Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 janvier et 12 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DU VAR, représenté par le président du conseil général en exercice, domicilié en cette qualité 390 avenue des Lices, BP 1303, Toulon Cedex (83076) ; le DEPARTEMENT DU VAR demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 8 janvier 2007 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Nice, statuant en la forme des référés, en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, a annulé la procédure de passation du lot n° 3 du marché de services relatif à la réalisation de missions de géomètre divisé en six lots ;
2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé précontractuel engagée , de rejeter la demande présentée par le groupement OPSIA-Méditerranée - cabinet Arragon devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) de mettre à la charge du groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon une somme de 4 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, et notamment son annexe VII A ;
Vu le règlement (CE) n° 1564/2005 de la Commission du 7 septembre 2005 établissant les formulaires standard pour la publication d'avis dans le cadre des procédures de passation des marchés publics conformément aux directives 2004/17/CE et 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alban de Nervaux, Auditeur,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DU VAR et de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat du groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon,
- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics (...) Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement, ainsi que le représentant de l'Etat dans le département dans le cas où le contrat est conclu ou doit être conclu par une collectivité territoriale ou un établissement public local.(...) Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès qu'il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours (...) » ;
Considérant que par des avis d'appel public à la concurrence envoyés à la publication au Bulletin officiel des annonces des marchés publics et au Journal officiel de l'Union européenne le 29 août 2006, le département du Var a lancé une procédure de consultation en vue de la conclusion d'un marché de services afférents à la réalisation de missions de géomètres divisé en six lots ; qu'à la demande du groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon , le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, par trois ordonnances en date du 8 janvier 2007, annulé la procédure de passation du marché portant sur les lots n° 1 à 3 ; que, par le présent pourvoi, le DEPARTEMENT DU VAR demande l'annulation de l'ordonnance ayant annulé la procédure de passation portant sur le lot n° 3 ;
Considérant que l'article 45 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, dispose : A l'appui des candidatures, il ne peut être exigé que : /1° Des renseignements permettant d'évaluer les capacités professionnelles, techniques et financières du candidat et des documents relatifs aux pouvoirs de la personne habilitée pour l'engager et, en ce qui concerne les marchés passés pour les besoins de la défense, à sa nationalité. Au titre de ces capacités professionnelles, peuvent figurer des renseignements sur le savoir-faire des candidats en matière de protection de l'environnement./ Pour justifier de ses capacités professionnelles, techniques et financières, le candidat peut demander que soient également prises en compte les capacités professionnelles, techniques et financières d'un ou de plusieurs sous-traitants. Dans ce cas, il doit justifier des capacités de ce ou ces sous-traitants et du fait qu'il en dispose pour l'exécution du marché./ La liste de ces renseignements et documents est fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie (...) ; que l' arrêté du 26 février 2004 a été pris pour fixer cette liste ; que l'article 2 dudit arrêté prévoit : « l'acheteur public précise dans l'avis public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation ceux des renseignements et documents énumérés à l'article 1er que doit produire le candidat » ;
Considérant le formulaire DC4 intitulé lettre de candidature et habilitation du mandataire par ses co-traitants et le formulaire DC5 intitulé déclaration du candidat reprennent, sans y ajouter, les renseignements qui peuvent être exigés des candidats en application des dispositions précitées de l'article 45 du code des marchés publics et de l'arrêté du 26 février 2004 et se bornent à déterminer les modalités de présentation de ces renseignements ; que ces formulaires sont aisément accessibles, sans frais particuliers, sur le site « internet » du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ; qu'il est ainsi loisible à l'acheteur public d'exiger des candidats, dès lors que les caractéristiques du marché le justifient, qu'ils utilisent, à peine d'irrecevabilité, ces formulaires pour présenter leur offre ; qu'il est, de même, loisible à l'acheteur public de renvoyer aux formulaires DC4 et DC5 dans l'avis d'appel public à la concurrence pour faire connaître aux entreprises les renseignements exigés à l'appui de leur candidature ; qu'en jugeant que le DEPARTEMENT DU VAR ne pouvait se borner à indiquer dans l'avis que les renseignements attendus étaient ceux fixés à l'article 45 du code des marchés publics et repris dans le formulaire DC5 alors que le département avait ainsi indiqué avec suffisamment de précision qu'était exigé des entreprises à l'appui de leur candidature l'ensemble des renseignements énumérés dans ce formulaire s'agissant d'un marché de services, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que, par suite, le DEPARTEMENT DU VAR est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant, que s'agissant d'un marché de seuil communautaire, il appartenait au DEPARTEMENT DU VAR, en l'absence de règles nationales applicables à la procédure de passation du marché litigieux permettant d'assurer une publicité de l'avis d'appel public à la concurrence dans des conditions compatibles avec les objectifs de la directive 2004/18/CE, d'assurer une publicité de ses intentions compatible avec les objectifs de cette directive, et notamment avec les prescriptions des annexes du règlement (CE) n° 1564/2005 pris pour son application ; que le formulaire standard fixé par ce règlement fait notamment figurer, parmi les mentions que doivent comporter les avis de marchés, au point III.1.1 : « cautionnement et garanties exigées (le cas échéant) » ; qu'il ressort de l'article 8 du cahier des clauses administratives particulières du marché que le département prévoyait d'exiger la constitution de la garantie à première demande prévue à l'article 105 du code des marchés public si le titulaire du marché ne renonçait pas au bénéfice d'une avance forfaitaire ; que, toutefois, le DEPARTEMENT DU VAR n'a pas porté cette information à la connaissance des candidats éventuels en remplissant à cet effet la rubrique précitée dans l'avis paru Journal officiel de l'Union européenne ; qu'il a ainsi manqué à ses obligations de publicité ; qu'il en résulte que le groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon est fondé à demander l'annulation de la procédure contestée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le DEPARTEMENT DU VAR demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge du DEPARTEMENT DU VAR une somme de 1 000 euros au titre des frais de même nature exposés par le groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'ordonnance du 8 janvier 2007 du vice-président du tribunal administratif de Nice est annulée.
Article 2 : La procédure de passation du marché portant sur le lot n° 3 est annulée.
Article 3 : Le DEPARTEMENT DU VAR versera une somme de 1 000 euros au groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DU VAR et au groupement OPSIA Méditerranée - cabinet Arragon.