Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Farid A, demeurant ...; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 22 mai 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Alger (Algérie) lui refusant un visa d'entrée et de court séjour en France ;
2°) d'enjoindre au consul général de France de lui délivrer le visa sollicité sous astreinte ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 308,20 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu le règlement CE n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil européen en date du 15 mars 2006 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Lutton, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Frédéric Lenica, rapporteur public ;
Considérant que M. A demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 22 mai 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande tendant au réexamen de la décision par laquelle le consul général de France à Alger a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour sur le territoire français ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter le recours de M. A, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'insuffisance des ressources de l'intéressé et sur le risque d'un détournement de l'objet du visa ;
Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement CE n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil européen du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, l'étranger qui souhaite faire en France un séjour n'excédant pas trois mois doit : 1. (...) c) (...) disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée de séjour envisagé que pour le retour dans le pays d'origine (...) ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ;
Considérant, toutefois, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a justifié, lors du dépôt de sa demande de visa, d'un revenu mensuel de 254 euros, qu'il tire de son activité de fonctionnaire de police, ainsi qu'un bordereau de retrait de devises de 2 350 euros ; qu'en retenant le motif de l'insuffisance des ressources de l'intéressé pour faire face aux frais de son voyage et de son court séjour en France, la commission a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
Considérant, en second lieu, que le motif tiré de ce que la demande de visa présenterait en l'espèce un risque de détournement de son objet ne repose sur aucun élément de nature à en établir le bien-fondé ; qu'en estimant que la demande de M. A, qui est fonctionnaire en Algérie et dispose de ressources lui permettant de subvenir aux besoins occasionnés par sa venue et son court séjour en France, comportait un tel risque, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, la commission a rejeté le recours dirigé contre la décision du consul général de France à Alger lui refusant un visa d'entrée et de court séjour en France ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que la présente décision implique seulement que la demande de visa déposée par M. A soit réexaminée par les autorités compétentes ; qu'il y a lieu de leur enjoindre de procéder à un tel examen dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par le requérant ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions précitées et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 100 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en date du 22 mai 2008 est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au consul général de France à Alger de réexaminer la demande de visa d'entrée et de court séjour en France de M. A dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Farid A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.