Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Djamal A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du consul général de France à Oran du 24 mars 2008 rejetant sa demande de visa d'entrée et de court séjour en France en qualité de conjoint d'une ressortissante française ;
2°) d'enjoindre au consul général de France à Oran de délivrer le visa sollicité, au besoin sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Lutton, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Frédéric Lenica, rapporteur public ;
Considérant que la requête de M. A, ressortissant algérien, doit être regardée comme tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa confirmant la décision du consul général de France à Oran du 24 mars 2008 rejetant la demande de visa d'entrée et de court séjour en France qu'il avait présentée en qualité de conjoint de ressortissante française ;
Sur le moyen tiré de l'absence de motivation :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Par dérogation aux dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, les décisions de refus de visa d'entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l'une des catégories suivantes et sous réserve de considérations tenant à la sûreté de l'Etat : (...) / 2° Conjoints, enfants de moins de vingt et un ans ou à charge, et ascendants de ressortissants français ; (...) ; qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : Une décision implicite intervenue dans le cas où une décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande ; que, dès lors, et en l'absence de justification par le requérant d'une demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa, le moyen tiré de l'absence de motivation de cette décision ne peut qu'être écarté ;
Sur le moyen tiré de l'erreur de droit :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter le recours de l'intéressé, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur ce que M. A était bigame et sur le risque de détournement de l'objet du visa ; que si M. A allègue que la légalité de l'état de polygamie doit être appréciée au regard de la loi personnelle de l'étranger, il résulte, en tout état de cause, des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui interdisent la délivrance ou prévoient le retrait de titres de séjour aux étrangers vivant en état de polygamie et à leurs conjoints que le législateur a entendu prendre cet état en considération pour déterminer les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ; qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que M. A était marié à Mme C, ressortissante algérienne, à la date de son mariage, le 2 décembre 2004, avec Mme B, ressortissante française ; qu'ainsi, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas commis d'erreur de droit en se fondant sur l'état de bigamie dans lequel le requérant s'est placé en contractant mariage avec Mme B pour lui refuser le visa d'entrée et de court séjour qu'il sollicitait en qualité de conjoint de ressortissante française ;
Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :
Considérant que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que, compte tenu de cette circonstance et de ce que le requérant avait sollicité en vain un visa d'entrée en France à plusieurs reprises depuis 1999, le visa sollicité risquait d'être détourné de son objet ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard aux motifs d'ordre public sur lesquels elle repose, la décision attaquée n'a pas porté atteinte au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Djamal A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.