Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 26 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Paul A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA05885 du 16 décembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir constaté un non-lieu à statuer, a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 5 août 2008 qui a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de prélèvement social, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1998 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu le traité instituant la Communauté européenne, alors en vigueur, notamment son article 43 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les premier et quatrième protocoles additionnels à cette convention ;
Vu le traité sur l'établissement des Français en Suisse et des Suisses en France du 23 février 1882 ;
Vu la convention entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions sur le revenu et sur la fortune du 9 septembre 1966 modifiée ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu le 1 bis de l'article 167 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 24 de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 ;
Vu la décision n° 98-404 DC du Conseil Constitutionnel du 18 décembre 1998 ;
Vu la décision n° 98-405 DC du Conseil Constitutionnel du 29 décembre 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Daumas, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. et Mme A,
- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. et Mme A,
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Considérant que le Conseil constitutionnel, par une décision n° 98-405 DC du 29 décembre 1998, a, dans ses motifs et son dispositif, déclaré le 1 bis de l'article 167 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 24 de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998, qui organise l'imposition des plus-values en report d'imposition en cas de transfert du domicile hors de France, conforme à la Constitution ; que si M. et Mme A font valoir, d'une part, que le dispositif contesté a été jugé contraire au droit communautaire par la Cour de justice des communautés européennes et le Conseil d'Etat, d'autre part, que le législateur a supprimé, à compter du 1er janvier 2005, les dispositions en litige et qu'enfin, dans sa décision n° 98-404 DC du 18 décembre 1998, le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur ne saurait adopter des dispositions fiscales rétroactives qu'en considération d'un motif d'intérêt général suffisant, il ne saurait en être déduit l'existence d'un changement dans les circonstances de fait ou de droit qui justifierait le réexamen de la conformité de cet article à la Constitution ;
Considérant qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que le 1 bis de l'article 167 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 24 de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998, porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;
Sur le pourvoi :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ;
Considérant que pour demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent, M. et Mme A soutiennent qu'en jugeant qu'ils ne fournissaient aucun élément permettant de remettre en cause l'appréciation des premiers juges selon laquelle ils n'auraient pas transféré leur domicile fiscal hors de France avant le 9 septembre 1998, la cour a dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur de droit ; qu'en jugeant que les stipulations du 3 de l'article 27 de la convention fiscale franco-suisse ne pouvaient être invoquées dans le cadre d'un litige tendant à la décharge d'une imposition, la cour a commis une erreur de droit ; qu'en jugeant que les stipulations de l'article 6 de l'accord d'établissement franco-suisse du 23 février 1882 ne visaient que l'application, par chacun des Etats signataires de l'accord, de la clause de la nation la plus favorisée aux ressortissants de l'autre Etat signataire et non les mesures prises par l'un des Etats vis-à-vis de ses propres ressortissants, la cour a commis une erreur de droit au regard des stipulations combinées de l'article 43 du traité instituant la Communauté européenne et de l'article 6 de l'accord de 1882 et insuffisamment motivé sa décision ; qu'en tout état de cause, les dispositions du 1 bis de l'article 167 du code général des impôts ne sont pas compatibles avec le principe communautaire de libre circulation des capitaux garanti par l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne ; que la cour a commis une erreur de droit en jugeant que les dispositions du 1 bis de l'article 167 du code général des impôts n'avaient ni pour objet, ni pour effet de soumettre à de quelconques restrictions ou conditions l'exercice effectif, par les personnes qu'elles visent, de la liberté d'aller et venir sur le territoire d'un Etat, d'y choisir librement sa résidence ou de quitter son pays au sens des stipulations de l'article 2 du quatrième protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la cour a commis une erreur de droit en jugeant que le report d'imposition d'une plus-value réalisée au cours d'une année antérieure ne saurait être considéré comme un bien au sens des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention et de l'article 14 de cette même convention ;
Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. et Mme A.
Article 2 : Le pourvoi de M. et Mme A n'est pas admis.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.