La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/11/2009 | FRANCE | N°322554

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 16 novembre 2009, 322554


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 novembre 2008 et 12 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SNC ANSE DE TOULVERN, dont le siège est Pointe de Toulvern à Baden (56870) ; la SNC ANSE DE TOULVERN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 juillet 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, saisie sur renvoi du Conseil d'Etat après cassation d'un précédent arrêt, a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 14 avril 2005 du tribunal administ

ratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 novembre 2008 et 12 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SNC ANSE DE TOULVERN, dont le siège est Pointe de Toulvern à Baden (56870) ; la SNC ANSE DE TOULVERN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 juillet 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, saisie sur renvoi du Conseil d'Etat après cassation d'un précédent arrêt, a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 14 avril 2005 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2004 du maire de Baden retirant son précédent arrêté du 2 mars 2004 lui accordant un permis de construire pour l'édification d'un bâtiment ostréicole au lieudit Pointe de Toulvern et, d'autre part, à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Baden la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Lallet, Maître des Requêtes,

- les observations Me Odent, avocat de la SNC ANSE DE TOULVERN et de la SCP Didier, Pinet, avocat de la commune de Baden,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Odent, avocat de la SNC ANSE DE TOULVERN et à la SCP Didier, Pinet, avocat de la commune de Baden ;

Considérant qu'il résulte du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable que, en dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations nécessaires à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau sont autorisées sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage, après qu'une enquête publique a été réalisée conformément aux dispositions des articles L. 123-1 et suivants du code de l'environnement ; qu'en vertu de l'article 1er du décret du 23 avril 1985 et du 35° de son annexe alors en vigueur, les travaux, ouvrages et aménagements dans les espaces et milieux littoraux faisant l'objet d'une protection particulière qui sont nécessaires à l'exercice des activités conchylicoles, de pêche, de cultures marines ou lacustres situées en tout ou partie dans la bande littorale mentionnée au III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme doivent être précédés de l'enquête publique prévue à ce dernier article lorsque leur montant excède 160 000 euros ;

Considérant que, pour rejeter l'appel formé par la SNC ANSE DE TOULVERN contre le jugement du 14 avril 2005 par lequel le tribunal administratif de Rennes avait rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2004 du maire de Baden retirant le permis de construire un atelier ostréicole qu'il avait accordé à cette société le 2 mars 2004, la cour administrative d'appel de Nantes s'est notamment fondée sur ce que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 2 juillet 2004 ne comportait pas le nom ni le prénom de son signataire, en méconnaissance des prescriptions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, était inopérant dès lors que le maire était tenu de retirer le permis de construire illégalement délivré le 2 mars 2004 ; qu'en statuant ainsi, alors que le maire était nécessairement conduit, pour relever l'éventuelle illégalité du permis litigieux, à porter une appréciation sur les faits de l'espèce, notamment sur le caractère urbanisé ou non de l'espace dans lequel la construction projetée se situe, et qu'il ne se trouvait donc pas, pour procéder à ce retrait, en situation de compétence liée rendant inopérant le moyen tiré d'un vice de forme dont sa décision serait entachée, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que dès lors son arrêt doit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulé ;

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond ;

Considérant, d'une part, que s'il appartenait au maire de Baden, saisi d'une demande de retrait du permis du 2 mars 2004 délivré à la SNC ANSE DE TOULVERN et d'un recours gracieux du préfet du Morbihan tendant aux mêmes fins, de retirer, en cas d'illégalité, ce permis dans le délai de quatre mois à compter de sa délivrance, il était, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, nécessairement conduit, pour relever cette illégalité, à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; qu'il ne se trouvait donc pas en situation de compétence liée pour procéder à ce retrait ; que, par suite, la SNC ANSE DE TOULVERN peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 à l'encontre de l'arrêté du 2 juillet 2004 du maire de Baden ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 : (...) Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ; qu'il ressort des pièces du dossier que si l'arrêté du 2 juillet 2004 mentionne la qualité de son auteur, le maire de Baden, il ne comporte pas l'indication du nom et du prénom de celui-ci ; que ni la signature manuscrite, qui est illisible, ni aucune autre mention de ce document ne permet d'identifier la personne qui en est l'auteur ; que, par suite, et alors même que l'arrêté du 2 mars 2004 que retire celui du 2 juillet 2004 attaqué, auquel il n'est pas annexé, comportait le nom du maire de Baden, ce dernier arrêté est entaché d'irrégularité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SNC ANSE DE TOULVERN est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2004 ;

Considérant, en revanche, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, que ne sont pas de nature à justifier l'annulation de cet arrêté les autres moyens soulevés par la SNC ANSE DE TOULVERN et tirés de ce que le délai qui lui a été accordé dans le cadre de la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'a pas été suffisant, de ce que le retrait est tardif faute de lui avoir été notifié dans le délai de quatre mois et d'avoir été transmis au préfet dans le même délai, de ce que les dispositions du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme n'étaient pas applicables en l'espèce, dès lors que le projet se situe dans un espace urbanisé et hors de la bande des 100 mètres, et de ce que l'enquête publique n'était pas requise, dans la mesure où le coût des travaux n'excède pas 160 000 euros, seuil qui aurait dû par ailleurs être porté à 252 480 euros du fait de la revalorisation automatique prévue par les dispositions de l'article 1er du décret du 23 avril 1985 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la SNC ANSE DE TOULVERN, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Baden une somme de 3 000 euros à ce même titre au profit de la société requérante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 29 juillet 2008, le jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 avril 2005 et l'arrêté du maire de Baden du 2 juillet 2004 sont annulés.

Article 2 : La commune de Baden versera à la SNC ANSE DE TOULVERN une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Baden au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SNC ANSE DE TOULVERN et à la commune de Baden.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 322554
Date de la décision : 16/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 nov. 2009, n° 322554
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Alexandre Lallet
Rapporteur public ?: Mlle Courrèges Anne
Avocat(s) : ODENT ; SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:322554.20091116
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award