Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE (SIETOM), dont le siège est 6, rue Abel Leblanc à Tresles-en-Brie (77220) ; le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE (SIETOM) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 6 juin 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Melun a, à la demande de la société de gestion, investissements mobiliers et agricoles (GIMA), en application de l'article L. 554-11 du code de justice administrative, suspendu l'exécution de l'arrêté du 19 décembre 2005 par lequel le maire de la commune de Tournan-en-Brie lui a délivré un permis de construire pour l'édification d'un centre de tri d'emballages ménagers ;
2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la demande présentée par la société GIMA devant le tribunal administratif de Melun ;
3°) de mettre à la charge de la société GIMA le versement de la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code du patrimoine ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bertrand Dacosta, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Foussard, avocat du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société de gestion, investissements mobilier et agricole,
- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-11 du code de justice administrative : « La décision de suspension d'une autorisation ou d'une décision d'approbation d'un projet d'aménagement entrepris par une collectivité publique obéit aux règles définies par l'article L. 122-2 du code de l'environnement (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 122-2 du code de l'environnement : « Si une requête déposée devant la juridiction administrative contre une autorisation ou une décision d'approbation d'un projet visé au second alinéa de l'article L. 122-1 est fondée sur l'absence d'étude d'impact, le juge des référés, saisi d'une demande de suspension de la décision attaquée, y fait droit dès que cette absence est constatée » ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 122-1 du même code : « Les travaux et projets d'aménagement qui sont entrepris par une collectivité publique ou qui nécessitent une autorisation ou une décision d'approbation, ainsi que les documents d'urbanisme, doivent respecter les préoccupations d'environnement./ Les études préalables à la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages qui, par l'importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce dernier, doivent comporter une étude d'impact permettant d'en apprécier les conséquences … » ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la procédure de suspension prévue à l'article L. 122-2 du code de l'environnement est susceptible de s'appliquer à l'ensemble des autorisations et des décisions d'approbation de projets d'aménagement soumis à étude d'impact ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-6 du code de l'environnement : « Ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact (…) les aménagements, ouvrages et travaux définis au tableau ci-après, dans les limites et sous les conditions qu'il précise » ; qu'aux termes de l'article R. 122-7 du même code : « Les dispenses d'étude d'impact résultant des dispositions du tableau de l'article R. 122-6 ne sont pas applicables aux catégories d'aménagements, ouvrages et travaux figurant au tableau de l'article R. 122-5 » ; que si l'article R. 122-6 dispense d'étude d'impact la plupart des constructions soumises à permis de construire dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme, le tableau figurant à l'article R. 122-5 cite parmi les catégories d'aménagements, d'ouvrages et de travaux qu'il énumère les installations classées pour la protection de l'environnement, à la seule exception des travaux soumis à déclaration ; que, par suite, les travaux de construction d'une installation classée relevant du régime de l'autorisation sont soumis à la procédure de l'étude d'impact ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que la demande de suspension du permis de construire un centre de tri d'emballages ménagers formée par la société de gestion, investissements mobiliers et agricoles (GIMA) pouvait être présentée sur le fondement de l'article L. 554-11 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Melun n'a pas, contrairement à ce qui est soutenu par le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE, entaché son ordonnance d'erreur de droit ;
Considérant, toutefois, que lorsqu'une étude d'impact a été réalisée et portée à la connaissance, en temps utile, de l'autorité chargée d'instruire la demande de permis de construire, la seule circonstance qu'elle n'ait pas figuré, en méconnaissance du 8° du A de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans le dossier joint à la demande de permis de construire ne suffit pas à faire regarder comme remplie la condition tenant à l'absence d'étude d'impact prévue à l'article L. 122-2 du code de l'environnement ; qu'il suit de là qu'en se bornant, pour suspendre le permis de construire contesté, à constater que l'étude d'impact relative à l'ouvrage n'avait pas été jointe au dossier de demande de permis de construire, et en jugeant qu'était sans incidence la circonstance que ce document ait été élaboré et porté à la connaissance du maire, le juge des référés a entaché son ordonnance d'erreur de droit ; que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE est fondé à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Sur les conclusions tendant à la suspension du permis de construire sur le fondement de l'article L. 554-11 du code de justice administrative :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une étude d'impact a été réalisée par le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE dans le cadre de sa demande d'autorisation d'exploiter un centre de tri d'emballages ménagers, présentée au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; que l'étude d'impact, adressée au préfet de Seine-et-Marne, a été communiquée par celui-ci au maire de Tournan-en-Brie le 9 septembre 2005, afin qu'elle puisse être consultée par le public lors de l'enquête publique prévue par cette législation ; qu'ainsi, le maire de Tournan-en-Brie en a eu connaissance avant de délivrer le permis de construire contesté ; que, par suite, la condition à laquelle est subordonnée la suspension d'une autorisation ou d'une décision d'approbation d'un projet d'aménagement sur le fondement de l'article L. 554-11 du code de justice administrative n'est pas, en l'espèce, remplie ; que les conclusions présentées sur ce fondement ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à la suspension du permis de construire sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (…) » ;
Considérant que la société GIMA a fait valoir devant le juge des référés qu'a été méconnu l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme, le juge judiciaire étant appelé à annuler la vente consentie au profit du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE, lequel sera ainsi réputé ne pas avoir eu qualité pour présenter la demande de permis ; qu'ont été méconnus l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme et l'article 3 du décret du 12 octobre 1977, désormais codifié aux articles R. 122-4 et suivants du code de l'environnement, en ce que le dossier de demande de permis ne comportait pas d'étude d'impact ; qu'a été méconnu l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, en raison d'une inexactitude affectant la superficie du terrain d'assiette et du caractère incomplet du volet paysager ; que l'architecte des bâtiments de France n'a pas été consulté, en violation de l'article R. 421-38-4 du même code ; que le permis de construire contesté a été pris en méconnaissance de l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme, la construction projetée étant située à moins de 100 mètres d'une route express ; qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du même code ; qu'il aurait dû prévoir une cession d'une partie des terrains à EDF, en application de l'article L. 332-6 du même code ; qu'enfin, il a été pris sur le fondement d'un plan d'urbanisme lui-même entaché de diverses illégalités externes et internes ;
Considérant qu'aucun de ces moyens n'est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GIMA n'est pas fondée à demander la suspension du permis de construire délivré au SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE pour la construction d'un centre de tri d'emballages ménagers ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la société GIMA le versement au SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE d'une somme de 3000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que soit mis à la charge du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que demande au même titre la société GIMA ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Melun en date du 6 juin 2006 est annulée.
Article 2 : La demande de suspension présentée par la société GIMA devant le juge des référés du tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : La société GIMA versera au SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la société GIMA tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'ENLEVEMENT ET LE TRAITEMENT DES ORDURES MENAGERES DE LA REGION DE TOURNAN-EN-BRIE, à la société GIMA, à la commune de Tournan-en-Brie et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.