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07/10/2009 | FRANCE | N°314262

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 07 octobre 2009, 314262


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 12 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS, dont le siège est 108, rue de Richelieu à Paris (75002), la SOCIETE IKEA DEVELOPPEMENT, dont le siège est 425, rue Henri Barbusse à Plaisir (78370) et la SOCIETE MEUBLES IKEA FRANCE, dont le siège est 425, rue Henri Barbusse à Plaisir (78370) ; la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 septembre 2007 par laquelle la commission natio

nale d'équipement commercial a refusé de leur accorder l'autorisatio...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 12 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS, dont le siège est 108, rue de Richelieu à Paris (75002), la SOCIETE IKEA DEVELOPPEMENT, dont le siège est 425, rue Henri Barbusse à Plaisir (78370) et la SOCIETE MEUBLES IKEA FRANCE, dont le siège est 425, rue Henri Barbusse à Plaisir (78370) ; la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 septembre 2007 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a refusé de leur accorder l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un centre commercial dénommé Family Village Ikea de 31 100 m² de surface de vente à Mougins (Alpes-Maritimes) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Musitelli, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public ;

Considérant que, par une décision du 26 septembre 2007, la commission nationale d'équipement commercial a refusé d'accorder aux SOCIETES ALTA CRP MOUGINS, IKEA DEVELOPPEMENT et MEUBLES IKEA FRANCE l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un centre commercial dénommé Family Village Ikea de 31 100 m² de surface de vente à Mougins (Alpes-Maritimes) ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 18-1 du décret du 9 mars 1993 applicable à l'espèce, le dossier de demande d'autorisation comporte notamment la délimitation de la zone de chalandise, le marché théorique de cette zone, les équipements commerciaux et artisanaux qu'elle inclut, les équipements commerciaux exerçant une attraction sur la zone et le chiffre d'affaires annuel attendu par le pétitionnaire de la réalisation du projet ; qu'afin d'être en mesure d'apprécier l'impact prévisible du projet au regard des principes et critères posés par le législateur, les commissions d'équipement commercial saisies d'une demande d'autorisation doivent disposer de l'ensemble des données précises relatives à la zone de chalandise retenue, en particulier dans le cas où la commission statue en prenant en considération une zone de chalandise différente de celle proposée par le pétitionnaire ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de leur demande d'autorisation, les sociétés requérantes ont délimité une zone de chalandise comprenant 1 193 194 habitants sur la base d'un temps de trajet de 45 minutes en automobile pour accéder au site ; que la commission nationale d'équipement commercial, estimant qu'en raison des encombrements fréquents des axes routiers de ce secteur géographique densément peuplé, l'essentiel du chiffre d'affaires du centre commercial proviendrait des consommateurs résidant à moins de 30 minutes de trajet du site, a délimité une zone restreinte correspondant à un temps de trajet de 30 minutes et comprenant les zones primaire et secondaire, augmentées de la commune de Saint-Laurent-du-Var qui ne figurait pas dans le dossier des pétitionnaires ; que le redécoupage ainsi effectué, qui a pour effet de réduire de moitié la population résidente dans la zone de chalandise, n'est pas sans incidence sur le marché théorique du centre commercial projeté ; que pour apprécier l'impact prévisible du projet sur l'équilibre entre les différentes formes de commerce, la commission nationale s'est fondée sur les densités calculées dans la zone de chalandise définie par les pétitionnaires mais également sur celles de la zone restreinte redéfinie par ses soins ; qu'eu égard à l'importance des modifications de la délimitation de la zone de chalandise initiale auxquelles a procédé la commission nationale et à la circonstance qu'elle s'est fondée sur la zone ainsi modifiée pour rejeter la demande des pétitionnaires, la commission nationale ne pouvait statuer sur la demande sans avoir préalablement demandé aux pétitionnaires de présenter les observations qu'appelait de leur part le nouveau découpage ; qu'en s'abstenant de le faire, la commission nationale a entaché sa décision d'illégalité ; que les requérants sont, dès lors, fondés à en demander l'annulation ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme globale de 3 000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS, la SOCIETE IKEA DEVELOPPEMENT et la SOCIETE MEUBLES IKEA FRANCE et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 26 septembre 2007 de la commission nationale d'équipement commercial est annulée.

Article 2 : L'Etat versera à la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS, à la SOCIETE IKEA DEVELOPPEMENT et à la SOCIETE MEUBLES IKEA FRANCE la somme globale de 3 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ALTA CRP MOUGINS, à la SOCIETE IKEA DEVELOPPEMENT, à la SOCIETE MEUBLES IKEA FRANCE, à la commission nationale d'aménagement commercial et à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 314262
Date de la décision : 07/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05-02 COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ÉCONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. RÉGLEMENTATION DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES. ACTIVITÉS SOUMISES À RÉGLEMENTATION. URBANISME COMMERCIAL. PROCÉDURE. - COMMISSION D'ÉQUIPEMENT COMMERCIAL AYANT REJETÉ UNE DEMANDE D'AUTORISATION AU VUE D'UNE ZONE DE CHALANDISE REDÉFINIE PAR SES SOINS, SANS AVOIR MIS LE PÉTITIONNAIRE À MÊME DE PRÉSENTER SES OBSERVATIONS [RJ1] - RÉGULARITÉ - ABSENCE.

14-02-01-05-02 Commission d'équipement commercial saisie d'une demande d'autorisation qui, pour se prononcer, procède à une nouvelle délimitation de la zone de chalandise du projet. Eu égard à l'importance des modifications de la délimitation de la zone de chalandise initiale auxquelles a procédé la commission et à la circonstance qu'elle s'est fondée sur la zone ainsi modifiée pour rejeter la demande des pétitionnaires, elle ne pouvait statuer sur la demande sans avoir préalablement demandé aux pétitionnaires de présenter les observations qu'appelait de leur part le nouveau découpage.


Références :

[RJ1]

Cf., sur l'obligation pour la commission de procéder à une nouvelle délimitation de la zone de chalandise lorsque celle proposée par le pétitionnaire risque de la conduire à se prononcer sur la base de données inexactes ou incomplètes, 11 février 2004, Société Etablissements Grassot SA et Société Jardivil, n° 242160, T. p. 608 ;

sur l'obligation pour la commission d'inviter le pétitionnaire à compléter son dossier lorsque celui-ci comporte des lacunes telles qu'il ne permettrait pas d'apprécier l'impact prévisible du projet, 3 février 2003, Société Cora Belgique et autre, n° 226804, p. 28.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 2009, n° 314262
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Jean Musitelli
Rapporteur public ?: M. Struillou Yves

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:314262.20091007
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