris pour son application. Il est choisi parmi les enseignants-chercheurs en exercice. Le mandat du président est soumis aux dispositions de l'article L. 712 ;2 du code de l'éducation. ; qu'aux termes de l'article L. 712 ;2 du code de l'éducation : Le président est élu par l'ensemble des membres des trois conseils réunis en une assemblée, à la majorité absolue des membres en exercice de celle ;ci, selon des modalités fixées par décret. Il est choisi parmi les enseignants ;chercheurs permanents, en exercice dans l'université, et de nationalité française. ;
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L. 712 ;2 du code de l'éducation et de l'article 5 du décret attaqué que les fonctions de président de l'université Paris ;Dauphine ne peuvent être exercées que par un enseignant ;chercheur de nationalité française ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'article 5 du décret attaqué méconnaîtrait la règle de la nationalité des fonctionnaires participant directement à l'exercice de prérogatives de puissance publique manque en fait ;
Sur les moyens dirigés contre les articles 7, 9 et 11 du décret attaqué :
Considérant qu'en vertu de l'article 7 du décret attaqué, le conseil d'administration de l'université Paris ;Dauphine comprend treize représentants élus des professeurs des universités et personnels assimilés sur soixante membres en ;dehors du président ; qu'en vertu de l'article 9, le conseil scientifique de l'établissement comprend douze représentants élus des professeurs des universités et personnels assimilés sur trente membres en ;dehors du président ; qu'en vertu de l'article 11, le conseil des études et de la vie universitaire de l'établissement comprend six représentants des élus des professeurs des universités et personnels assimilés sur trente membres en ;dehors du président ;
Considérant que ces dispositions, qui assurent aux professeurs des universités une représentation propre et authentique, ne méconnaissent pas le principe constitutionnel d'indépendance des professeurs des universités ;
Sur les moyens dirigés contre l'article 16 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 711 ;7 du code de l'éducation applicable à l'université Paris ;Dauphine : Les établissements déterminent, par délibérations statutaires prises à la majorité des deux tiers des membres en exercice du conseil d'administration, leurs statuts et leurs structures internes conformément aux dispositions du présent code et des décrets pris pour son application et dans le respect d'une équitable représentation dans les conseils de chaque grand secteur de formation ; que l'article 16 du décret attaqué, qui renvoie au règlement intérieur de l'université, lequel est, en application des dispositions de l'article 8 du même décret, adopté par le conseil d'administration de l'université Paris ;Dauphine, le soin de définir la composition des conseils des départements ou instituts du nouvel établissement, lesquels élisent les directeurs de ces entités, se borne à appliquer les dispositions de l'article L. 711 ;7 du code de l'éducation ; que, par suite, les requérants ne peuvent utilement affirmer que l'article 16 du décret attaqué méconnaît le principe constitutionnel d'indépendance des professeurs des universités ;
Sur les moyens dirigés contre l'article 22 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 du décret attaqué : Les conseils ne peuvent valablement délibérer que si la majorité de leurs membres en exercice sont présents ou représentés ; que la circonstance que ces dispositions ne prévoient pas de quorum spécifique pour les représentants des professeurs des universités ne constitue pas une méconnaissance du principe constitutionnel d'indépendance des professeurs des universités ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les organisations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret du 26 février 2004 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions des organisations requérantes tendant à l'annulation du décret du 26 février 2004, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par les organisations requérantes au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge des organisations requérantes la somme demandée par l'université Paris ;Dauphine au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes de l'UNION NATIONALE DES ETUDIANTS DE FRANCE et de l'UNEF AGE DAUPHINE, d'une part, et de la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE CFDT, d'autre part, sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de l'université Paris ;Dauphine tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'UNION NATIONALE DES ETUDIANTS DE FRANCE (UNEF), à l'UNEF AGE DAUPHINE, à la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE CFDT, à l'université Paris ;Dauphine, au Premier ministre et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.