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07/06/2006 | FRANCE | N°286350

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 07 juin 2006, 286350


Vu la requête, enregistrée le 24 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 21 septembre 2005 du tribunal administratif d'Orléans refusant de l'autoriser à exercer pour le compte de la commune de Châteauneuf-sur-Loire une action en responsabilité contractuelle à l'encontre de la société Cantalou au titre du non-respect d'engagements de créations d'emplois pris dans le cadre d'un protocole signé le 3 novembre 1989 entre la commune, le département

du Loiret et la SA Chocolaterie Cantalou ;

2°) de l'autoriser à exer...

Vu la requête, enregistrée le 24 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 21 septembre 2005 du tribunal administratif d'Orléans refusant de l'autoriser à exercer pour le compte de la commune de Châteauneuf-sur-Loire une action en responsabilité contractuelle à l'encontre de la société Cantalou au titre du non-respect d'engagements de créations d'emplois pris dans le cadre d'un protocole signé le 3 novembre 1989 entre la commune, le département du Loiret et la SA Chocolaterie Cantalou ;

2°) de l'autoriser à exercer pour le compte de la commune de Châteauneuf-sur-Loire, une action en justice tendant à engager la responsabilité contractuelle de la SA Chocolaterie Cantalou ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Versini - de Béthencourt, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Foussard, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales : « Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la commune, et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer » ;

Considérant qu'il appartient au tribunal administratif statuant comme autorité administrative, et au Conseil d'Etat saisi d'un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu'ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, sans se substituer au juge de l'action, et au vu des éléments qui leur sont fournis, que l'action envisagée présente un intérêt suffisant pour la commune et qu'elle a une chance de succès ;

Considérant que M. A demande à être autorisé à introduire au nom de la commune de Châteauneuf-sur-Loire une requête devant le tribunal administratif tendant à la condamnation de la SA Chocolaterie Cantalou au paiement de dommages et intérêts en raison de la méconnaissance de ses obligations contractuelles résultant du protocole en date du 3 novembre 1989 conclu entre cette commune, le département du Loiret et la SA Chocolaterie Cantalou ; que, selon ce protocole, la commune a cédé à la société un terrain de 40 000 m2 après y avoir fait réaliser conjointement avec le département des travaux de viabilisation évalués à 6 millions de francs ; qu'en contrepartie, la société Cantalou s'était engagée à installer sur ce terrain la plate-forme logistique principale du Groupe Cantalou, et à créer, sur ce site et dans l'usine de sa filiale la société Chocolaterie Phoscao située sur la commune, au moins 25 emplois nouveaux dans les deux années suivant la mise en oeuvre de la plate-forme ; que la commune de Châteauneuf-sur-Loire ayant refusé d'exercer l'action en cause, M. A s'est adressé au tribunal administratif d'Orléans qui, par une décision en date du 21 septembre 2005, a rejeté cette demande au motif que le requérant n'avait pas justifié être inscrit au rôle des contributions de la commune et que l'action envisagée ne présentait pas d'intérêt suffisant pour la commune ;

Considérant, d'une part, que M. A justifie devant le Conseil d'Etat de sa qualité de contribuable de la commune de Châteauneuf-sur-Loire ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction que la commune ne s'était engagée à céder le terrain en cause et à y faire réaliser des travaux qu'en contrepartie de l'engagement pris par la société Chocolaterie Cantalou de créer 25 emplois nouveaux et permanents ; que l'absence de la réalisation de cet engagement, telle qu'elle ressort, en l'état de l'instruction, des déclarations annuelles de salaires faites par sa filiale la société Chocolaterie Phoscao depuis 1989, est susceptible de rendre les dépenses de travaux supportées par la commune injustifiées ; qu'ainsi, l'action envisagée tendant à mettre en cause la responsabilité contractuelle de la SA Chocolaterie Cantalou présente un intérêt suffisant pour la commune et ne peut être regardée comme dépourvue de chance de succès ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler la décision du tribunal administratif précitée en date du 21 septembre 2005 et d'accorder au requérant l'autorisation sollicitée ;

Considérant que l'Etat, n'étant pas partie à l'instance, les conclusions présentées à son encontre par M. A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision du tribunal administratif d'Orléans est annulée.

Article 2 : M. A, contribuable de la commune de Châteauneuf-sur-Loire, est autorisé à exercer une action en justice pour le compte de ladite commune tendant à engager la responsabilité contractuelle de la société Cantalou.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe A, à la commune de Châteauneuf-sur-Loire et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 286350
Date de la décision : 07/06/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-02-05-01-04 COLLECTIVITÉS TERRITORIALES. COMMUNE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. EXERCICE PAR UN CONTRIBUABLE DES ACTIONS APPARTENANT À LA COMMUNE. CONDITIONS DE FOND. - INTÉRÊT SUFFISANT PRÉSENTÉ PAR L'ACTION - EXISTENCE EN L'ESPÈCE - ACTION TENDANT À LA CONDAMNATION AU PAIEMENT DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS À RAISON DU MANQUEMENT À SES OBLIGATIONS CONTRACTUELLES D'UNE ENTREPRISE AYANT BÉNÉFICIÉ DE DÉPENSES DE LA COMMUNE EN CONTREPARTIE D'UN ENGAGEMENT NON TENU EN TERMES DE CRÉATION D'EMPLOIS.

135-02-05-01-04 Commune ayant conclu avec une société un protocole par lequel elle s'engageait à céder à cette dernière un terrain de 40 000 m² après y avoir effectué des travaux d'un montant de six millions de francs en contrepartie de l'engagement de la société de créer 25 emplois en deux ans. Cet engagement n'ayant pas été respecté, l'action qu'un contribuable se propose d'engager au nom de la commune devant le juge administratif aux fins de condamnation de la société à payer des dommages et intérêts pour manquement à ses obligations contractuelles présente un intérêt suffisant pour la commune.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2006, n° 286350
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mme Dominique Versini - de Béthencourt
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:286350.20060607
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