Vu le recours, enregistré le 6 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 13 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé la décision implicite par laquelle il a refusé de modifier les conditions de la rémunération de M. Jean-Luc B et lui a enjoint de procéder à cette modification à compter du 13 avril 2001 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le décret n° 2001-822 du 5 septembre 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alban de Nervaux, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. B,
- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Pau que M. B a été recruté à compter du 16 décembre 1991 en qualité d'agent contractuel pour exercer les fonctions de chef cuisinier au cercle mixte de l'école d'application de l'aviation légère de l'armée de terre à Dax ; que par un contrat établi le 27 août 2002 en application des dispositions du I de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000, il a été engagé pour une période indéterminée en qualité d'agent contractuel de droit public ; que la rémunération mensuelle accordée à M. B lors de l'établissement de ce contrat a été fixée à un montant inférieur à celle qu'il percevait antérieurement en vertu d'une revalorisation salariale accordée le 23 mai 2001 par une décision du lieutenant-colonel Tissot ; que par le jugement attaqué du 13 octobre 2005, le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du MINISTRE DE LA DEFENSE rejetant la demande de M. B tendant à ce que sa rémunération mensuelle soit fixée à hauteur de celle perçue en vertu de la décision du 23 mai 2001 ;
Considérant d'une part qu'aux termes du I de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Les agents non titulaires de l'Etat et des établissements publics à caractère administratif, en fonctions à la date de publication de la présente loi et qui n'ont pas été recrutés en application des articles 3, 4, 6 et 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, bénéficient d'un contrat à durée indéterminée lorsqu'ils assurent : 1° Soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs ; 2° Soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration, des hôtels de représentation du Gouvernement, dans les régions et les départements, des hôtels de commandement et des services d'approvisionnement relevant du ministère chargé de la défense. Les fonctions ci-dessus peuvent être exercées à temps incomplet ; qu'aux termes du II du même article : Les personnels mentionnés au I ci-dessus peuvent demander que le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail. Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la date de publication de la présente loi pour présenter leur demande. (...) ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 5 septembre 2001 portant dispositions applicables aux agents contractuels de droit public du ministère de la défense mentionnés à l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Le classement des agents dans la catégorie III s'effectue à un échelon calculé en fonction de leur ancienneté en qualité d'agent contractuel de droit public ; qu'aux termes de l'article 10 du même décret : Lorsque le classement initial effectué dans les conditions de l'article 4 ci-dessus conduit à une rémunération nette inférieure à celle perçue antérieurement, l'agent conserve, à titre personnel et exceptionnel, la rémunération nette qu'il détenait avant le classement jusqu'à ce que celle liée à sa nouvelle condition la rejoigne. Toutefois, la rémunération, maintenue à titre personnel et exceptionnel est revalorisée en fonction de l'évolution de la valeur du point fonction publique ; que l'article 12 de ce décret a prévu une date d'effet au 13 avril 2001 ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les agents de l'Etat et des établissements publics à caractère administratif répondant aux conditions prévues par les dispositions du I de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000 précitées et qui n'ont pas fait valoir dans le délai d'un an prévu par le II de l'article 34 de la loi leur droit d'option pour un contrat de travail de droit privé, doivent bénéficier à compter de la mise en oeuvre de la loi, d'un contrat de droit public à durée indéterminée ; que pour les agents du ministère de la défense cette mise en oeuvre a été organisée par le décret du 5 septembre 2001, d'après lequel la rémunération contractuelle doit être déterminée en fonction du classement initial des agents, selon leur ancienneté, dans la grille indiciaire, sous réserve de la rémunération qui peut leur être garantie par application des dispositions de l'article 10 de ce même décret ; que pour déterminer le droit de l'agent à cette garantie de rémunération, il y a lieu de retenir la rémunération nette perçue par l'agent en vertu de décisions créatrices de droits au jour de l'établissement de son nouveau contrat ; que l'entrée en vigueur rétroactive du décret du 5 septembre 2001, fixée par son article 12 au 13 avril 2001, a eu pour objet de permettre que les intéressés soient régis dès cette date par les contrats établis conformément aux règles prévues par ce décret, mais n'a pas pu avoir légalement pour effet d'autoriser l'administration à refuser de prendre en compte le montant des augmentations salariales éventuellement accordées à l'agent entre le 13 avril et le 5 septembre 2001, pour le calcul de la rémunération contractuelle au maintien de laquelle l'article 10 du décret lui ouvre droit ; que, par suite, le tribunal administratif de Pau n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, pour déterminer le montant de la rémunération accordée à M. B en vertu de son nouveau contrat de droit public établi le 27 août 2002 par application des dispositions du décret du 5 septembre 2001, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne pouvait refuser de prendre en compte les augmentations salariales éventuellement obtenues par l'intéressé après le 13 avril 2001 ;
Considérant, d'autre part qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal que le montant de la rémunération à laquelle M. B avait droit au jour de l'établissement de ce contrat était celui déterminé en application de la décision du 23 mai 2001 signée par le lieutenant-colonel Tissot ; que la circonstance que cet officier n'aurait pas eu compétence ainsi que le soutient le MINISTRE DE LA DEFENSE, pour prendre une telle décision est sans incidence sur les droits crées par celle-ci au profit de M. B ; qu'il suit de là qu'en jugeant que le MINISTRE DE LA DEFENSE était tenu, après le classement de l'intéressé dans la grille indiciaire, de prendre en compte la rémunération nette perçue par lui en vertu de la revalorisation salariale décidée le 23 mai 2001, le tribunal administratif de Pau n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Jean-Luc B.