Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Angraij A, ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé à l'encontre de la décision en date du 14 septembre 2005 du consul de France à New-Delhi refusant de délivrer les visas d'entrée en France qu'il avait sollicité au bénéfice de son épouse Mme Sarb Jit B, née C, et de ses deux enfants Daljinder et Manjinder ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer les visas sollicités et, à tout le moins, de réexaminer les demandes de visa dans un délai de quinze jours à compter de l'ordonnance, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que, résidant régulièrement en France, la demande de regroupement familial qu'il a présentée a été favorablement accueillie le 11 avril 2005 ; que la condition d'urgence est satisfaite dès lors que le droit au regroupement familial est méconnu et qu'il a vocation à vivre avec son épouse et ses deux enfants ; qu'un doute sérieux sur la légalité de la décision existe dès lors que la commission n'a pas communiqué les motifs de sa décision alors que son épouse et ses deux enfants relèvent des catégories d'étrangers auxquels il ne peut être opposé qu'un refus motivé ; que les motifs du rejet qui a été opposé en Inde ne sont ni circonstanciés ni exhaustifs ; que les documents produits à l'appui des demandes de visa sont authentiques, au contraire de ce qu'a estimé la commission des recours, dont la décision est ainsi entachée d'inexactitude matérielle, et d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision de l'autorité consulaire est entachée d'excès de pouvoir, dès lors qu'elle oppose un refus à la demande de bénéficiaires d'une autorisation de regroupement familial ; que le refus méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu la copie du recours présenté le 10 février 2006 devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, et la requête présentée devant le Conseil d'Etat contre la décision de la commission ;
Vu, enregistré le 3 juin 2008 le mémoire en défense présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les conclusions à fin de délivrance des visas sont irrecevables ; que la décision du 14 septembre 2005 est suffisamment motivée et qu'en tout état de cause la décision implicite de la commission des recours, dont M. A n'a pas demandé les motifs, s'y est substituée ; qu'aucune trace des actes de naissance de son épouse et de ses enfants n'a été trouvée dans les registres indiens d'état civil et que différentes anomalies ont été signalées par les autorités locales sur les actes produits ; que la production d'actes frauduleux est un motif d'ordre public justifiant le refus de visa ; que ce refus n'est, par suite, entaché d'aucune erreur manifeste ; que les liens familiaux n'étant pas établis, les moyens tirés de la violation de la convention internationale des droits de l'enfant et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent prospérer ; que pour le même motif, et alors que M. A ne justifie pas d'un quelconque maintien des liens depuis son installation en France avec sa famille, la condition d'urgence n'est pas satisfaite ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 20 juin 2008, présenté pour M. A qui reprend les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ; il produit de nouvelles pièces attestant la réalité des faits ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale des droits de l'enfant ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part M. A, et d'autre part le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du lundi 16 juin 2008 à 12 heures, au cours de laquelle ont été entendus :
- Me BOUZIDI, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A ;
- M. A ;
- la représentante du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;
Considérant que M. A, de nationalité indienne, résidant régulièrement en France, a demandé à faire venir auprès de lui Mme Sarbjit C et deux enfants, Manjinder et Daljinder, nés respectivement en 1987 et 2001 ; qu'il a obtenu à cette fin une autorisation de regroupement familial du préfet de la Seine-Saint-Denis ; qu'il demande la suspension de la décision par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours qu'il a formé contre la décision des autorités consulaires françaises à New-Delhi refusant la délivrance des visas sollicités au profit de Mme C et des deux enfants ;
Considérant qu'il ressort des vérifications opérées en Inde sur les actes d'état civil produits à l'appui des demandes de visa, que l'identité des demandeurs et, pour les enfants, leurs liens de filiation avec M. A n'ont pu être établis, en raison des inexactitudes dont ces actes sont revêtus, leur donnant ainsi le caractère d'actes inauthentiques ; que si le requérant a produit devant la commission de recours de nouveaux certificats, les circonstances dans lesquelles ceux-ci ont été produits, afin de se substituer à des documents dont le caractère frauduleux était avéré, et leur date tardive, ne leur conféraient pas un caractère probant, et cela alors même que le certificat de mariage entre Mme C et M. A pouvait être regardé comme authentique ; que, par suite, aucun des moyens invoqués par M. A, tirés de l'authenticité des actes produits et de l'erreur d'appréciation de l'administration, ne peut faire naître de doute sérieux sur la légalité du refus de délivrance des visas ; que, les conditions de la suspension n'étant pas remplies, la requête de M. A ne peut, dès lors, en l'état de l'instruction, qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Angraij A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.